Chapitre 12

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Vendredi 29 juillet – Aiden

Voir Ean était devenu une habitude. À des intervalles réguliers, je le retrouvais dans la maison de sa grand-tante, sous son conseil. Au début, on se voyait tous les trois jours. Depuis une semaine, c'était davantage instinctif. On s'envoyait un message lorsqu'on voulait se retrouver, tous les deux jours au maximum. Cette maison que je trouvais lugubre au départ s'était rendue accueillante. Ean avait tondu la pelouse avec son grand-père, le portail s'ouvrait et ils avaient raccommodé l'une des fenêtres fissurées qui donnait sur le jardin. Le panneau de vente était retiré – Sebastian avait joué stratégiquement auprès de sa fille – et nous étions libres d'aller et venir.

Je ne craignais plus de rentrer dans la vieille bâtisse. Les fantômes n'étaient jamais venus nous rendre visite. Il y avait souvent des craquements, mais c'était le cas de tous les bâtiments. Ean s'était moqué de moi la première fois que je m'étais réfugié sous la couette après un grincement suspect. Il s'avérait que c'était juste le lit. Aux dernières nouvelles, il n'y avait jamais eu d'empreintes de mains sur les murs et les carreaux, de bruits de pas ou de traces de pieds sur le plancher. Rien de plus étrange que chez moi. J'étais toujours sur mes gardes durant la nuit, mais j'avais pris goût à cet endroit. Il me faisait relativiser sur ma condition sociale, qui s'était légèrement arrangée.

Cet endroit, c'était surtout devenu un temple sacré de la débauche. Nous n'avions encore jamais entamé la dernière étape qui consistait à faire l'amour en profondeur, mais nous avions déjà exploré presque tout le reste. J'avais notamment constaté qu'Ean était réceptif à tout ce que je pouvais lui faire, mais il avait une trouille bleue à l'idée d'avoir mal. Je connaissais son corps sur le bout des doigts et il connaissait également le mien. Notre défi était surtout de ne pas tomber dans la routine.

Une confiance mutuelle s'était installée dans notre couple. Mes barrières étaient tombées depuis longtemps, mais il n'était pas question de lui en faire part. Cela était notamment dû au fait que j'étais terrifié à l'idée de m'engager officiellement dans une relation avec un homme. La première fois que je m'étais abandonné dans les bras de quelqu'un, il s'était barré sans un mot, du jour au lendemain, alors qu'une promesse de fiançailles planait au-dessus de nous.

Après cette rupture douloureuse et incomprise de ma part, je m'étais réfugié dans l'ombre du Circle, avec des partenaires d'un soir. Jamais en public, je mettais un point d'honneur à me montrer intransigeant, ce qui m'avait valu une sale réputation. Tout le monde savait que ce n'était qu'une fois. En d'autres termes, j'étais celui qu'il fallait réussir à séduire.

Depuis Ean, le Circle n'existait plus. Enzo s'inquiétait d'ailleurs de ne plus m'y voir, redoutant que ce soit notre altercation puérile le soir de la fête en l'honneur de Lexy qui en était la cause. Il m'avait présenté moultes excuses, ne comprenant pas que ce n'était pas le sujet. La vérité était surtout que je ne pouvais pas lui dire que j'aimais passer du bon temps avec son petit frère et que je n'avais aucune envie de voir quelqu'un d'autre.

« Monsieur Miller ? » m'interrompit une voix.

Je levai les yeux pour reconnaître Enrick McAndrey dans l'embrasure de la porte de mon bureau. Il me fixait intensément, sondant mes moindres faits et gestes avec une expression neutre. Il me suffit de m'arrêter dans mes notes pour qu'il vint s'installer sur la chaise face à moi. Même sa posture assise était professionnelle. Pourtant, j'avais l'impression qu'il allait se passer quelque chose qui ne me plairait pas. Cependant, même si je le pensais fortement, je n'en dis pas un mot.

« J'aimerais m'entretenir avec vous, commença-t-il, personnellement et professionnellement, si vous le voulez bien. Avez-vous quelques minutes à m'accorder ? »

I. Domination [Boy x Boy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant