Esclave Des Vampires

Chapitre 61.

En prononçant ces mots, il a aussitôt accaparé toute l'attention qu'il m'est possible de lui donner. Mes yeux sont grands ouverts, je suis dans l'incapacité de faire un geste ou de prononcer un mot. Mes oreilles sont aux aguets, bien déterminées à assimiler le moindre de ses mots.

L'homme ayant remarqué mon état plus qu'intéressé, il me pousse gentiment vers le petit canapé au coin de la grande chambre.

-Prenez place, dit-il fermement, j'arrive.

Il quitte la pièce et revient quelques minutes plus tard, avec un livre de la même couleur que mes cheveux sous le bras. Il me le donne en s'asseyant à mes côtés.

Je le dépose sur mes genoux et le regarde de plus près. C'est un gros livre qui a l'air plutôt vétuste et sur lequel on peut lire "Histoire de la guerre des trois clans". Je devine donc, grâce à ma perspicacité surdéveloppée, que le contenu de cet ouvrage traite de ce que les frères vampires m'ont résumé grossièrement (très grossièrement).

La curiosité guidant mes gestes, je feuillette rapidement les pages. Vers la fin du livre, c'est assez étrange mais elles sont blanches, immaculées. Naturellement, je reviens en arrière et tombe sur le cinquième chapitre que je décide de lire brièvement.

Cependant, je n'ai pas le temps de comprendre la première phrase, Claude referme déjà le livre qui écrase mes doigts au passage, dans un claquement désagréable. Il s'empresse de m'arracher le livre sous mon regard hébété de petit être qui ne comprends décidément rien à la situation.

-Eum, toussote-t-il, ce livre est spécial...

-C'est-à-dire ? ralai-je en caressant mes doigts pour apaiser la douleur.

-C'est-à-dire qu'il traite de la guerre des trois clans mais que cette guerre est, en quelques sortes, toujours d'actualité. Tant que la prophétie ne sera pas accomplie, ce ne sera jamais vraiment terminé et ce livre magique écrit les faits au fur et à mesure.

-C'est donc pour ça que les dernières pages sont vierges ? demandai-je fière d'avoir compris où il voulait en venir.

-Oui, mais vous êtes vous-même impliquée dans cette guerre et par conséquent, un chapitre vous est dédié.

-Un chapitre traite de ma vie ? répétai-je intéressée.

-Oui, souffla Claude, mais en aucun cas vous ne devez le lire.

-Pourquoi ?

Excédé par mon obstination, il dépose le livre et se lève. Il marche vers la fenêtre et reste là, de sorte que je ne puisse pas voir son visage.

-Ce livre, dit-il mélancoliquement, vous connais mieux que vous ne vous connaissez vous-même, mademoiselle. Il sait des choses qui vous rendraient folle. Si vous le lisez, ça vous détruira !

-Claude, osai-je, vous l'avez lu, vous ?

Il ne répond pas de suite. C'est seulement après quelques secondes d'hésitation qui daigne parler.

-Oui, avoue-t-il enfin, j'ai voulu, après la mort de Lydia, lire les passages qui relataient nos jours heureux ici. Je n'aurais pas dû. J'ai appris ce que Vincent et Lydia pensaient de moi et ce que moi, je pensais d'eux. J'ai pris connaissance de tant de secrets... Il aurait mieux valu que je n'apprenne jamais ces choses.

Il prend une pause, avale sa salive et reprend presque tout de suite.

-Vous savez, continue-t-il en se tournant vers moi, le plus vicieux avec ce livre, c'est qu'une fois qu'on a commencé à lire les passages relatant notre vie ou celle de nos proches, on ne peut pas s'arrêter. C'est plus addictif que n'importe quoi d'autre. Si on ne m'avait pas arraché ce livre des mains avant que je ne le termine, j'aurai sombré dans une folie certaine.