Chapitre 48

4 1 0
                                    


CHAPITRE 48

Opération Ômega

Les deux heures qui suivirent furent fébriles, et surtout consacrées à de multiples échanges téléphoniques. La jeune femme rappela plusieurs fois Hubert à Paris puis, à l'Élysée, le conseiller diplomatique de la présidente Montreuil. Quant à Kowalski, il fut pratiquement en ligne constamment avec Washington. James s'était absenté pour préparer quelques vêtements et effets de voyage. Bien que sa présence au centre spatial ne fût pas indispensable, il tenait à accompagner Claire. Meg, pour sa part, informait l'un après l'autre les membres de son conseil d'administration – du moins ceux qu'elle n'avait pas mis sur la touche dès qu'elle avait repris le contrôle de sa société - ainsi que le responsable de la cellule de crise qu'avait mise en place Shamrock, dès que le pétrole avait commencé à se répandre en mer. Ce fut elle qui donna le signal du départ :

- L'avion est à l'aéroport, prêt à décoller. James, qui venait de revenir, poussa un soupir exaspéré.

- Avec le trafic, à cette heure-ci, nous n'y sommes pas encore. Croyez-moi, j'en sors !

- Pas de soucis, intervint l'envoyé de Washington. Nous allons vous déposer avec l'hélico.

Ils prirent place tous les quatre dans la spacieuse cabine, d'un confort bien supérieur à celui qui les avait déposés, quelques heures plus tôt à peine, sur la plateforme. Celle-là même qui achevait de se carboniser, en vomissant des milliers de tonnes de pétrole dans l'océan. Deux autres appareils vrombissaient dans le ciel, tels d'agaçants coléoptères.

- Les chaînes de TV, commenta sobrement Kowalski. Les gens des médias ne sont pas tout à fait idiots : ils vont comprendre le coup de l'entrée par la propriété voisine. Il vous faudra trouver autre chose, lança-t-il à l'adresse de Meg.

- Chaque problème en son temps, lâcha-t-elle philosophiquement. Mais il ne faudrait pas qu'ils puissent suivre ces deux là – elle désigna du pouce son fils et Claire – jusqu'à Koulou-machin.

- Kou-rou, corrigea patiemment Claire, en faisant rouler le r. Et je ne pense pas que les journalistes puissent pénétrer au centre spatial sans accréditation.

- Cela dépendra de la publicité que votre gouvernement entendra accorder à cette opération, Miss, remarqua avec bon sens le jeune américano-polonais alors que l'hélicoptère s'élevait en douceur. Et si c'est un succès, ce que nous espérons tous, vous n'échapperez pas à une méga conférence de presse, je vous le garantis. Pour une fois qu'un gouvernement pourra se vanter d'une action concrète en faveur de la défense de l'environnement, il serait bien bête de ne pas en profiter. Je sais que mon président ne laissera pas passer cette occasion. Il s'interrompit, regrettant peut-être déjà sa franchise.

Mais les préoccupations de la jeune femme étaient bien éloignées de ces considérations de basse cuisine politicienne qui l'auraient irritée en d'autres circonstances. Prenant conscience à chaque minute qui passait de l'énorme responsabilité qui pesait sur ses épaules, elle passait et repassait dans sa tête toutes les variables de Hadès, qu'elle connaissait par cœur. Le programme allait-il fonctionner ? Elle l'avait testé à d'innombrables reprises, mais il ne s'agissait que de simulations. Elle ne pouvait se permettre un échec, vis-à-vis de James, et de tous ceux qui lui accordaient leur confiance. Elle le devait plus que tout à la cause qui lui était chère, la préservation de l'environnement, et aussi à la mémoire du professeur Bourdaloue, qui l'avait soutenue depuis le jour où une jeune étudiante avait franchi timidement la porte de son bureau pour lui exposer un projet un peu fou dont elle avait eu la géniale intuition.

-Préparez-vous à l'atterrissage, annonça le pilote en se retournant : l'insonorisation de l'appareil était excellente. Le gros engin biturbine se posa doucement non loin du jet d'affaires qui l'avait amenée de Cannes à Londres, quelques semaines auparavant.

Opération HadèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant