Chapitre 13

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Samedi 30 juillet – Ean

Je m'étais réveillé très tôt, en transe. C'était la première fois que je faisais un cauchemar en compagnie d'Aiden... En fait, c'était surtout la première fois que je faisais ce cauchemar en compagnie d'Aiden. D'habitude, sa présence m'apaisait, mais cette fois, ce n'était pas le cas. J'avais revu cette silhouette difforme noire me hurler dessus, me dire que je n'avais rien à faire là, qu'elle en avait marre de moi, qu'elle avait le droit d'aller voir d'autres personnes, que j'étais trop collant. Puis il y avait ces mains humaines qui se détachaient du corps et qui me poussaient par-dessus la rambarde du balcon. Je tombai à la renverse, dans le vide, d'un ou deux étages. Je sentais toujours ma jambe se faire couper sur toute la longueur et je me réveillai en sursaut, sans jamais atterrir en bas.

Jamais je n'avais réussi à comprendre qui était cette silhouette. J'ignorais si c'était un homme ou une femme, je ne retenais jamais à quoi ressemblait sa voix. Je ne savais même pas si cette personne était réelle ou si ce n'était qu'une allégorie de mes plus grandes angoisses. La seule chose que j'avais constaté, c'était que je me blessai toujours la jambe droite et que cela coïncidait étrangement avec la cicatrice qui blanchissait ma peau depuis plusieurs années. Cicatrice que je m'étais faite dans des circonstances mystérieuses, d'ailleurs. Je me souvenais m'être réveillé à l'hôpital une nuit avec un bandage tout autour de cette plaie et une douleur surpassant l'entendement dans tout mon corps, complètement amnésique. J'avais mis deux jours avant de reconnaître tous mes frères et sœurs, une semaine pour me rappeler du nom de mes amis de lycée qui étaient revenus vers moi à la fin de nos études. En revanche, impossible de me souvenir de l'accident que j'avais subi et tous s'étaient donné le mot pour ne surtout pas m'en parler.

Je tentai de calmer ma respiration haletante, une main posée sur ma poitrine où mon cœur battait la chamade, l'autre main essuyant rageusement les larmes qui coulaient seules. Je parvins à me rallonger sur le dos sans douceur, tentant tant bien que mal de reprendre mon souffle. Je savais que je ne me rendormirais pas, mais je pouvais au moins me reposer.

D'un coup, il y eut un mouvement à ma droite et je me tournai en sursaut vers Aiden qui avait redressé la tête, le visage encore marqué par le sommeil, les yeux entrouverts et les sourcils froncés. Il tendit le bras pour me caresser doucement les cheveux et souffla :

« Qu'est-ce que tu as ?

- Ce n'est rien, gémis-je, un cauchemar, j'ai l'habitude. »

Il m'attira contre lui et je me retrouvai la tête contre sa poitrine. Ce geste m'apaisa plus rapidement que prévu. Il me posa quelques questions afin de savoir de quel genre de rêve j'avais été victime, ce qui s'y était passé, mais je mentis en racontant que je ne m'en souvenais plus. S'il ne me crut pas, il n'y fit aucune allusion et se contenta de se taire. De mon côté, je priais simplement dans ma tête de ne pas le refaire les nuits suivantes, lorsque je serai seul chez moi.

En relevant les yeux sur son visage apaisé, les yeux clos et le souffle irrégulier, je me dis que j'avais de la chance de l'avoir près de moi. En tant qu'amant, il était irréprochable, si on retirait le sexe, évidemment. Il aurait rapidement pu prendre la fuite, la veille, ou encore ce matin-là. Il était toujours à l'écoute lorsque j'évoquais mes problèmes ou lorsque je lui racontai des anecdotes ennuyeuses, il me racontait lui-même quelques histoires. En un sens, Aiden était devenu l'un de mes amis les plus chers. Même Wace et Duncan ne lui arrivaient pas à la cheville.

Quelques fois, je me demandais si ce n'était réellement que de l'amitié entre nous, si je ne ressentais pas plus. A chaque fois, d'ailleurs, je me persuadais que oui. L'inverse était impensable, impossible. Je craignais tellement de souffrir, de me faire repousser. Pourtant, je le savais, je me voilais juste la face. J'étais déjà amoureux. Je voulais toujours le voir, j'avais l'habitude de sentir le parfum d'Aiden sur l'oreiller près de moi, chez ma grand-tante surtout. Je connaissais par cœur son corps, sa chaleur, la texture de sa peau... J'aimais être contre lui, l'embrasser... J'étais complètement mordu et c'était effrayant car les principes de notre relation étaient clairs. Sans attache.

I. Domination [Boy x Boy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant