La vie de Mathieu (IV)

4.36

C'est à mon tour d'aller chercher Steven à l'aéroport. Avec Pascal, parce que je ne veux pas qu'il y ait le moindre doute sur quoi que ce soit. Il doit être présent à chaque étape, comme ça il ne pourra pas avoir de soupçons.

— Tu es stressé, Mathieu ?

— C'est débile, mais j'ai peur de ne pas le reconnaître.

— Ce n'est pas comme si vous vous étiez connus à l'adolescence. Il ne doit pas avoir changé tant que ça !

— Je ne sais pas trop. Peut-être qu'il est devenu obèse, ou alors qu'il s'est simplement teint les cheveux.

— De toute façon il te reconnaîtra, personne ne peut t'oublier.

Il est trop mignon. Je suis sur le point d'accueillir mon ex, mon premier amour, et Pascal et tout gentil, tout romantique.

— Ah, le voilà.

Les retrouvailles sont un peu froides. Simplement des bises. En même temps, on n'allait pas se sauter dans les bras et provoquer une effusion de larmes au milieu de l'aéroport !

— Vous n'êtes pas venus en taxi ?

Ah, c'est vrai, nous aurions dû y penser. Sauf que notre réflexe est de prendre le RER, nous sommes vraiment des Parisiens dans l'âme. Ce n'est pas super glamour de voyager dans les transports, mais bon...

— Tu n'as pas amené beaucoup d'affaires !

— Merde, mes valises !

Je vois que Steven a gardé les réflexes de la langue française. Il n'a en fait rien perdu de son vocabulaire. Nous sommes donc bons pour retourner à l'aéroport et perdre deux heures pour qu'il puisse avoir accès à ses valises. Il doit prouver que ce sont bien les siennes et le responsable des bagages perdus n'est pas très commode.

— Eh bien, il te voit et il en oublie ses propres affaires.

— Ça arrive, parfois.

— Bof, je n'ai jamais entendu d'histoire comme ça.

C'est raté. Pascal a ses premières suspicions. Il va falloir lui ôter tout doute le plus rapidement possible.