CHAPITRE 43
Quelque chose que je devais te dire...
L'homme, à terre, bougeait faiblement, allongé dans une flaque de sang qui allait s'élargissant. Encore frissonnante, elle se revêtit rapidement, hésitant sur la conduite à suivre. Y avait-il eu d'autres échanges de coups de feu, pendant qu'il abusait d'elle ? Elle était trop tendue pour y avoir prêté attention.
Saisie d'une impulsion subite, elle pressa le bouton d'émission de la radio et chuchota :
- James ? James ? Tu es là ? Sans obtenir de réponse, elle réitéra son appel au bout de quelques instants. L'appareil grésillait faiblement, et elle avait beau tendre l'oreille, elle ne captait aucun son qui ressemblât à une voix humaine, seulement le hurlement des sirènes qui produisaient leur vacarme traumatisant. Elle était au bord du découragement quand, miraculeusement, la petite radio se mit à crachoter.
- Claire, tu me reçois ? Elle faillit crier.
- James, je suis dans la salle de commandes. Où es-tu ? Que se passe-t-il ?
- J'ai dû m'éloigner, pour qu'on ne m'entende pas. Bien qu'avec le bruit des sirènes... tu as réussi, ma chérie, bravo. Nous allons recevoir rapidement du renfort. Ne bouge pas d'où tu es, si c'est possible.
- Mais toi, James ? Les as-tu... ? Elle répugnait à prononcer le mot. Tu n'es pas blessé, au moins ?
- Il y en a trois hors de combat. Deux définitivement. Et l'Italien, il est amoché, mais il est vivant. Et bien attaché. Reste Pierre : je l'attends. Et toi, ma belle ?
- Il y avait un homme dans la timonerie. Tu sais celui qui était là dans l'après-midi. Il a tenté de me violer. Je crois que je l'ai... oh, James ! C'est horrible, ce que j'ai fait. Je dois t'expliquer. Elle ressentait, brutalement, le besoin de se justifier, mais il l'interrompit sans ménagements.
- Welcome in the club, dear! Tu m'expliqueras plus tard, pour l'instant nous n'avons pas beaucoup de temps, et...
- Lâche ton arme, James !
Elle mit un instant avant de comprendre que cette dernière phrase, plus distante, n'avait pas été prononcée par lui.
- Ne fais pas de bêtises, pose la doucement sur le sol, entendit-elle encore. Elle étreignait tellement la petite radio que ses articulations blanchissaient. C'était trop bête ! Et c'était de sa faute, à elle. Si seulement elle ne l'avait pas appelé, si elle avait résisté à cette envie d'entendre sa voix.
- Claire, vous m'entendez ? C'était bien la voix de Pierre. Si vous voulez revoir ce jeune homme vivant, je vous conseille de nous rejoindre gentiment.
- Ne l'écoute pas, Claire ! hurla James. Il y eut un bruit sourd, et elle n'eut aucune peine à imaginer la crosse de l'arme entrant en contact avec la nuque de l'homme qu'elle aimait.
- Claire ? Désolé, mais cet imbécile d'Irlandais l'a bien cherché. Écoutez-moi. Rageusement, elle éteignit l'appareil. Elle ne se demanda même pas ce qu'elle devait faire : la voie était toute tracée. Il restait désormais trois acteurs en scène : Pierre, James – hors circuit pour le moment – et elle. Elle devrait donc combattre seule l'homme qu'elle s'était plu à imaginer, durant son premier séjour, comme un ami, presque un parent.
Elle hésita à se saisir de l'arme du voyou, tombée à terre comme la lampe. Elle n'allait quand même pas affronter à mains nues Pierre, qui était armé. D'autre part, elle s'accrochait au mince espoir que, voyant ses plans déjoués, il prenne la fuite avant l'arrivée des secours. Il était assez intelligent, et au fait des lois – il était avocat, après tout – pour ne pas souhaiter aggraver son cas en les tuant, James et elle, alors que son plan était déjoué et que les garde-côtes arrivaient. Sa répugnance des armes fut la plus forte et, si finalement elle prit le pistolet, ce fut pour le jeter aussi loin que possible vers l'océan. De toute façon, elle n'aurait pas su s'en servir.

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Opération Hadès
AbenteuerBrillante scientifique travaillant à Sophia Antipolis, Claire Massari a la géniale intuition d’un programme informatique qui révolutionnera la séismologie. Mais sa découverte suscite bien des convoitises. Sa rencontre avec un jeune pétrolier texan l...