46.

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En me réveillant ce matin, une énorme boule me vrille l'estomac. J'avale avec peine ma Boisson et j'attends silencieusement Anouk. Dire que j'ai dormit serait exagéré. J'ai fermé les yeux, peut-être même que j'ai somnolé. Mais je ne suis pas sûre du tout d'avoir dormi. La seule chose presque heureuse qui se profile aujourd'hui, c'est que je vais entendre la voix de Louise. C'est ce qui me donne suffisamment de force pour me doucher et m'habiller.

Ce qui s'est passé avec Edan hier soir reste du domaine irrésolu. Je ne comprends toujours pas pourquoi il a réagi ainsi. Et cela me fait peur. J'ai une trouille bleu de ce qu'il va se passer ensuite. C'est dans ces moments que je regrette le café, ou encore mon appareil photo.
Mais d'un autre côté, je le trouve particulièrement injuste. Et plus j'y repense, plus je sens que la colère monte en moi. Il ne peut pas me rejeter ainsi sans explications. Je ne suis pas quelque chose qu'on prend et qu'on jette. Je suis une personne. Et même si j'ai conscience que j'ai mis les nerfs d'Edan à rude épreuve, j'aimerais que dorénavant il fasse autant attention que moi à ce qu'il fait. Je n'ai pas protesté quand il m'a demandé de faire attention à mes actes, et j'aimerais qu'il réalise qu'il doit aussi faire attention à ce qu'il me fait.
Je suis là pour lui, mais s'il me rejette, je ne peux rien faire si ce n'est m'éloigner.

C'est à neuf heures passées que la sonnerie de mon appartement retentit. Je me précipite pour ouvrir, et je rejoins rapidement Anouk dans le couloir. Elle me pose des questions d'usage, et je suis surprise de ma voix lorsque je lui réponds. Elle n'est certes pas aussi enjouée que d'habitude, mais je réussi à prétexter un mal de gorge. Plus nous nous approchons du Conseil de la Paix, plus je me sens nerveuse. Je m'imagine les scénarios les pires et les plus frustrants. De plus, j'ai l'impression de passer mes journées dans ce Conseil de la Paix.

À la réception, une personne nous aborde directement et nous guide dans l'ascenseur. Elle appuie sur le numéro 5 et l'ascenseur démarre. Une fois à l'étage, les locaux sont empreints d'une atmosphère sérieuse et solennel. Cet étage est surement réservé au personnel qui travaille ici, et non des "civils" comme Anouk et moi.

La femme qui nous accompagne nous guide jusqu'à une porte fermée, elle toque doucement puis entre. Nous la suivons à la trace. La pièce est plongée dans le noir, comme si le manque de luminosité améliorait la qualité de l'appel ou du son. Pour l'instant, tout est silencieux. Je distingue plusieurs personnes derrière une vitre, elles doivent se trouver dans la salle de contrôle car elles sont entourées de toutes sortes de boutons. La femme chuchote à notre intention :

- L'appel en cours va bientôt se terminer, attendez ici.

J'hoche la tête, de plus en plus nerveuse. La boule dans mon ventre semble enfler de plus en plus et j'ai peur d'étouffer. L'ambiance, tout comme dans le couloir, est lourde. Le calme est pesant. Soudain, les hommes se retournent pour me regarder. La femme à nos côtés me dit alors d'ouvrir la porte qui se trouve sur la droite. J'entre dans une pièce fermée hermétiquement avec une grande table ronde au centre sur laquelle est disposé tout un matériel d'écoute perfectionné. Un homme vient à ma rencontre.

- Bonjour, je m'appelle Arnaud. Je vais juste te demander de t'asseoir ici, sur le siège, et de mettre le casque.

Je m'exécute. J'ai l'impression de ne pas avoir pleinement conscience de ce que je fais. Le siège est confortable. Quand je pose le casque sur mes oreilles, le calme assourdissant laisse place à un calme confus. C'est une sensation étrange.

- C'est moi.

Mon cœur s'arrête.

- C'est moi, Arnaud.

La voix semblait tellement claire que j'ai eu l'impression de l'entendre dans ma tête, comme si quelqu'un se trouvait dans mon cerveau.

- Tu vas devoir parler dans le micro juste devant toi. Tu ne dois pas te tenir trop éloignée, fais bien attention à ne pas le toucher non plus. L'idéal, c'est trois centimètres.

GéniteursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant