CHAPITRE 43

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Bastian

Je me suis endormi sur elle, bercé par ses caresses. Maintenant que je suis éveillé, je la contemple alors qu'elle est couchée sur le lit, prise dans un sommeil que j'espère réparateur. J'écoute sa respiration, tentant de me calquer sur elle pour calmer mon chaos intérieur.

Après son récit, j'étais dévasté.

En premier, c'était la sidération. J'ai eu l'impression qu'un véhicule venait de me rouler dessus, tellement le choc était violent. Je me sentais écrasé par cette vérité que j'ai tant attendue. Ensuite est apparue la révulsion, j'ai dû me retenir pour ne pas vomir tout ce dégoût sur le sol de la chambre. Enfin, c'est le chagrin qui a pris le pouvoir sur le reste.

Pourtant, toutes ses émotions que j'ai ressenties pendant qu'Elyana me racontait le viol et le meurtre d'Anna n'ont été que les prémices d'une sensation encore plus forte, celle de la trahison. Mon propre frère a participé à cette horreur. Comment ai-je pu me tromper autant sur James ? Comment ai-je pu ignorer la noirceur de son âme ? Et surtout, pourquoi m'a-t-il dissimulé la vérité ?

Pendant tout ce temps, j'étais certain que son suicide n'était dû qu'à Elyana, mais la réalité est bien plus dérangeante. Et le contenu de son courrier n'a plus la même signification maintenant que je connais toute l'histoire. Il n'a pas supporté d'être responsable de la mort d'Anna. Mon frère a assisté au viol, sans bouger, pire, il a empêché Elyana d'intervenir. En retour, que fait-il ? Au lieu de se dénoncer, lui et ses amis, il est revenu en Écosse pour absoudre sa culpabilité.

Là aussi, il a échoué.

Sa lâcheté l'a tué.

Ce soir, je ne suis pas scandalisé, non, c'est bien plus intense que ça. Je souhaiterais être fils unique.

Comment un être humain, a fortiori, mon propre sang, peut proférer de tels actes ?

James, si tu étais encore en vie, tu aurais goûté ma fureur.

Elyana s'est noyée dans la tristesse, et sa seule échappatoire était de venger son amie. Aujourd'hui, je saisis enfin son but. Ce n'est pas une tueuse, c'est une femme meurtrie par le décès violent d'Anna, celle qu'elle considérait comme sa famille. Mais comment ai-je pu être aussi aveugle ? Il n'a jamais été question de plaisir malsain, elle ne faisait qu'obéir à son chagrin.

Déjà que j'appréciais son courage, à cet instant je suis en admiration par sa force. Elle a été témoin de la plus atroce scène, que je ne souhaiterais même pas à mon pire ennemi, et pourtant elle se lève tous les jours, parle, marche, ressent.

Cette femme n'est pas qu'un chaton, c'est une combattante.

Quand je pense que pendant tout ce temps, je poursuivais la mauvaise personne. En fait, le seul responsable de la mort de James n'est autre que lui-même. Il a creusé sa propre tombe en attirant ces connards sur Anna.

Qui peut administrer de telles violences sur la gent féminine de nos jours ?

À cet instant, s'ils n'étaient pas déjà six pieds sous terre, je me lancerais à leur poursuite, pour les démembrer. On ne touche jamais à une femme sans son consentement. Un principe que ma mère m'a appris dès petit. L'égalité n'a pas de genre, et l'homme ne sera jamais le supérieur de la gent féminine.

« Même toi Bastian, tu dois être conscient en tant qu'homme que tu peux être un potentiel prédateur. »

Depuis j'ai scrupuleusement respecté ce mantra avec toutes les femmes que j'ai pu croiser dans mon existence. Que ce soient des relations professionnelles ou charnelles.

Le corps d'une femme n'appartient qu'à elle.

Un principe que mon frère a dû oublier quand il a décidé de monter un plan foireux pour effrayer Anna, celle qui l'attirait.

Putain, James.

Si je pouvais cesser de t'aimer, je le ferais.

Malheureusement, les sentiments ne s'effacent pas si aisément. Et même si j'exècre tout de lui en ce moment, je ne peux m'empêcher de me rappeler des souvenirs heureux en sa compagnie. Il reste une part de moi, là, enfoui, mais bien présente. Je crois que c'est ça qui me fait le plus mal. Que je ne puisse jamais cesser d'aimer un frère qui a osé s'enfuir et se cacher, plutôt que d'assumer.

Un son incongru me sort de mes pensées, Elyana vient de marmonner dans son sommeil. Agitée, elle semble en proie avec un cauchemar. Je me glisse à ses côtés, puis frôle sa joue de mon index. Un geste qui se veut réconfortant. Mes doigts finissent par toucher ses mèches, et je répète doucement les mêmes mouvements qu'elle quelques heures plus tôt.

Grâce à mon massage, sa respiration redevient progressivement lente, toutefois je continue encore quelques instants pour être certain qu'elle soit apaisée.

Quand Elyana se détourne de moi pour s'étendre sur le ventre, je me lève du matelas, lui donne un baiser sur le front avant de quitter la pièce.

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