J'étais dans cet endroit, un lieu qui aurait dû me paraître complètement étranger et pourtant, à mon plus grand malheur, il n'en était rien. Il m'était familier ou en tout cas me le semblait. Ces meubles, ces tables, ces couleurs, l'agencement même, tout était comparable à ma prison d'antan, me rappelant des souvenirs que j'aurais aimé, et dieu seul sait à quel point, faire disparaître de mon esprit. Je regardais la pièce, trouvant dans ma mémoire chaque meubles et forcément une histoire, une douleurs qui lui était associé. Cet ensemble de souvenirs me sautait au visage se transformant en une main fantasmagorique qui m'étreignait violemment la gorge. Je suffoquais. Je n'avais jamais imaginé que son désir de me torturer était si grand ou peut-être n'était-ce qu'une punition pour l'avoir abandonner à multiple reprise ... Je n'en pouvais plus, l'ambiance de la pièce m'empêchait de respirer, toujours cette main invisible qui écrasait mon larynx. J'avais besoin d'air. J'avançais tout droit, j'avais l'impression de tituber, me dirigeant tant bien que mal vers la porte fenêtre qui menait au balcon. Une fois à l'extérieur, si je puis dire, j'attrapais les barreaux qui s'étiraient du sol jusqu'au plafond et pris une profonde inspiration, comme s'il me manquait d'air, comme si j'allais mourir suffoquer. La première goulée fut libératrice et je renouvelais, encore et encore. J'étais avide de sentir l'oxygène entrer dans mon système et aérer mon esprit. Et puis, je regardais le paysage que me laissait entrevoir la féraille. Prisonnière... Cette solution eut dans un premier temps un effet thérapeutique, les bouffées d'air frais, rien de mieux, mais, comme il était possible de s'y attendre, ce n'était pas durable, elles n'étaient pas de taille à faire disparaître la désagréable sensation qui m'avait envahit quelques instants plus tôt. Je me retournais face à l'appartement, le détaillant pour arriver à cette seule conclusion, j'allais m'y perdre. J'allais disparaître, mon esprit, mon moi de maintenant, dans cet enclos aux souvenirs et je ne le voulais pas. Je devais me ressaisir, me donner les chances d'aller de l'avant, quitter cette fille si fragile et apeurée, j'aspirais à me décrocher de cette image passée, celle qui ne me correspondait plus... J'entrepris alors de faire disparaître tout ce qui me représentait le passé, ces meubles emplis de souvenirs indésirables. Je formulais, cette locution que j'avais apprise il y a de cela plusieurs années, celle qui me permettait de faire disparaître les objets inanimés, je la répétais, visualisant dans mon esprit ceux que je voulais faire disparaitre, mais, quand je rouvris les yeux, m'attendant à voir une pièce vidée, rien. Oui, rien n'avait bougé. Cela, était impossible. La pièce était telle qu'elle l'avait toujours été. Je recommençais, j'avais dû me tromper dans la formule, même si cela me paraissant complètement absurde. Toujours rien. Un manque de concentration peut-être ? Mais malgré mes tentatives, rien ne bougeais, ne fusse que d'un millimètre. C'est alors que je compris, comme un choc brutal, ce qu'avait dit plutôt ma guide d'un jour. Abasourdie, je retentais, en vain, je ne voulais pas y croire. Comment ? Mais comment était-ce possible ? Pour une raison totalement inconnue, mes pouvoirs étaient annihilés dans cet endroit. C'était incongru, je n'avais jamais fait face à une telle situation. Il me semblait complètement impensable de n'avoir accès ni à mes pouvoirs, ni à mon savoir. Cette part de moi qui m'avait tant couté m'était dorénavant inutilisable. C'était pire que de se sentir humaine, se sentir dans une situation injuste. On n'avait pas le droit de me priver de mes pouvoirs, j'avais tellement souffert à cause d'eux ! Alors en laissant de côté les meubles, je tentais toutes sortes de sorts, ceux qui ne demandaient rien. Ou si peu de concentration. Ceux qui me semblaient si simple et qui étaient pourtant totalement inefficace. J'essayais, encore et encore. Ne pouvant me l'admettre, ne voulant pas y croire. J'avais perdu mes pouvoirs. J'étais mal, désemparée puis rapidement, la colère, la haine. Je rageais intérieurement. Je voulais tout détruire et encore plus ces meubles qui me narguaient impitoyablement. Sans trop savoir ce que je faisais j'avançai vers un premier meuble que je poussais vers une pièce à l'écart dans l'appartement. Je le fourrai dedans tout en me rendant compte qu'il s'agissait de ma chambre à couchée. Non pas dans le sens qu'elle aurait dû être ma chambre, non, c'était l'exacte reproduction de celle que j'avais côtoyés pendant des années, sous la tutelle de Kérian. Certes, celle où il avait voulu m'emprisonner il n'y a pas si longtemps y ressemblait. Mais ce n'était en rien comparable à ce bijou, à cette pièce extraordinaire et je crus un instant que mon odeur serait sur les draps. Etait-ce un mauvais rêve, un cauchemars, c'était sa mon futur ? La répétition du passé ? Je frissonnais de peur et refermais là porte. Il avait réellement un don pour me faire sentir si mal. Ne pouvait-il pas oublier le passé ou du moins essayer ? N'avait-il pas compris que je ne serais plus jamais à lui dans mon cœur ? Je n'eu aucun ressentiment à condamner la chambre qui servit de dépotoirs à tous ces meubles que je détestais. Et à la fin, quand la chose fut terminée, je continuais à ne rien regretter. Non je ne regretterais pas de dormir sur un canapé rudimentaire, car même dormir par terre m'aurait promis des nuits bien plus douces que celles que j'aurais passé dans cette pièce... - Et bien tu as fait du ménage ! S'exclama une voix derrière moi, elle était surprise sûrement dû à cette initiative inattendue, ce changement radical. Je sursautais au son puis me retournais pour dévisager l'étrangère.- Qu'est-ce que tu en penses ? Demandais-je, épuisée de tous mes efforts donnés. Elle hésita un instant, cherchant la bonne formulation.- C'est simple. Je retraçais son regard, il n'y avait plus de lampes, ni de lampadaires, les bougeoirs avaient été retirés ainsi que les drapés qui ornait les canapés, les chaises en acajou et la table en bois massif étaient eux aussi portés disparus, enfin au coin à droite, les meubles de la télévision avait été enlevé laissant l'écran posé à même le sol, sans support. Seuls restait le fameux canapé lit, dépouillé de couverture ainsi qu'une table basse post modern mélangeant des contours en bois et un dessus de verre. Le reste donc, avait été retiré, mêmes les lustres ne trônaient plus fièrement au dessus de nos têtes. Une pièce bien vide.- Au moins, maintenant on voit l'espace dis-je, en accord avec la blonde. Il ne restait plus grand chose dans ce qui avait été une montagne d'exubérances. A ma réplique, mon acolyte ne put s'empêcher de pouffer.- Décidément, tu es vraiment spéciale ! Formula-t-elle difficilement. J'aurais aimé lui répliquer que c'était le cas de chacune d'entre nous, mais je me contentais de sourire et l'accompagner vers le balcon aux fenêtres toujours grandes ouvertes. A l'extérieur, devant les grilles en fer forgé de ma prison, elle dégaina son paquet de cigarette, des Marlboro à la menthe. Elle m'en proposa une que je refusais courtoisement.- Au fait, je ne t'ai pas demandé, mais tu as faim ? Me demanda-t-elle tandis qu'elle allumait sa cigarette. - Un peu, dis-je, exprimant toutefois ma retenue. Je ne souhaitais dépendre de personne dans cet endroit. Cette allusion à la nourriture me fit me souvenir subitement de mon sac aux mains de Seth qui contenaient tout un tas de sucreries et autres choses cochonneries alimentaires. J'en salivais.- J'irais te chercher tout ça, dit-elle tout en recrachant de la fumée. J'acquiesçais.- Tout à l'heure ... commençais-je encore indécise. Devais-je lui demander ? Aurais-je une réponse ? - Quoi ? M'invita-t-elle ?- Tout à l'heure tu m'as dis une chose qui m'a un peu étonnée, tu as déjà entendu parlé de moi ? Au dernier moment, j'avais changé ma question, je garderais pour plus tard ce problème de pouvoir ...- Ah ça oui ! S'exclama-t-elle. Apparemment cela semblait si évident, ce qui était d'autant plus désarçonnant. Face à mon regard abasourdit, montrant que je n'en savais rien, elle décida de m'expliquer.- Tu es une légende ... parmi nous. Nous sommes toutes les prisonnières de ces « personnes ». Certes nous avons des privilèges, mais ils ont mains mises sur nos vies. On ne peut pas s'enfuir, on a trop peur. Pourtant toi, tu as réussis et t'es là devant moi ! En vie ! Je sentais l'émotion dans sa voie, la joie et le respect que je lui inspirais ainsi que le dégout qu'elle exprimait vis-à-vis des membres de Nahash et ce, sans se cacher devant moi. A ces premières explications, je comprenais enfin, c'était donc ça. J'avais fuis et j'étais là. Etais-ce tout ce qu'il leur fallait ? Ensembles elles valaient cent moi et pourtant aucune ne s'était dit qu'elles les surpassaient ?- Bien sur, continua-t-elle, emporté par la joie, c'est connu que tu as un lien spécial avec Kérian. Cela me paraissait étrange que quelqu'un face mention de ce qui nous unissait de façon aussi légère. Pour moi, c'était trop compliqué à expliquer et c'était plus qu'un « lien », mais j'avais l'impression qu'elle en parlant sans véritablement savoir de quoi il s'agissait. Non, j'en étais sûre, elle l'ignorait.- Mais tu n'es pas la seule à avoir approché Kérian, il y en a eu d'autres, mais toi, tu es unique, il s'est battu pour toi ! Il te protège au sein même de l'organisation. Je ne savais pas comment encaisser ce qu'elle venait de m'apprendre, trop abasourdie par ces révélations. J'étais unique à ces yeux et pourtant l'enfoiré ne m'avait pas attendue seul ? Aussi étrange que cela puisse paraître, j'étais jalouse, blessée, je sentais ce léger pincement au cœur. Alors c'était ça ? Je l'aimais encore ? Pourtant je ne devrais pas, je n'aurais pas dû être troublée par cette révélation. Alors, pourquoi je l'étais ? Malgré qu'il m'ait blessée, torturée et souillée, malgré qu'il m'ait fait ces choses impardonnables, je ressentais pour lui ce que je n'aurais pas dû. Je lui étais décidément connectée et ce à un point que je mesurais de plus en plus enfermée en ces lieux.- Tu es notre lueur d'espoir, reprit-elle, me coupant dans mes pensées, le regard illuminé.- Mais je ne m'échapperais pas cette fois-ci, répliquais-je cassante, encore secouée. Etait-ce cruelle ce que je venais faire ? Etait-ce impardonnable que de vouloir briser ce vain espoir qu'elle portait ? Je voulais, à cet instant précis, qu'elle arrête d'espérer, qu'elle arrête de penser que j'étais cette libératrice. Non, ce n'était pas le cas, rien de tout cela n'était vrai. Je n'étais pas une légende, je n'étais pas un héros, j'étais seulement comme elle, prisonnière de Nahash. Alors à quoi bon espérer que je la sauve ? Espérer de moi ne servait à rien, je n'étais rien, une chose insignifiante, vicieuse, qui ne pourrait jamais être à la hauteur de ses attentes. Et puis, comment pouvait-elle compter sur moi ? Mais ne savait-elle donc pas que j'avais vendu ma meilleure amie pour vivre à Salem ? Elle l'ignorait certainement, un héros ne peut pas faire de mal après tout. Malgré le ton employé, sans appel, elle ne semblait pas perdre courage. Au contraire, dénicha dans mes propos une idée, une pensée que j'ignorais moi–même.- Ah ça c'est la pièce. Je la regardais, surprise mais de quoi voulait-elle parler ?- Comment ça ? L'interrogeais curieuse. Joséphine arrêta d'afficher une mine heureuse. A ce changement de facies l'atmosphère s'alourdit. Puis, ma comparse soupira, il était long et étrange. Sans savoir pourquoi tout mon corps se tendit. Tout ça ne présageait rien de bon. Elle se mit à fouiller dans ses poches et je me demandais ce qu'elle cherchait, quand elle ressortit son paquet. Comme tout à l'heure elle s'en servit une et me proposa. Cette fois-ci j'acceptais, je ne sais pourquoi, je ne fumais pas et pourtant j'avais l'impression que la toxique fumée m'aiderait à encaisser ce qu'elle allait bientôt me dévoiler. Elle alluma nos deux cigarettes et tira longuement sur la sienne. Je la regardais faire, m'impatientant de comprendre tout en redoutant le secret qu'elle s'apprêtait à révéler. Après avoir recraché sa fumée blanchâtre, elle inspira, cherchant, je crois, une manière d'amener la chose.- Tout à l'heure, je t'ai parlé de ... leur moyen de pression. Mais ce n'est pas tout ce qu'ils ont réussi à découvrir. Elle s'arrêta un instant, encore un silence, et je m'inquiétais d'avantage, craignant ce que je pourrais apprendre.- Ils ont continué les recherches, les expériences et en sont arrivés à la conclusion que notre sang si ... spécial ... nous connectait entre sorcière. C'est à quelque chose près le même, pas de groupe différents, même taux de globules, ...Pour faire simple ton sang ressemble au mien à s'y méprendre. Je ne voyais pas trop où elle voulait en venir, certes cet aspect je ne le connaissais pas, mais il n'y avait pas de quoi en être chamboulée. Quel était le rapport avec mon incapacité à me servir de mes pouvoirs ? Cependant, ma camarade n'avait pas fini.- Si on part de là et avec l'étrangeté qui nous constitue, tu sais que l'on ne peut pas se blesser donc, on ne pourra pas blesser d'autres « nous », soit nos sœurs... La manière dont elle formula cette phrase me fit saisir un indice, c'était infime mais des plus effrayant et je priais intérieurement que ce ne soit pas ce à quoi je pensais. Ô je vous en prie, faites que ce ne soit pas ça. Je paniquais, l'appréhension était passée à un tout autre stade et comme pour lui donner raison, mon interlocutrice s'arrêta un instant, tirant sur la cigarette. Cette fois-ci elle ne savait pas comment, un ensemble d'image lui revinrent en tête, notamment lorsque quelques maitres peintres avaient arrangé la pièce. Sans pouvoir se contenir ses yeux commencèrent à produire un peu trop d'eau et elle renifla bruyamment.- Alors, ils ont voulu savoir ce que ça faisait lorsque l'on recouvrait un objet de notre sang. Miracle il était immunisé ! Son exclamation n'avait rien de joyeuse, elle était triste, peinée, endeuillée, elle me transperçait comme une fine lame de glace.- Alors imagine lorsque tu es dans une pièce, enfermée, c'est un peu comme si tu te trouvais à l'intérieur d'une sorcière, impossible d'utiliser tes pouvoirs. Notre sang émet cet aura, ce cercle fermé, toujours clos, censé nous protégé. C'est pourquoi, même si le balcon n'en est pas totalement recouvert, cela t'empêche pourtant d'utiliser tes pouvoirs. Tu es dans le cercle. Je n'y croyais pas, ou plutôt je ne voulais pas y croire. Comment aurais-je pu croire à tant de barbarisme ?- Tu es en train de me dire ... ? Je n'avais pas réussie à finir ma phrase mais elle comprit. Elle comprit que c'était si inimaginable, si horrible qu'il fallait qu'elle me le dise et non qu'elle le sous-entende.- Oui, cette pièce est entièrement peinte à partir de sang de sorcière. Alors c'était ça l'homme ? Mes yeux s'embuèrent, ma gorge était nouée, ma cigarette se consumant entre mes doigts. Je l'avais sentie venir, mais jusqu'à la fin, je n'avais pas voulu y croire. Pétrifiée, je me demandais comment on pouvait arriver à un tel stade de sadisme ? J'hurlais intérieurement, leur demandant s'ils auraient osés faire ça avec le sang de l'un des leur ? Auraient-ils pensés à en recouvrir une salle ? Même les tribus les plus primitives n'avaient pas eu la barbarie, la sauvagerie de faire une telle chose. Et puis la haine passa à la tristesse. En regardant le mur je ne pus m'empêcher de penser à elles. Aux sorcières qui étaient mortes pour finir ainsi peinturlurés sur les murs, à leur âme perdue à jamais dans le néant, prisonnière de ce monde cruelle, leur esprit incapable de repos. Il n'y avait rien après pour les êtres immortels, juste errer. Bien que j'essayais, je ne pouvais imaginer les tourments qu'elles enduraient encore maintenant. Sans lieu, sans corps, sans but, juste un esprit, un cœur qui tourne et tourne, intouchable, imperceptible, ignoré de tous et pourtant présent parmi nous. Un fantôme sans porte de sorti, et ce à jamais. Une sensation de brûlure m'obligea à lâcher ce qui maintenant n'était qu'un mégot sur le parvis du balcon. Sans demander, je me servis dans le paquet de mon acolyte, tout comme elle j'en avais besoin. J'allumais la cigarette et tirait, tirait, tirait dessus jusqu'à n'en plus pouvoir, explosant mes poumons de cet air vicié. J'en étais presque à m'étouffer avec la fumée. J'avais besoin d'avoir mal, de sentir que j'étais vivante. Ne se préoccupant plus de moi, Joséphine était elle aussi dans ses pensées et je savais qu'elles étaient forcément en relation avec notre discussion passée. Elles songeaient à nos défuntes sœurs et alors que je dévisageais sa mine tendue et attristée je me dis qu'elle avait dû échapper à ce funèbre destin d'un cheveu, mais à quel prix ? Ce fut lorsque je terminais de consommer ma drogue d'un jour, qu'elle se ressaisit.- Je vais nous chercher quelques trucs à manger, ça nous fera penser à autre chose.- Bonne idée, acquiesçais-je tout en pensant que c'était juste un moyen pour fuir cette sanglante pièce. Elle ne s'attarda pas, elle sortit directement de la chambre. Le son désagréable de la clés qui tourne dans cette fichu serrure, m'interdisait tout aventure en dehors de cette pièce, une pièce dont les murs n'étaient que l'apogée du sadisme d'êtres humains. Je m'interdisais à les regarder, ils étaient si imprégnés de ma chair qu'il m'était impossible de ne pas en être chamboulée. Ainsi, si je ne voulais pas penser, il ne manquait plus qu'à m'abrutir, j'allumais le poste de télévision espérant que cela finirait pas me changer les idées. La première chose qui me marqua ce fut la différence entre les émissions de l'hexagone et celle que l'on trouvait dans le nouveau monde moderne. C'était différent, pas que la langue qui m'était pourtant bien familière, mais la visée, le type. J'optais finalement pour une chaine de musique, dont la majorité des singles était emportée de mon pays d'accueil et dans un sens ça finit pas égayer légèrement mon humeur maussade. Je réfléchissais à ces musiques que j'avais entendu alors que je côtoyais Seth. Un sourire apparu au moment même où le cliquetis habituel de ma condition de prisonnière résonna dans la chambre. Je me précipitais en direction de ma visiteuse attendue.- Alors qu'est-ce que tu nous as pris ? M'exclamais-je, à la fois affamé et avec un besoin de passé un moment léger avec ce que je considérais une amie d'infortune. Cependant, ce n'était pas Joséphine qui se tenait devant, ce n'était pas elle qui avait ouvert la porte, et dieu que j'aurai aimé que ce soit pourtant elle. Mais dieu, n'est pas toujours à exaucer nos souhaits, à la place se tenait un homme, cet homme.- Désolée, ce n'est pas Joséphine, murmura-t-il. Sur les lèvres de Kérian s'affichant un sourire heureux, il avait réussie sa surprise, malgré qu'elle ne me soit pas spécialement bonne.- Je ne t'attendais pas, balbutiais-je si bas. J'avais toujours cette crainte de parler en sa présence, de lui être dérangeante, de subir son courroux. Pourtant, il rigola. A ce son, instinctivement je reculais. Mais, s'il ne l'avait pas choisi, il était vain de lutter, j'aurais dû le savoir. Comblant l'espace qui je tentais de mettre entre nous deux, il avança.- J'y comptais bien. Je vois que tu es en forme. Il était assez proche, pouvant tendre la main et me toucher sans que rien ne vienne me soustraire à son emprise et je savais qu'il s'agissait là de son but. Il prit l'une de mes mèches de cheveux.- Toujours aussi jolie. Je ne répondis rien. Je n'avais rien à dire. La texture soyeuse glissa d'entre ses doigts. Il regarda les filaments cuivrés lui échapper petit à petit.- Je voulais que tu assistes à tout ça, reprit-il lorsque les cheveux avaient finalement rejoint mes épaules. Il voulait que j'assiste à quoi ? A ces massacres, à la bestialité, à cette inhumanité envers mon espace, son servage forcé ? Sans faire attention à qui je parlais, je vidais mon sac.- Alors ce ne vous suffit pas ? Ca ne te suffit pas ? Hein Kerian dis moi ? Ce n'est pas assez pour toi de massacrer des enfants ailés ? Tu veux aller pourrir le royaume de Dieu ?M'époumonais-je. J'avais dis d'une traite ce que je pensais. Je l'avais dit si rapidement, de peur d'être coupé. L'air revint emplir mes poumons, alimentant mon système et je comprenais qu'il n'était pas quelqu'un à qui l'on pouvait parler de cette manière. Je pinçais les lèvres, redoutant sa réaction face à mon insurrection. De Kérian, on pouvait s'attendre à tout. Pourtant je ne l'avais pas vu venir celle-là. Il se mit à rigoler. Il aurait dû être offusqué, énervé, mais au lieu de ça il s'amusa de ma réaction, puis toucha ma joue. Mon cœur eut un raté.- Tu es toujours la même, il sourit avant de rajouter, ce petit oiseau apeuré. Son sourire s'effaça, et dans un souffle il murmura « Mais Marie, ce n'est pas moi le loup. ». Je voulus lui faire répéter, je ne comprenais pas, que voulait-il dire ? Cependant, m'en empêchant, une voix féminine et enjouée se fit entendre dans son dos.- C'est moi, j'ai même des pop-corn et je t'ai prie une couette, scandait-elle fière avant de se taire soudainement quand enfin elle remarqua mon visiteur. Kérian se tourna pour faire connaissance avec la nouvelle arrivante.- Bon je crois que je suis de trop, dit-il en lui dédiant l'un de ses sourires les plus charmeurs. Mais avant de disparaître, il se retourna une dernière fois vers moi et me chuchota à l'oreille « S'il-te-plait, cette fois ne t'échappe pas. » Je restais coite pendant qu'il disparaissait comme il était venu. Kérian n'avait pas pour habitude de demander, il ne savait qu'ordonner, qu'est-ce qu'il se passait. Aurait-il changé ?- Ca va ? Je regardais Joséphine qui venait de me poser la question. Mon regard dévia vite vers la porte, regardant aux alentours. Kérian, avait déjà disparu. Il nous avait vraiment laissé comme ça ?- Ca va ? Répéta-t-elle. Je rapportais une partie de mon attention sur Joséphine. « ca va » Cela avait l'air si simple et malgré ça il m'était si difficile d'y répondre. Allais-je bien ? Ce n'était jamais le cas après une visite de Kérian. Celle-ci est encore plus particulière, j'avais peur, j'en tremblais et pourtant j'étais intriguée par l'homme qui avait tant changé. Sous le choc et ne le pensant absolument pas, j'hochais pourtant la tête. Oui. Bien sur elle savait que ce n'était pas le cas.- Je n'avais jamais vu quelqu'un aussi chamboulé après son passage, argumenta-t-elle. Voulait-elle me faire comprendre que ce n'était pas bien de mentir ? J'inspirais et crispa mes joues, essayant d'être convaincante avec ce faux sourire statique.- On les mange ces pop-corn ? Je n'avais pas répondu, avouant en silence que non ça n'allait pas, mais elle me laissa avec mes problèmes.- Ca me va, acquiesça-t-elle. Sans attendre, elle s'étala sur le canapé, la télécommande à la main. J'empoignait la couette et nous recouvrit, blottissant le saladier de maïs fraichement éclaté entre nos deux personnes. Nous nous en servîmes allègrement, engloutissant le tout devant des films aux scénarios douteux. Le lendemain, à mon réveil, la télévision était éteinte et Joséphine portée disparue. Mais avant de s'envoler et me laisser seule avec ma solitude, elle avait écrit un mot qui gisait sur la table basse où les victuailles restantes de la veille étaient dispersées. « J'ai remplie ton frigo, donc pas de soucis, je crois que tu as ce qu'il faut. Désolée d'être partie comme ça mais du travail m'attendait... Je reviens demain ! Biz » Bien qu'elle ne s'épancha pas sur ce fameux travail, je sus directement de quoi il s'agissant. Me laissant imaginer une chasse où les animaux seraient mes compagnons d'infortunes. Cette image était si répugnante, celle de mes sœurs aux trousses de mon homme. Je frémis, finalement il n'était pas si bon d'y penser. Et cloitrer dans cette pièce, sans pouvoir, il ne me restait plus qu'à prier pour que Joséphine tienne sa parole, qu'elle laisse de côté le groupe avec lequel j'avais traversé l'océan Atlantique et plus particulièrement ce jeune indien à la peau cuivrée et aux cheveux longs. C'est justement en pensant à lui que je m'empressait de fouiller dans mes poches. Enfin ! Je trouvais la petite boite en métal que j'avais acheté. Je l'allumais. Aucun message. Evidemment ! Ce gros béta n'avais même pas dû remarquer l'appareil que j'avais glissé dans l'une de ces poches à l'aéroport. Je pianotais un cours message : « C'est Mary, je vais bien et toi ? Je suis au seins de l'organisation ... S'il te plait fouille dans mon sac et prend le carnet. » J'allais appuyer sur envoyer lorsqu'il me prit de laisser mes sentiments s'exprimer. Je rajoutais à la fin du message un petit « je t'aime » et cette fois, j'envoyais. Je reçu l'accusé de cette réception et rangeais la machine pour aller en direction du frigo. Il n'était pas difficile de le trouver dans la mini kitchenette du salon. J'ouvris la porte et me rendis compte à quel point Joséphine connaissait l'appétit d'une sorcière. D'ailleurs, bon dieu ! Comment avait-elle fait pour mettre autant de choses dans un si petit espace sans qu'il n'explose ? Je refermais la boite après en avoir extirpé une préparation à chauffer que j'enfournais dans le micro onde. Trois minutes et c'était parti, le plateau se mit à tourner et je commençais à ranger le bazar de la veille. Quand la sonnerie retentit, j'abandonnais mon petit ménage pour m'emparer de mon déjeuner. Ma fourchette était prête à attaquer, mais quelque chose, dans la poche de ma veste clignota. Par curiosité, je regardais. Seth m'avait répondu.« Merci mon dieu ! Tu vas bien ! Ici c'est la pagaille, ils pensent que tu nous as abandonné. J'ai ouvert ton carnet mais je ne comprends pas, tu veux que je fasse quoi ? » En dessous du paragraphe, un petit « PS : je t'aime plus » trônait. Je souris comme une enfant comblée, puis, m'empressait de lui répondre.« Cherche une page cornée c'est une potion. Fais en beaucoup. Et Seth, ne dis rien aux autres, mais ajoute une goute de ton sang dedans. » Le repas se refroidit, mais je ne le mangeais pas, préférant attendre une réponse. Je n'en eu plus. Le repas était maintenant froid et ne me tentait plus du tout. J'étais frustrée et triste, je n'avais aucune envie de manger. Pourquoi ne m'avait-il pas répondu ? Pourquoi ? Moi je n'attendais que ça, lui parler, lui dire que je l'aimais encore et encore, qu'il me manquait et que je lui manquais aussi. Mais rien. Intérieurement, j'étais torturée, non seulement car il ne me répondait plus mais aussi parce que j'espérais avec tant de force qu'il garderait l'ingrédient secret aux yeux des autres. C'était cette simple goutte qui transformerait la décoction comme une arme anti-sorcière et c'était pour cette même raison qu'il fallait à tout prix que cela reste entre personnes de confiance. Il n'était pas compliqué d'imaginer à quel point tout cela pouvait se retourner contre nous. Comme on disait dans le jargon, c'était un coup de poker et au plus profond de moi j'essayais de ne finir dépouiller tandis que la honte m'étreignit. J'allais me battre contre mes sœurs... Je savais que je n'aurais plus de réponses et je rangeais l'appareil avec, cette fois-ci, bien plus de précaution. Le repas froid m'attendait sur la table, mais je n'en avais toujours pas envie, au lieu de ça je laissais mes yeux parcourir la pièce pratiquement vide, ne laissant que les murs. Ces fameux murs... J'en eu la nausée et je me félicitais de n'avoir rien mangé encore. Il fallait qu'ils payent. Cette idée émergea comme une évidence, avec clarté elle s'imposa à mon esprit. Oui, ces monstres devaient payer. Eux même qui vivaient, je le savais, dans les appartements limitrophes au mien. Une rage aigue s'immisça en moi, de plus en plus forte et vengeresse alors que je regardais les murs. De haine, une larme non voulue coula le long de ma joue et alors que la goutte salée atteignait sinueusement mes lèvres frémissantes, une idée s'imposa, un plan. Ils ne s'en sortiraient pas. Je me levais avec les idées claires, j'étais calme. J'allais les exterminer. Je ne ressentais aucune joie à cette idée, non, elle était juste libératrice. Sans chercher bien loin dans ma mémoire, je tapais un numéro sur le clavier et appuyait sur le téléphone vert. Un son se fit entendre, l'appel était en cours, cherchant à contacter l'appareil de mon interlocuteur. Celui-ci répondit immédiatement et ce malgré le numéro inconnu. Une personne qui savait les contacter sans être enregistrée avait de quoi intriguer.- Allo ? Fit une voix sur la défensive que je ne reconnus pas.- C'est Mary, passe le moi. La voix ne demanda rien de plus. J'avais beau ne pas me souvenir de son timbre, elle, elle sembla se remémorer mon nom. Après une attente de quelques minutes, quelqu'un repris le combiné.- Oui ? Cette voix..., je n'eu aucune hésitation à nommer le propriétaire.- Aide moi. A l'autre bout, je sus qu'il sourit sarcastiquement, près à m'envoyer paitre comme je l'avais fait peu de temps avant. Malgré ça, je ne réagis pas, j'étais calme.- Viens à Paris, quartier de la Défense. Prend le premier avion, j'aurais besoin de toi à la tour Ève dans la salle de réunion, étage quarante. Je ne sais pas encore la date, mais je te préviendrais pour que tu y sois à temps. Cette fois-ci les éclats de voix sortirent, un rire amer, un son qui pourtant ne m'ébranla pas. Je restais si sereine. Je ne lui laissais pas le temps de se moquer.- Aide moi à venger les tiens Aro. Son rire mourut, il marqua un temps de pause. Je savais qu'il serait d'accord. Aro n'avait jamais été un homme à guerre si ça ne lui rapportait pas quelque trophées, mais il était question de vengeance. Renata, le vampire tué, était comme une fille à ses yeux. Et puis, Caïus ne serait jamais contre une bataille où il est sûr d'être gagnant. Son silence était son consentement, je raccrochais sans attendre plus de lui. Il viendrait. Son clan aussi. Ils m'aideraient. Malgré mon calme et ma lucidité, je n'avais aucune garantie. Il y avait une chance, c'était tout ce qui comptait. Les engrenages se mettaient en route, bientôt, je le savais, nous devrions faire face à notre destin. Sorcière, vampires, Nahash, loup-garous et mêmes les autres. Il était impossible de faire marche arrière, trop d'éléments avaient été déclenchés pour arriver à ce stade. La seule question était maintenant de savoir si c'était la fin ou le début.
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Salem.
Paranormal« Connaissez-vous la triste histoire des sorcières de Salem ? Je vais faire bref, sans m'attarder sur des détails. Cela s'est passé en 1692 dans la petite ville de Salem Village, Massachusetts. Les habitants y étaient puritains et très croyants. Des...