Chapitre 37

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Dimanche 25 septembre – Ean

J'avais toujours aussi mal et je ne savais pas pourquoi. On disait que la nuit portait conseil. Conneries. J'étais toujours aussi furieux après moi-même, mes réactions, Aiden, ses secrets, ce type et le mal qu'il avait fait au châtain à l'époque. Par-dessus tout le reste, j'étais enragé après tout ce que je pensais. C'était étrange parce que je savais que j'avais faux sur toute la ligne, que ressasser le passé me faisait souffrir, blessait mon entourage par la même occasion, mais je ne réussissais pas un seul instant à arrêter. C'était comme si tout était devenu incontrôlable et que je me torturais volontairement.

Je n'avais pas mangé depuis la veille au matin et mon ventre réclamait désespérément de la nourriture, gargouillant fréquemment, mais je savais que je ne pourrais rien avaler. Je le sentais. Alors j'avais attendu, toute la nuit, une partie de la matinée, à tenter d'effacer la présence de Gregory de ma tête, à faire taire sa voix qui résonnait dans mes oreilles.

Pourquoi maintenant ? avais-je songé. Alors que cela faisait des années et que je n'avais jamais fait d'aussi grosse crise depuis longtemps. D'un autre côté, je me souvenais de mon passé depuis si peu de temps que je ne voyais pas comment j'aurais pu en faire plus tôt. En y repensant, il m'était arrivé quelque chose de similaire chez Aiden, il y avait peu de temps, mais la douceur qu'il avait dégagée m'avait calmée. Pourquoi cette fois je n'y parvenais pas ?

Au petit matin, tentant de ne plus voir défiler les ombres devant mes yeux, je me mis à faire les cent pas, mains sur les oreilles, paupières closes. Je me pris le mur une paire de fois, ne voyant pas où je marchais, mais cela fut suffisant pour m'apaiser un minimum. Je parlais plus fort que leurs voix douloureuses, les repoussant le plus loin possible.

Je m'allongeai finalement dans le lit, trouvant qu'il état le summum du confort après une nuit passée accroupi à ses pieds, rêvant de ce que les autres pouvaient bien penser. Aiden que j'avais laissé en plan pour une foutue lettre, ma famille qui ne m'avaient pas vu la veille au soir lors du dîner. Ils devaient tous me détester. D'un autre côté, comment aurais-je pu leur en vouloir ? J'avais explosé mon téléphone pris par une pulsion et je me retrouvais incapable de leur donner des nouvelles.

Je soupirai en voyant mes bras couverts de griffures sanglantes. Combien de temps m'étais-je acharné dessus pour qu'ils fussent dans un tel état ? Je ne pouvais décemment pas me présenter à ma famille avec de telles marques, ils m'interneraient. C'était peut-être d'ailleurs ce qu'ils devraient faire. Néanmoins, l'hôpital me donnait des sueurs froides et je n'avais aucune envie de m'y retrouver de nouveau.

« Ean, je sais que tu es là, je t'ai vu ! Je sais que tu m'entends ! Ramène-toi ! »

La voix paraissait lointaine et proche à la fois et je l'aurais reconnue entre mille. Paniquant à l'idée qu'il me trouvât ici avec ma jambe écorchée par la grille, les bras qu'il penserait scarifiés et la tête que je devais avoir, je me relevai hâtivement pour courir dans le couloir. Je savais que ma grand-tante avait encore une armoire pleine de vêtements qui avaient dû prendre la poussière. Mieux que de me balader avec une partie de ma fesse à l'air, j'espérais y trouver quelques trouvailles. Quelle ne fut pas ma déception de n'y découvrir que des tas de bas et de robes grises diverses.

En en piquant une au hasard, je grimaçai, me demandant si j'étais vraiment assez fou pour enfiler une telle tenue juste pour éviter de sortir avec les bras nus. J'avais bien une veste, mais elle m'aurait servi à cacher l'énorme trou et la légère balafre qui s'étirait du milieu de ma cuisse jusqu'au milieu de ma fesse droite. Non, je ne pouvais pas faire cela. Passer incognito c'était une chose, garder ma dignité et ne pas paraître louche en était une autre. Qui se baladait encore dans des habits pareils à cette époque ? Personne. Non seulement tout le monde verrait que j'étais un homme déguisé en femme, qui plus était une femme d'un ancien temps ! Ce n'était pas la période du carnaval, cela ne passerait jamais inaperçu.

I. Domination [Boy x Boy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant