Sa voix était tour à tour dominatrice et directive puis douce et affable.— Tu es beau, grand et fort et tu m'as l'air sincère. Tu seras parfait, ajouta Frioul.
A ces mots, toutes les femmes se remirent à pousser des cris stridents.
Cette femme, si sûre d'elle et aussi si belle, afficha un sourire presque démoniaque. Ses lèvres laissèrent paraître de belles dents blanches, mais cela n'eut pas d'effet sur Garrigue. Il ne voyait que ce corps qui avait dansé pour lui, rien que pour lui et qui maintenant lui parlait. Garrigue planait totalement sous les effets de la potion, son corps tout entier était relâché et son libre arbitre était piloté par les femmes qui l'encerclaient.
La belle Frioul se releva et tourna le dos à Garrigue. Là, face à ses compagnes, elle s'adressa à elles dans son langage. Garrigue ne compris pas un seul mot des paroles qui venaient d'être prononcées. Il baignait dans cette euphorie provoquée par la démonstration de danse de la Chamane.
Sans un bruit, toutes les femmes se levèrent et se mirent à applaudir sans quitter le prince des yeux. Un peu niaisement et sans savoir pourquoi, il souriait. Les femmes lui rendirent son sourire.
Garrigue, qui aurait dû être rongé par l'inquiétude, était étonnamment serein, alors que le village entier, toujours rassemblé pour l'occasion dans la grande pièce unique de cette cabane géante, se mit à bourdonner des voix de toutes ces femmes. L'intonation était différente de celle émise pendant la danse, et elle fut cette fois de courte durée. Lorsque le silence fut retombé, il était seul avec Frioul. Il n’avait même pas remarqué que toutes les femmes étaient parties. Plus de cercle autour de lui. Juste Frioul et lui. Il regardait cette femme qui le captivait, droit dans les yeux et il n'avait pas peur.Pourtant, il ne put très longtemps soutenir ce regard d'un bleu si profond. Il baissa alors la tête sur ses mains et vit à son poignet droit le bracelet impossible à quitter du sorcier et à son index gauche l'anneau offert par l'homme-chouette, c'est la bague qu'il choisit de faire rouler deux fois entre ses doigts. Tout allait bien.
Frioul la Chamane emprisonna les mains de Garrigue, les serra très fort, puis balança sa tête en arrière, les yeux clos, et murmura :— Blash vanitt kjunt und bas tinnheld.
Une fois sa suite de syllabes incompréhensibles prononcée, elle rouvrit lentement ses yeux, fixa Garrigue et l'aida à se relever. Étrangement, il n'eut aucun mal à se mettre sur ses pieds.
Sa main, fermement empoignée par celle de Frioul, il n’avait d’autre choix que de suivre la jeune femme qui louvoyait devant lui, jusqu'à une hutte dissimulée par des peaux de bêtes. La température étouffante et la pénombre rendait la découverte du lieu impossible. Il reconnut l'odeur entêtante du patchouli et butta contre une sorte de lit à même le sol. A peine eut-il le temps de s'habituer à l'obscurité qu'une main glissa de son épaule à sa poitrine et le poussa fermement en arrière. Déséquilibré, il se retrouva allongé sur le dos. Ses doigts lui confirmèrent qu'il était sur un matelas en peaux de bêtes.Plus rien ne le rattachait à la réalité, sauf ces bruits ordinaires du village, les mêmes que ceux qu'il avait pris l'habitude d'écouter lorsqu'il se promenait chez les pauvres, déguisé en paysan. La vie au village Maldia avait repris comme si son arrivée n'avait rien bouleversé dans la vie de ses habitantes, hormis l'espace de quelques heures,.
Là, c'est une chaleur nouvelle, inconnue, qui envahissait son corps, des vagues successives lui montaient jusqu'au visage. Son cœur battait la chamade, il respirait fort. Frioul, agenouillée près de lui, traçait des formes suspectes, avec ses mains, dans le vide au-dessus de sa poitrine. Ses longs doigts esquissaient de drôles d'arabesques qui disparaissaient au fur et à mesure que ses mains fines utilisaient l'espace. Garrigue contemplaient cette femme, si proche de lui. Des sensations nouvelles prenaient vie en lui. Son corps réagissait à cette proximité d’une manière qu’il n’avait jamais soupçonnée. Cette inconnue, étrange et inquiétante ne l’effrayait pas, elle attisait une curiosité qu’il ne se connaissait pas. Pourtant, son libre arbitre était aux abonnés absents. Il se sentait quelqu’un d’autre, sûr de lui.
Soudain, Frioul se releva et sans le quitter du regard, entreprit de dénouer doucement les sangles qui tenaient son corsage. Garrigue gardait les yeux rivés sur les formes parfaites du corps de déesse de cette beauté. Lorsqu'enfin sa poitrine fut libérée, Garrigue resta interdit. Il lui semblait assister à une scène qui lui aurait été proscrite. Pourtant, rien ne venait stopper le strip-tease de la belle jeune femme. Les pensées de Garrigue s'étaient tout à coup aiguisées. Il était, pour la première fois de sa vie, face à une femme qui, sciemment, –enfin il le croyait– lui dévoilait sa poitrine. Jamais il n'avait vu de femme d'aussi près, enfin de femme aussi peu habillée. Au château, il n'avait jamais même entr’aperçu un peu de peau dénudée sur une servante ou une cuisinière ou une habilleuse. La mode était aux robes qui couvraient entièrement le corps, seules quelques femmes de mauvaise vie, qui trainaient sur le marché tard le soir, se laissaient aller à montrer leurs épaules. Et encore, lui n’avait jamais vu, il en avait juste entendu parler.
Frioul, était bien différente et Garrigue appréciait le spectacle qu'elle lui offrait. Il n’était plus question de quête, de trésor, de sort, ni de malin. Garrigue sentait toutes les parties de son corps prendre vie.
Puis ce fut le tour de sa jupe, qu'elle laissa glisser jusqu'au sol. Le peu de lumière qui entrait dans la hutte permit tout juste à Garrigue de deviner les contours du corps magnifique de Frioul. Totalement débarrassée de ses vêtements, elle s'allongea tout près de lui. Ses seins nus se posèrent sur son buste, alors ses yeux se révulsèrent et il lui semblât perdre connaissance.
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L'ŒIL DE PAON
FantasyL'œil de Paon est un conte, un folklore oublié. Les contes, c'est de 7 à 99 ans. Cette histoire se déroule à l'époque des châteaux forts, des rois, des manants et où la sorcellerie agissait dans le secret des alcôves dissimulées. Garrigue vivait tr...