I. Domination [Boy x Boy]

Chapitre 30

Dimanche 11 septembre – Ean

L'amertume m'avait tenu compagnie toute la nuit. Ean n'était certes pas dans son état normal la veille et je savais qu'au fond, je ne pouvais pas lui reprocher d'avoir trop insisté sur la boisson. C'était un jeune qui s'était fondu dans le moule et c'était sûrement la première fois que je le voyais faire un écart. Pour couronner le tout, Wace lui avait lancé un défi après leur premier verre, soit celui de boire deux verres supplémentaires. Ean n'avait pas refusé, naïvement persuadé qu'on lui donnerait quelque chose de soft. Le fait état qu'on lui avait servi un alcool très fort et qu'au bout de la deuxième liqueur, il avait déjà commencé à marquer des signes de faiblesse.

Cependant, je les avais rapidement abandonnés pour retrouver une ancienne connaissance de lycée derrière le comptoir, persuadé que notre conversation serait rapide. Au contraire, elle s'était plutôt éternisée. Elle m'avait présenté quelques amis qu'elle s'était faits en travaillant là, en essayant de me caser avec une nana qui était, selon elle, tout à fait mon genre. Cette connaissance appartenait tellement au passé qu'elle n'avait pas eu vent de mon homosexualité qui avait pourtant fait scandale dans mon entourage.

Lorsqu'enfin j'avais réussi à repousser les avances de cette fille totalement éméchée et désespérée, j'avais tenté de retourner avec le roux et ses amis : disparus. Je les avais cherchés partout, balayant plusieurs fois la piste de danse du regard pour finalement les y trouver dans les bras l'un de l'autre, dans une danse lascive et tactile. Je n'avais pas réussi à retenir ma réaction. J'avais bondi sur eux en un rien de temps.

Voilà comment je m'étais retrouvé avec un hématome de la taille d'un poing sur la joue gauche. En voyant Duncan, je ne l'aurais jamais soupçonné de posséder une telle force. La douleur qui persistait dans ma mâchoire était une preuve indélébile de la soirée de la veille, un souvenir de la proximité entre celui que j'aimais et son meilleur ami.

Je tournai les yeux vers Ean qui se retournait dans tous les sens, esquivant Lollipop qui lui chatouillant le visage avec sa queue. Ses yeux s'ouvrirent péniblement tandis qu'il repoussait le félin qui miaula de mécontentement, puis il grimaça de douleur en portant une main à son front. Il sembla chercher quelques secondes l'endroit où il se trouvait avant de me voir, assis et habillé de l'autre côté du lit.

Je n'avais pas réussi à m'empêcher de l'emmener chez toi, même si j'aurais préféré lui montrer mon antre dans d'autres circonstances. C'était le seul moyen que j'avais trouvé pour être sûr que je ne croiserais pas ce Duncan dans les parages au réveil ou au coucher. Je ne voulais pas me risquer à une nouvelle confrontation avec lui. J'avais besoin d'entretenir une sérieuse discussion avec Ean et cela me paraissait déjà assez pénible, suffisamment pour ne pas vouloir supporter une présence supplémentaire.

Le roux s'assit, se frotta le visage et grogna lorsque j'entrepris d'ouvrir les volets. Ses cheveux étaient débroussaillés et plus sombres qu'ordinairement. Son regard était sombre et trouble et je dus prendre sur moi pour ne pas fondre sur lui pour y retrouver la lueur que j'aimais voir au réveil. Il me parut étonnamment séduisant malgré tout, même si je ne pouvais pas m'empêcher de jubiler du fait qu'il avait l'air d'avoir la gueule de bois.

Alors qu'il marmonnait dans sa barbe, serrant les draps fermement entre ses mains tout en frissonnant, j'allai lui préparer un verre d'aspirine. Une fois prêt, je l'installai sur la table de chevet la plus proche tandis qu'Ean semblait complètement perdu. Il n'avait pas l'air de comprendre où il était ni ce qu'il faisait ici. Lorsqu'il osa poser la question qu'il m'avait répétée plusieurs fois la veille, je soupirai en comprenant qu'il ne se souvenait pas de grand-chose. Mais au fond, j'aurais dû m'en douter. Parce que faire une critique d'un emballage de préservatif n'était absolument pas commun.