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Peu avant vingt heures Chadi pénétra plein d'espoir dans ce cyber-café du centre de Rabat. Il n'y avait pas beaucoup de monde. Il restait plusieurs ordinateurs libres. Le jeune fugitif repéra un homme d'une cinquantaine d'années habillé à l'européenne qui lui donnait l'impression d'être le patron car il surveillait attentivement la salle depuis son comptoir. Il s'avança vers lui :

- Bonsoir monsieur. J'ai été agressé, entama-t-il en arabe, déroulant son histoire maintenant bien rodée. On m'a volé mon téléphone et ils m'ont pris l'argent que j'avais sur moi. Je ne pourrai donc pas vous payer. Je veux juste envoyer un mail à quelqu'un pour demander de l'aide. Seriez-vous d'accord pour que j'utilise gratuitement un de vos ordinateurs pour aller sur Internet juste cinq minutes ? Je vous promets que ce sera très bref. Juste quelques minutes... s'il vous plaît, je vous en prie...


L'autre le regarda d'un air méfiant puis finit par marmonner en désignant un des PC d'un coup de menton :

- Bon ok, vas-y. Prends celui-là. Mais seulement cinq minutes, hein ? Montre en main. Après je te coupe la connexion.

- Oh, merci monsieur, merci ! Qu'Allah soit avec vous et qu'il vous protège.


Chadi prit place devant l'écran que venait de lui indiquer le maître des lieux et il manipula fébrilement la souris avant de taper sur le clavier l'adresse de sa messagerie ainsi que son mot de passe. Après un instant de téléchargement un frisson de joie lui traversa le corps : le mail de Paul était bien là, suivi de deux autres à caractère publicitaire. D'un clic, il ouvrit le message de son compagnon et découvrit son contenu :


« Mon amour,

J'espère que ça va.

J'ai bien eu au téléphone mon ami Lahcen qui travaille au restaurant de l'hôtel Four Seasons à Casablanca. Je lui ai fait un virement bancaire. Il gardera une partie de l'argent pour le service rendu et il te remettra l'équivalent en dirhams des cinq cents euros qui sont pour toi. Il te donnera aussi un téléphone dont le prix est déjà payé avec le virement que je lui ai fait. Il viendra te chercher cette nuit à Rabat avec la voiture de ses parents pour t'amener avec lui à Casablanca où il te proposera un moyen de revenir en France sans passeport. Il m'a dit qu'il y réfléchirait. Je ne peux pas te donner un horaire précis car il prendra la route après son service et il ignore à quelle heure celui-ci va se terminer. Tu devras donc l'attendre au point de rendez-vous entre deux et quatre heures du matin, heure du Maroc. L'endroit exact où il va te récupérer et où tu devras donc patienter dans cette fourchette horaire est le suivant : au pied des marches de la grande porte Almohade de la Kasbah des Oudayas.

Bon courage.

Bonne chance.

Vivement que je puisse te serrer dans mes bras à Paris.

Je t'aime. »


Chadi leva le nez et guetta le tenancier du cyber-café qui l'observait du coin de l'œil. Puis il fixa à nouveau l'ordinateur et cliqua sur « répondre ». Il écrivit à toute vitesse :

« Moi aussi je t'aime. Je suis très impatient de te retrouver à Paris. Merci pour tout. »


Cette courte réponse permettrait à Paul d'être rassuré et d'avoir la certitude que son courriel avait bien été lu, se dit le Marocain. Puis il prit la précaution de le supprimer et se déconnecta. Après quoi il alla remercier le chef de l'établissement qui lui rétorqua :

Le quatrième secret de soeur LuciaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant