Chapitre 29

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CHAPITRE 29

Un comité d'accueil inattendu

À peine eut-il franchi le seuil de la porte, le lendemain, qu'elle prit un taxi pour se rendre à l'agence de la Royal Caledonian Airlines, où l'on ne fit aucune difficulté pour valider son billet de retour. Il y avait même de la place sur le vol de l'après-midi, si cela lui convenait. L'employée lui trouva une correspondance pour Nice, pas en première classe évidemment. Peu lui importait, d'ailleurs, il allait falloir qu'elle se réaccoutumât à vivre comme une personne ordinaire, pas comme une privilégiée du jet set, et le plus tôt serait le mieux.

Elle appela aussitôt Stanley. Par chance, c'était son jour de congé et, oui, il pouvait la conduire à l'aéroport, mais pourquoi partait-elle ?

- Je vous expliquerai plus tard, Stanley, et surtout pas un mot à madame Conyngham, ni à qui que ce soit, d'accord ?

- Pour sûr, Miss, vous pouvez compter sur moi.

Elle eut tout juste le temps de repasser chez Pierre, de boucler sa valise, et de griffonner deux messages, l'un adressé à l'avocat pour le remercier de son hospitalité, l'autre, plus long, et qui lui coûta davantage, pour James. Déjà, le chauffeur était devant la porte, au volant de sa voiture personnelle, une vieille Mustang bien entretenue. Elle hésita : que faire des clés que lui avait confiées Pierre ? Elle les laissa finalement entre les mains de Stanley, à charge pour lui de les restituer.

Le ciel était couvert, et un fin crachin réduisait la visibilité. Une fois assise dans la voiture, elle se retourna une dernière fois avec un petit pincement au cœur vers les immeubles du centre-ville. L'immeuble de Shamrock se dressait orgueilleusement, un peu à l'écart des autres. On n'apercevait pas ses étages supérieurs, perdus dans les nuages bas.

Stanley avait éteint sa radio, et les seuls bruits étaient ceux des essuie-glaces, et des pneus sur l'asphalte mouillé. La circulation était peu chargée, en cette fin de matinée, et ils parvinrent rapidement à l'aéroport international George Bush ; elle eut cependant le loisir d'expliquer au chauffeur, étonné que James ne l'accompagnât point, qu'elle devait retourner en France pour régler ses affaires, mais qu'elle reviendrait, elle ignorait encore quand. Ses explications ne devaient pas être très convaincantes, car il répliqua :

- Vous faites un si beau couple avec monsieur James ! Ça me briserait le cœur, si vous deviez vous séparer, Miss.

- Et à moi donc ! songea-t-elle. Les jours qui s'annonçaient seraient difficiles, elle en était consciente, et elle n'aspirait qu'à une chose, trouver tellement de travail en retard qu'elle n'ait pas le loisir de regretter son merveilleux amant.

Après que le chauffeur l'eut serrée dans ses bras, elle enregistra rapidement sa valise au guichet des premières classes, où on lui indiqua l'emplacement du salon VIP. N'allait-elle pas regretter ce luxe, les facilités et les égards qu'apporte l'argent ? Après tout, si elle se pliait, elle aussi, à la volonté de la vieille Irlandaise, elle pourrait monnayer son invention pour une somme, colossale pour elle, qui lui permettrait de mener une vie oisive pendant le restant de ses jours. Avec ou sans James. Car, une fois le marché conclu, qui les empêcherait de poursuivre leur relation ? Mais son caractère droit répugnait à une telle duperie, même si Meg Conyngham avait tenté de la berner.

Son passeport fut tamponné par un agent de l'immigration indifférent : les États-Unis accordaient moins d'attention à ceux qui les quittaient qu'aux candidats à l'entrée. Elle consacra un peu de temps et d'argent à faire l'emplette de quelques colifichets pour sa mère et Josée, dans les nombreuses boutiques qui vendaient de pseudos souvenirs du Texas – made in China de toute façon.

Opération HadèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant