Chapitre 16 : Peeter

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Les mots me manquent.

Maintenant que Faustine est là, devant moi, je ne sais plus quoi dire. Nous sommes enfin réunis et pourtant, j'ai l'impression que nous n'avons jamais été aussi distants.

Ses grands yeux bleus me transpercent de toutes parts et font battre mon cœur plus vite, plus fort, jusqu'à me donner la nausée. J'aimerais contrôler le flot d'émotions qui se déverse en moi. J'aimerais prendre les commandes et savoir exactement quoi dire et quoi faire.

Sauf que la Faustine qui se trouve devant moi est bien différente de celle avec qui je me trouvais il y a encore quelques jours. Je le vois dans sa façon de se tenir courbée, de me regarder avec méfiance et d'épier les alentours. J'aimerais lui redonner sa force et son courage, mais je suis complètement paralysé à l'idée qu'elle m'ait oublié.

-Peeter ? demande-t-elle avec une légère affirmation dans la voix.

Mon cœur se gonfle et j'acquiesce silencieusement. Elle imite mon geste et son regard ne lâche pas le mien.

-Allons-nous en, décrète-t-elle en passant devant moi.

J'ai à peine le temps d'ouvrir la bouche que déjà, elle contourne la maison pour rejoindre l'arrière du jardin. Je la rattrape et tente de lui saisir le bras, mais elle se dérobe violemment en se retournant. Son regard exprime clairement sa pensée : ne me touche pas.

J'essaie d'ignorer la douleur qui envahit ma poitrine.

-On ne peut pas partir, j'explique à contrecœur. Pas sans Miles.

Elle plisse les yeux. La colère et la confusion se mélangent sur ses traits fatigués.

-Pourquoi ? lâche-t-elle entre ses dents, comme si parler lui coûtait trop d'énergie.

Parce qu'il est venu te sauver et qu'on ne peut pas le laisser là. Oh, et accessoirement parce que c'est de ton père qu'il s'agit.

-On a besoin de lui pour sortir du Secteur, j'improvise.

Elle secoue la tête et reprend sa course.

-Tu peux l'attendre si tu veux, moi je m'en vais, lance-t-elle par-dessus son épaule.

Je soupire et me résigne : Faustine est toujours aussi entêtée et caractérielle. Inutile de négocier pour l'instant. Mais il faut que je la fasse revenir vers notre véhicule avant que Miles ne sorte de la maison.

Je suis Faustine au fond du jardin tandis qu'elle s'approche des bambous qui délimitent la séparation avec la pelouse voisine. Elle s'engouffre à travers les branches et débouche de l'autre côté sans s'arrêter. Des feuilles se sont coincées dans ses longs cheveux miel et je dois me retenir de les lui enlever.

-Où est-ce qu'on va ? je demande en m'incluant volontairement dans la question, en espérant qu'elle ne me rejette pas.

-Loin d'ici.

Je hausse les sourcils et passe une main dans mes cheveux en prenant une grande inspiration.

-Attends, on ne peut pas juste marcher sans savoir où on va, je proteste calmement. Je suis recherchée par la Milice et tout le monde te connaît. On va forcément...

-On pourrait aller dans notre maison.

Cette fois-ci, lorsqu'elle se retourne, son regard me coupe littéralement le souffle. Que vient-elle de dire ?

-Tu... Tu te souviens ?

Elle hausse les épaules et reprend sa course.

-Pas vraiment. J'essaie encore de faire le tri dans mes souvenirs.

- Unique - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant