Chapitre 50

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CHAPITRE 50

Vous êtes Chinois !

Un petit groupe attendait sur le trottoir encore luisant de pluie d'une placette entourée d'immeubles et de plusieurs commerces, fermés en raison de l'heure. Il y avait une supérette, une boulangerie, un salon de coiffure, et même un café-tabac, signalé par la traditionnelle carotte, et un marchand de journaux. Une fontaine glougloutait paisiblement au milieu de massifs de pétunias. Du linge était étendu sur les balcons, et les lueurs bleutées émanant de nombreuses fenêtres indiquaient que les résidents, le dîner terminé, devaient être installés devant leurs téléviseurs. On aurait pu se croire dans n'importe quelle banlieue française, si ce n'avait été pour la chaleur inhabituelle, et la taille des insectes qui tourbillonnaient par milliers autour des globes des lampadaires. Un homme s'avança, vêtu d'un pantalon de toile et d'une chemisette.

- Bonsoir, je suis Henri Verdier, du Centre National d'Études Spatiales, le CNES. Bienvenue à Kourou. Bonsoir Philippe, comment vas-tu ? Il serra chaleureusement la main du capitaine. Merci d'avoir assuré le convoyage. On se voit dimanche au club ? Sa pointe d'accent indiqua sans équivoque à Claire qu'elle se trouvait en présence d'un « pays ». Après avoir récupéré leurs valises, et pris congé de l'obligeant militaire et de son chauffeur, ils se laissèrent entraîner vers les autres membres du comité d'accueil.

- Sunil Malhotra, de l'Agence Spatiale Européenne, c'est lui qui vous prendra en charge à partir de demain et vous mettra en contact avec l'équipe chinoise. Gilberte Récamier, elle sera votre interface pour les problèmes que vous pourriez avoir durant votre séjour, ce qui, souhaitons-le, ne se produira pas. Et Roland Duplat, adjoint du chef du service sécurité-protection. L'homme à contacter s'il y a le moindre souci à ce sujet. Voici deux livrets d'accueil du centre, avec les informations pratiques et les numéros de téléphone, et un plan. Nous avons préparé deux appartements à tout hasard, nous ne savions pas exactement quelles dispositions vous souhaitiez ?

- Monsieur Conyngham et moi-même sommes fiancés, monsieur Verdier, et nous aurons bientôt un bébé, alors un seul appartement fera parfaitement l'affaire, intervint tranquillement Claire, pendant que James, un peu gêné, affectait d'examiner la petite fontaine d'où émanait le coassement éploré d'un batracien en quête d'une âme sœur.

Un sourire éclaira le visage du responsable.

- Ah, mais que voici un accent qu'il me plaît d'entendre ! Vous êtes d'où, mademoiselle Massari ?

- Je suis née à Sainte Maxime, monsieur, mais je vis à Cabrières.

- Mais nous sommes voisins, alors, peut-être même cousins, qui sait ? Figurez-vous que je suis natif d'Antibes ! Permettez, il faut que je vous fasse la bise, si monsieur m'y autorise. Il faudra que vous veniez dîner à la maison, pour que nous parlions un peu du pays.

Ce fut sur cette note chaleureuse que le petit groupe se sépara, non sans que le jeune Indien leur ait demandé à quelle heure il devait venir les chercher le lendemain. Il parlait un français excellent, bien que teinté d'accent britannique.

- À quelle heure pourrons-nous rencontrer les Chinois ? rétorqua Claire.

- Oh, ils sont lève-tôt. Nous voulions les loger dans des appartements de passage, comme celui qui vous a été attribué, mais ils ont exigé de demeurer tous ensemble. Ça a été un casse-tête, mais finalement le CNES a retapé un bâtiment qui avait servi à loger des ouvriers durant la période de construction du site. Ce n'est pas très confortable, mais ils s'en sont déclarés satisfaits. Ils font même leur propre tambouille. Toutes les semaines, il y en a deux qui vont faire les courses à Cayenne, chez leurs compatriotes. Enfin, pour répondre à votre question, ils arrivent à l'EPCU – excusez-moi, c'est l'Ensemble de Préparation des Charges Utiles – à sept heures du matin.

Opération HadèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant