Chapitre 5 -L'arrivée au château-

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      Adossée contre la banquette, mes mains toujours attachées derrière mon dos, j'essayai tant bien que mal de trouver une position plus confortable. En vain, ça ne servait à rien. De dépit, ma tête se tourna vers la seule vitre de l'habitacle, et mon regard se perdit dans la forêt environnante. Je ne savais pas où j'étais. Seulement que j'étais loin de chez moi. J'aurai bien aimé demander à quelqu'un, mais j'étais seule sur cette banquette, séparée du chauffeur par une vitre bien trop épaisse.


Enfermée et attachée comme je l'étais, on pourrait croire que j'étais en quarantaine après avoir attrapé la peste ou le choléra. Au choix. J'avais juste lu un stupide bouquin, pas organisé un attentat, et encore moins tué quelqu'un !

Pourtant, ils m'avaient jeté sans ménagement dans la voiture, et incapable de me relever, mon corps avait fait connaissance avec les moindres recoins de l'habitacle. Les angles, les portières, les poignées, la vitre, tout y était passé ! Et le moins que je puisse dire, c'est que les angles bien pointus de la voiture m'aimaient tout particulièrement. Ma tête s'en souvenait encore...


Je soupirai doucement. Cette journée avait été catastrophique. Tout d'abord l'affaire avec mes sœurs, puis avec Mike, et enfin avec mon père. Ca faisait beaucoup d'un coup. Peut-être un peu trop.

En cet instant, j'aurai adoré subir le babillage incessant de Natasha et Johanna, j'aurai aimé aller à la librairie et je suis certaine que j'aurai apprécié l'humeur de Phil. Tout ceci me semblait atrocement lointain. Et même si je n'étais pas partie depuis longtemps, cette routine que j'avais mis plusieurs jours à construire me manquait.


Le bruit d'une portière qui s'ouvre me fit sursauter. Je ne m'y attendais pas. Le grand homme brun aux yeux noirs, celui qui m'avait attaché et jeté dans l'habitacle tenait fièrement sur ses jambes, le bras tendu pour garder la portière ouverte. Mon officier était de retour.


     -Allez, sors de là.


Et de très bonne humeur si j'en croyais son ton sec. Ne voulant pas m'attirer d'autres ennuis, je me faufilai tant bien que mal vers le soldat, qui me prit sans ménagement par le bras une fois que je fus à sa portée et me remis sur pied.


     -Avance.


Docile, je le suivis sans faire d'histoire vers ce qu'il me semblait être une auberge. Elle ne payait pas de mine vue d'ici. Toute faite de brique, l'enseigne « Au trois vallées » accrochée de travers, semblant être sur le point de s'envoler par la force du vent, on aurait pu croire qu'elle allait s'effondrer sous nos yeux.

Je ne voulais pas y aller, pas y entrer. J'avais bien trop peur de finir ensevelis sous les briques. Peut-être que c'était leur intention finalement. J'amorçais doucement un mouvement de recul mais un seul regard en coin de la part de l'officier me fit changer d'avis. Avec son regard de tueur, il semblait vraiment redoutable. J'avalai difficilement ma salive et le suivi, en me promettant de ne jamais le contrarier. Je ne voulais pas subir les foudres de quelqu'un d'autre aujourd'hui.


La première chose que je perçu en entrant était l'odeur de la viande. Elle planait dans l'air et narguait mes papilles. Mon ventre émit un grognement sinistre. Je grimaçai en posant mes mains fraichement détachées dessus pour étouffer le bruit. Ce n'était pas le moment. Et on ne me donnerait surement pas à manger.

La Belle et la BêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant