Jeudi 23 juin - Aiden
Je m'attendais à une réaction violente. Un coup, un licenciement express, des insultes... Mais leur réaction me scia sur place. Leurs yeux s'écarquillèrent en premier lieu, Abigail se retrouva bouche-bée et son mari hocha formellement la tête. Ses yeux ne me lâchaient pas d'une semelle et ils étaient la seule partie de son corps qui trahissait son étonnement. Sa posture resta droite, digne. Ses mains se lièrent tandis que j'entendais Sebastian Hollygan toussoter d'amusement dans mon dos. Après tout, personne ne le savait, hormis Enzo. J'estimais que mon orientation sexuelle ne concernait personne d'autre que moi, mes capacités professionnelles n'allaient pas être inquiétées. L'attirance envers les femmes ou les hommes ne devraient pas être un critère, pourtant, je savais que dans notre société, l'homosexualité n'était pas encore tolérée à sa juste valeur. C'était quelque chose qui m'indignait, donc je préférais me taire. Qu'aurais-je dû faire d'autre ? Mes clients ne savaient rien de ma vie sentimentale. S'ils le savaient, après tout, cela ne changerait en aucun cas mes arguments pour leur défense. S'ils étaient cons au point de le croire, libre à eux de s'écarter de mon chemin.
Abigail tenta de dire quelque chose mais mon supérieur lui coupa l'herbe sous le pied en laissant échapper un « Ah » très représentatif. En gros, il s'en fichait. Il n'était pas écœuré, pas désespéré, juste surpris et compréhensif. Sa femme ne semblait pas réellement du même avis, mais il avait l'air de s'en moquer comme du monde.
« Très bien, veuillez nous excuser. Je vous présenterais bien un fils, mais ils ont tous une épouse déjà attitrée, ricana-t-il en s'attirant juste un coup dans le bras. Eh bien, vous serez le premier à entrer dans la famille sans épouser aucun de nos enfants ! Parfois, changer les règles est possible pour une juste cause. »
Abigail s'indigna, balançant ses bras dans tous les sens, faisant des expressions théâtrales, qui lui ressemblaient bien. Son regard était noir, il aurait pu me fusiller sur place s'il en avait eu le pouvoir. Ses mains bougeaient dans tous les sens. J'aurais pu trouver cela drôle et en rire si je n'avais pas été le centre de ce carnage. J'étais tenté de rire pour savoir si elle allait feindre le malaise, mais je n'osai pas. Être gay était un fait, défier la femme du boss en était une autre. Son mari tourna la tête dans son sens, mais ne fit rien, la regardant s'agiter avec une attitude neutre. Lorsqu'elle le remarqua, elle me pointa d'un doigt accusateur et poussa Enrick de ceux qui étaient encore libres.
« Il est hors de question qu'il travaille ici ! Les personnes de son genre nous ont déjà apporté trop de problèmes. Tu ne t'en souviens pas ? Ah, bah non, que tu ne t'en souviens pas ! Tu étais trop occupé à travailler quand toute cette histoire est survenue ! Notre bébé a déjà subi tellement de choses. Tu devrais plutôt préserver cet homme-là ! À moins qu'il fasse partie de la même espèce que ce monstre, après tout, qui sait ? Soit il se marie à une de nos filles, soit il décampe ! »
Elle parlait d'un ton tellement enragé qu'elle me fit tressaillir. Son mari lui posa une main sur l'épaule avant de secouer la tête et de lever les yeux au ciel pour défendre mon parti. Il déclara que pour rien au monde il me renverrait puisque j'avais été employé par Monsieur Hollygan et que ce dernier tenait vraisemblablement à me voir rester. À en croire les rougeurs qui gagnèrent ses joues, Madame McAndrey était gênée. Ou très en colère. J'aurais plutôt opté pour la seconde option. Finalement, non sans me faire les gros yeux, elle partit d'un pas agacé, faisant claquer ses talons sur le sol, pour rejoindre sa fille cadette. Celle qui paraissait lui ressembler le plus. Son mari s'excusa en me disant que sa femme était « spéciale ».
Quelque chose, pourtant, me faisait tiquer depuis son discours. Qui était ce bébé dont elle parlait ? Avaient-ils déjà connu un enfant homosexuel ? Un adolescent de la même orientation que moi qui avait subi des dommages grave ? Avaient-ils perdu un enfant ? J'aurais pu penser directement à Ean, mais il y avait un truc qui ne collait pas dans cette version. Il n'avait pas l'air d'avoir déjà découvert sa sexualité. On m'avait comparé à quelqu'un que je ne connaissais pas. Devrais-je considérer sa tirade comme une menace ou plutôt comme une marque d'affection qui visait à me protéger des gens... comme moi ?
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I. Domination [Boy x Boy]
RomanceEan est l'un des jeunes héritiers d'une famille d'avocat célèbre à Boston : les McAndrey. Dans le but de mieux comprendre une affaire qu'il doit résoudre pour ses études, il se rend dans le club de son frère. Mais il ne pensait pas y rencontrer un h...