Chapitre trente-troisième.

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Mes paupières s'ouvrent difficilement. Il fait sombre, les volets ont été tirés. J'écarte les yeux un peu plus, ce n'est pas chez moi, ce n'est pas ma chambre. Puis, je découvre Kerian. Il est à mon chevet. Mais qu'est-ce que je fais ici ? Pourquoi il est là ? Et puis, comme un violent flash back, tout me revient et mon attention se porte entièrement sur mes avants bras. Il n'y a plus rien. Aucune trace de scarification.-       Mais qu'est-ce qu'il t'a pris ?            Je regarde celui qui ressemble fort à mon sauveur. J'avais du mal à voir avec clarté ses traits, mais c'était les même mèches blondes qui m'avaient chatouillé le nez.-       Je voulais sortir, déclarais-je simplement, encore dans les vapes.-       T'es complètement folle en fait, articula mon hôte encore abasourdi par mon argument.            J'eu envie de grogner, mais je n'en avais pas la force. Au lieu de ça je me demandais ce qu'ils avaient donc tous à toujours me traiter de folle ? J'avais pourtant l'impression d'être assez saine d'esprit.               Mes yeux se reportèrent alors sur ma peau, blanche, nette. Peut-être pas après tout.-       Il fallait m'appeler, repris Kerian, de plus en plus hors de lui.            Au son de sa voix, je me rétractais, effrayée. Pourtant, je savais que s'il me grondait, se n'était pas par cruauté, mais tout bonnement parce qu'il avait eu peur de me perdre. Il devait m'en vouloir d'avoir essayé d'attenter à mes jours. C'était un acte égoïste en plus d'être complètement irréfléchi. Je n'avais pas imaginé une seule seconde à lui. A ce que ça lui ferrait de me voir ainsi, recouverte de sang, entre la vie et la mort. Je devinais son effroi, son sang se glacer en me voyant, en se demandant si j'étais encore en vie. Et si ça n'avait pas été le cas, il avait dû y songer, peut-être seulement un millième de seconde mais il était sûr qu'il s'était posé la question. Etais-je morte ? Il avait dû alors se dire que jamais il ne pourrait se pardonner ma perte.            En me mettant à sa place, la vision d'un Seth les veines ouvertes m'apparu. J'en eu un hoquet d'effroi. Comment aurais-je pu le supporter ?-       Il est quelle heure ? Dis-je subitement, essayant de chasser cette image terrible.-       17h50, répondit-il automatiquement, comme si cela ne sortait pas du contexte. Pourquoi ? -       J'ai faim ...            Mon ventre se mit alors  à grogner tandis que Kerian me regardait abasourdie. Puis, une fraction de seconde plus tard des éclats de rire brisèrent le silence. Kerian la larme à l'œil pouffait sans pouvoir se retenir. Parfois il s'interrompait pour glisser des « Oh la la Mary ». Et je ne comprenais pas, je ne savais pas d'où pouvais venir ce fou rire, il y avait-il eu, à un moment, une scène marante ? Ou était-ce la retombée de son stress qui lui donnait du baume au cœur ?-       Je sais, je t'invite au restaurant.            Finit-il par dire pendant que je le regardais éberlue. Il m'emmenait à l'extérieur ? Sans réfléchir, j'acceptais.-       Génial, je m'occupe de réserver une table, dit-il alors que son rire se calmait.-       Je vais prendre une douche.            Mais peut-être avais-je parlé trop vite. En essayant de me lever, je me rendis compte à quel point je manquais d'énergie. Mon corps, encore engourdi me paraissait aussi lourd que de la pierre. C'est seulement au prix d'un effort gargantuesque que je réussis à me tenir débout. Mais cela n'était pas une victoire. Tremblante, je ne vis pas venir le vicieux vertige. Je tanguais dangereusement, prête à m'effondrer, quand Kérian s'empressa de me soutenir.-       Tu es sûre que ça va ? Son regard était inquiet.            Je le repoussais. Je devais y arriver. Si j'étais trop faible, il ferait importer le restaurant ici. Je devais sortir. J'hochais la tête, déterminée à atteindre la salle de bain. Il me laissa faire, me suivant du coin de l'œil, soucieux, anticipant mes moindres faiblesses. Puis, en pénétrant dans la salle d'eau je m'empressais de fermer la porter, me dérobant à son regard. Contre cette dernière, je me laissais enfin aller et soufflais. Je l'avais fait. Mes jambes tremblaient sous l'effort, mais j'avais réussis. Même en tant que sorcière, même guérie par la magie, on ne se remet pas si vite de la mort.            En me déshabillant, je fis attention au moindre déséquilibre, laissant tomber mes affaires gorgées de sang. Combien avais-je perdu ? Je n'en avais aucune idée. Cependant voir l'eau de la douche se teinter de rouge commençait à me donner un petit aperçu. Je sentais cette odeur de ferraille écœurante remontées. J'en eu la nausée, m'appuyant contre la paroi en vert pour ne pas m'effondrer. Plus jamais.-       Mary ? Mary, j'ai des affaires pour toi, je peux entrer ?            Le non fusa. Instinctivement, je sortis de la douche pour me blottir avec ferveur contre la porte et l'empêcher d'entrer.-       Passe les mois juste, s'il-te-plait. Me repris-je.            Sans réfléchir, j'avais eu peur. Peur qu'il rentre, qu'il me voit nue. Après avoir mis une serviette imprégnée de son odeur, j'entrouvris faiblement la porte et attrapais prestement le paquet. Je ne sais pas s'il réussie à entendre le furtif merci que je lui avais glissé alors que la porte se refermait. Je crois qu'il avait souris de ma pudeur. Mais je ne m'y attardais pas, j'étais curieuse de savoir ce que contenait le sac de papier.            Je crois avoirs eu un hoquet de surprise en l'ouvrant. Ce qui était sûr, c'est que nous n'irions pas dans un restaurant lambda et aussi, qu'il avait réellement bon goût. La robe qu'il m'avait choisie, n'était ni cérémonieuse, ni anodine, elle était juste parfaite. Le buste près du corps dévoilait élégamment le décolleté grâce à une découpe carrée, puis ça partait en évasée après la taille. Le tissu singulier était fait de grandes bandes larges et monochromes d'un vert émeraude envoutant. Je l'enfilais, excitée je l'avoue, à l'idée d'avoir un tel vêtement sur mes épaules. Je finis ensuite de me préparer, me séchant et me maquillant grâce au contenu du sac.            Kerian, quant à lui, m'attendait, un verre de whisky entamé à la main. Etait-il anxieux pour notre diner en tête-à-tête ?            En tout cas, lorsque la porte de la salle de bain s'ouvrit, il fut immédiatement captivé. Son regard était posé sur moi et je pouvais y voir des étoiles. Face à de telles réactions, je m'empourprais. Et le voir s'obliger à poser son verre pour ne pas le lâcher accentua ma tension.-       On y va ? Proposais-je en tentant de fuir la situation.            Dans mon dos, il se racla la gorge et je m'arrêtais.-       Tu ne vas tout de même pas y aller pieds nus ?            L'air penaude, je pris conscience que j'avais effectivement les orteils à l'air. Et le rouge me monta aux joues. De quoi avais-je l'air ? Il me tendit alors une boite de grande marque. Je m'empressais de l'ouvrir. Des chaussures décolletées noires avec un talon vertigineux décoré de liserés argentés m'attendaient. Je les enfilais.-       Maintenant, tu es parfaite, dit mon hôte en me proposant son bras.            Je ne le refusais pas, à vrai dire j'avais réellement peur de tomber. A côté de lui, mon bras sur le sien, j'étais suffisamment proche pour sentir son odeur. La même que sur la serviette, une eau de Cologne musqué. Je pouvais aussi entendre les battements de son cœur et apparemment je n'étais pas la seule tendue.             Nous sortîmes de sa chambre et mon attention se dissipa. J'oubliais Kerian pour me concentrer sur les choses qui m'entouraient. Malgré mon épuisement caché sous une couche de maquillage j'étais excitée. J'allais enfin quitter l'immeuble. Les narines aux aguets, j'étais prête à sentir toute trace de magie. Il fallait que je détermine où serait installé le passage.            C'est quand l'ascenseur indiqua que nous traversions le 31ème étage qu'une forte odeur de souffre emprisonna mon odorat. S'en était limite supportable et je retenais ma respiration pour ne pas avoir à supporter les effluves. Ca ne pouvait être que là... Et comme pour me donner raison, l'odeur se dissipa rapidement dès que l'appareil changea de palier. Kérian, lui, ne sourcilla même pas. Sûrement habitué. Il continuait de me dévorer même une fois à l'intérieur de la grosse berline noire qui nous servirait de taxi ce soir. Pas une seconde je ne l'avais vu détourné le regard et son comportement me rendait mal à l'aise. C'est pourquoi se fut comme une libération lorsque notre chauffeur s'arrêta enfin.            Kerian me tint la porte et nous entrâmes dans le restaurant. Un décors japonais donnait un style exotique au lieu et je n'avais plus aucun doute quand aux plats qui nous seraient servis ce soir. A l'annonce de son nom, le personnel s'afféra autour de nous, nous débarrassant de nos manteaux, puis un serveur expérimenté nous emmena vers notre réservation. Un petit coin discret coupé du reste de la salle par de magnifiques panneaux asiatiques. Kérian se chargea de m'installer puis laissa au soin du serveur la charge de nos verre. Bientôt deux coupes travaillées furent remplies d'un breuvage or aux fines bulles. Je levais mon verre :-       Et bien, à notre dernière soirée.            Evidemment, ce n'était pas le toast le plus joyeux qu'on eu l'occasion d'entendre. Mon compagnon d'ailleurs me le fit remarquer :-       Tu aurais pu trouver plus gaie...-       Et tu pensais à quoi ?            Sans hésiter, il leva à nouveau son verre et plongea avec intensité son regard dans le mien.-       A notre soirée.            Un tintement cristallin vint accueillir la rencontre de nos deux verres et je baissais les yeux.-       A notre soirée, murmurais-je avant de boire l'élixir.            Puis rapidement, et sans avoir commandé, nos plats arrivèrent. Je me doutais qu'il y avait sous ce mystère l'œuvre de mon hôte et je ne me gênais pas pour le taquiner.-       Tu avais peur que je choisisse ?-       C'est-ça, sourit-il.-       Pourquoi tu as décidé de prendre la tête de l'expédition ?            La question était partie d'elle même, traversant ma bouche à la vitesse d'une fusée sans que je puisse la retenir. L'ambiance retomba. Pris au dépourvu, il reposa ses baguettes, l'appétit coupé.-       Je n'ai pas décidé. Il regarda son assiette et murmura, je n'ai jamais eu le choix...            La révélation eut l'effet d'une bombe dans mon ventre, explosant, me barbouillant. Mon cerveau s'était figé. Je ne savais quoi dire, et surtout je ne comprenais pas. C'était Kérian après tout, le chef de Nahash, comment cela se pouvait ?-       Lorsque nous nous sommes rencontrés, rappelle-toi, il y a eu cette étincelle. Je me souviens parfaitement de ton regard farouche qui me dévisage. A ce moment, je ne savais rien de toi, mais j'avais une certitude, il n'y aurait que toi. Il leva son verre et examina son contenu avec attention. Puis, j'ai su que toi aussi tu m'aimais, j'étais l'homme le plus heureux au monde. Il sourit tristement puis prit un air grave. Mais ton père connaissait nos sentiments. Il m'a alors proposé ta main, mais à une seule et unique condition : servir Nahash. J'étais jeune et surtout je ne savais pas ce que ça impliquait. J'ai accepté. J'étais fou. L'amour rend tellement stupide.            Il reposa son verre et je voulus lui demander de quoi il parlait. Père avait donné ma main à une condition ? Je n'avais jamais été au courant de cette clause. A vrai dire, je n'avais jamais entendu sa version. Alors, curieuse, je l'écoutais.-       Puis, il y a eu cette maudite épreuve. Je devais montrer que j'étais apte à tout faire pour Nahash. Je le faisais pour toi, mais je ne pensais pas que se serrais toi. Il s'arrêta un instant, fermant les yeux, se concentrant, revivant la scène. Je ne sais pas comment j'ai pu te faire ça. Je crois que je me suis persuadé, blindé, qu'avec le temps et mon amour te finirait peut-être par oublier.            Il rouvrit les yeux et but une grande gorgé de champagne, finissant son verre. Sans attendre, il appela notre serveur afin qu'il lui apporte une nouvelle bouteille. Le jeune homme s'exécuta, ouvrit la bouteille puis commença à nous servir.-       Ca ira comme ça.            Il hocha la tête et parti sans demander son reste en laissant la bouteille de brut sur la table.-       Cette épreuve, reprit Kérian tout en continuant de fuir mon regard, c'était pour te créer mais aussi pour me faire. Nahash, les sorcières, ils pensaient qu'une telle épreuve ne s'appliquait qu'aux femmes. Puis il y a eu un témoignage, c'était la seule preuve qu'il leur manquait. Dans cette histoire, tu n'étais pas le but. Ils avaient besoin de moi, un homme issu de l'ange, tellement rare à trouver. Finalement tu n'étais rien pour eux Mary, tu n'étais ni l'aboutissement, ni la finalité juste un moyen, un outil à usage unique. Et moi, je les ai laissé faire...            Je sentais la voix de Kérian vibrer de colère et de regret. Ses poings se serrèrent tandis qu'il revivait ces évènements. Alors, je n'étais pas seule. Je ne l'avais jamais été. Je posais doucement ma main sur la sienne. L'apaisant. Réprimant mes propres sentiments, je me mettais à sa place.-       Mais pourquoi tu ne t'es pas échappé ?            Il sourit, mais son expression était amère.-       J'ai essayé. Quand tu as fuis en Amérique, j'ai voulu te suivre. Une fois que je t'avais localisée, j'étais prêt à te rejoindre, t'expliquer, te retrouver. Mais je n'en ai pas eu le temps. C'est ce jour là que j'ai compris la véritable puissance de Nahash, c'est un poulpe, un kraken, il est immense et partout. Invisible mais tellement efficace. J'avais pris un bateau pour le nouveau monde, après des mois en mer et une semaine en cheval, j'étais proche, si proche. Puis tu as été emprisonné. Comment crois-tu que tu t'en es sortie ?-       Mary Easty ...-       Ce n'est pas ce qui ta sauvé, révéla-t-il.            Je le regardais, interloqué. La tuer ne m'aurais pas sauvé. Alors la dénoncer ne m'avait pas aidé. Elle était morte pour rien. Un bref instant, l'envie de la frapper me pris, mais je ne fis rien, rattrapée par l'empathie. Il n'était qu'une victime, comme moi, comme Mary Easty.-       Salem, ce n'était pas de la magie, c'était juste une grande mise en scène. Les querelles pour acquérir les parts de son voisin gangrenaient la ville. Certes, ces crétines ont d'abord simulé, mais quant leurs parents ont compris, et d'ailleurs ils l'ont vite su, ils se sont servis d'elles. Tout d'abord pour se débarrasser des mendiants, puis des vielles riches sans héritiers et puis toutes les personnes ayants des richesses. Mary avait un bel héritage et son seul descendant était dans son ventre. Elle était condamnée, tu n'y étais pour rien.-       Mais toi-si, murmurais-je une pointe de ressentiment dans la voix. Atterrée, comment pouvait-on allée si loin pour quelques hectares ? Tuer pour s'enrichir. Egoïsme, mot qui définis tellement la nature humaine.            Je lui en voulais de ne m'avoir rien dit, d'avoir agis seul. Je m'en voulais d'avoir cédé à la facilité ce jour là. Même si ce n'était pas de ma faute, je ne pouvais m'en convaincre. Et pire que tout, j'en voulais à ces fumiers, ces humains. Des monstres... Ils n'étaient que des monstres.-       Je ne pouvais pas la sauver, mais toi si, répéta-t-il résigné-       Me sauver de quoi ? La pendaison ? Tu le sais et moi aussi maintenant, ça ne m'aurait pas tué.            J'aurais aimé lui hurler tout ça, mais nous étions en public. Alors je crachais mon animosité dans un chuchotement. Il soupira, je ne comprenais pas.-       Et que crois-tu qu'il se serrait passé après t'avoir mis la corde au cou ? après avoir actionné le mécanisme ? Les pieds dans le vide tu aurais continué à respirer... Comment penses-tu qu'ils auraient réagi en voyant une vraie sorcière ? Expliqua-t-il.            Je voyais à quel point il se retenait, à quel point il m'épargnait et je me calmais. Il avait entièrement raison. Même si je n'étais pas morte étranglée, je l'aurais été d'une autre façon, et plus douloureuse à n'en pas douter.-       J'ai demandé à Nahash de t'épargner, de ne pas t'utiliser comme cobaye en échange je devais retourner là-bas et continuer ce qu'ils avaient commencé.            Je regardais l'homme en face de moi. Ce beau blond, un poil aristocratique au regard de glace. Il est difficile de se dire que son bourreau est aussi la victime. Non pas de séquelles causé par des événements postérieurs qui auraient un sens à ses actes. Non, une victime qui te ressemble en tout point.            Alors Kérian était si important que ça. C'était lui la clé ? Puis, je ne pus m'empêcher de m'en vouloir. D'un coup, je me dis que si je ne l'avais pas aimé, alors tout ça ne se serait jamais passé. Pas de pacte marital, pas de Salem, pas d'échange, pas de cobaye. J'aurais pu éviter toutes ces morts si j'avais su. J'étais définitivement responsable, mais comme l'avais dit Kérian, nous ne pouvions pas revenir sur les évènements passés.            Je fini ma coupe de champagne pour taire ma tristesse tandis que Kérian était songeur. Il n'avait pas terminé.-       Je pensais vraiment qu'au bout de 300 ans tu m'aurais pardonné. Quand je suis revenu te voir, les données avaient étés récoltés et je me suis dis qu'il ne me restait plus beaucoup de temps pour t'aimer. Mais c'était trop tard. Je t'avais laissé seule trop longtemps. Tu avais quelqu'un d'autre. Quand tu t'es enfuie avec lui, j'ai crus que j'allais mourir. Ce jour là c'est toi qui m'a brisé Mary. J'étais en colère, furieux que tu ne sois plus là. Jamais je n'avais connu une telle colère. J'ai enclenché le processus. Dans ma tête je n'avais plus rien à perdre puisque tu n'étais plus là.
            Ce fut la révélation de trop. C'était définitivement ma faute.-       Alors, c'est moi. Un sanglot compressait ma gorge. C'est à cause de moi si tout se passe. Mes yeux brillaient.            Kerian, se leva et pris mon visage entre ses mains.-       Non, s'empressa de rectifier le blond, ce n'est pas à cause de toi, ce n'est pas à cause de moi. Nous sommes justes les marionnettes de mauvaises personnes. Si ça n'avait pas été toi, ça aurait été quelqu'un d'autre. J'aurais pu être remplacé. Ca aurait pris plus de temps peut-être, mais rien n'aurait changé. Ils auraient mené à bien leur plan.            C'était étrange qu'il soit là à me réconforter. Je crois que jamais jusqu'à maintenant il n'y avait eu ce genre de confidence. Notre amour avait été tué dans l'œuf. Pourtant, je commençais à entrevoir le bonheur que ça aurait pu être. Car cet homme malgré ses actes passés était bon et tendre. Je souris. Les sanglots s'étaient calmés. Merci Kérian.            Il se rassit et se fut à mon tour de me lever.-       J'ai crois que j'ai besoin d'aller me rafraichir. Dis-je, encore un peu hoquetante.-       Ne t'enfuis pas, me glissa-t-il en me gratifiant d'un sourire-       De toute façon tu me retrouverais, souris-je tandis que je me faufilais vers les toilettes.            A vrai dire malgré les deux bouteilles de Pol Roger, je tenais encore debout mais le plus compliqué fut de me déplacer perchée sur ces hauts talons. Malgré tout, j'atteins les sanitaires. Le brouillard s'était dissipé et j'avais les idées claires maintenant, je savais ce que je devais faire. Je fermais la porte pour ne pas être dérangée et plaquais mes paumes contre le large miroir. Sans attendre je me concentrais. Heureusement que les sorcières tiennent l'alcool pensais-je alors que mon reflet se floutait pour laisser apparaître le visage des Cullens. La connexion était établie. Je leur envoyais alors un message ou plutôt une vision montrant avec détails ce qu'il devrait faire demain. Puis, sans perdre de temps, je passais aux Quilleutes et enfin au Volturis. Chaque groupe avait une mission prédéfinie qui les distinguait des autres et c'était d'ailleurs sur ça que reposait la réussite de mon plan. Maintenant, il ne me restait plus qu'à prier pour qu'il accepte de s'y soumettre. Je me déconnectais rapidement de leur esprit et passais un peu d'eau sur mon visage, lui redonnant quelques couleurs. Décidément, pleurer ne m'allait pas du tout.            A notre arrivé, je ne pensais pas passer une soirée normale. J'étais gênée. Je n'imaginais pas profiter de ce moment et pourtant c'était le cas. Peut-être était-ce dû aux révélations ? Lorsqu'il n'y a plus de secrets qui pèsent sur une relation alors la confiance peut s'installer. Tout renaissait maintenant. La peur était mise en sourdine, un peu au fond. Certes, elle n'avait pas disparu, la colère non plus et les souvenirs seraient à jamais présents. Pour autant, et aussi étrange que cela puissent paraître, j'avais l'impression que l'on pouvait recommencer.            La fin de la soirée fut fantastique, légère, amusante et c'est sur cette atmosphère badine que Kerian proposa une promenade. Paris est réellement magnifique la nuit. En tout cas, le coin où nous étions était magique. Le quartier nous berçait de ses lumières. C'était extrêmement romantique peut-être trop.-       Est-ce que tu m'aimes encore ?            Son regard était intense. Surprise, je ne sus quoi répondre. La question me prenait totalement au dépourvue. Le silence s'installa. Que devais-je dire ? J'étais moi-même torturée à ce sujet et encore plus depuis cette nuit où il avait fait irruption dans ma chambre.            En l'absence de réponse mais surtout sans négative, Kérian s'empara de mes lèvres ...et je le laissais faire. Fermant les yeux, profitant. En un instant, la brise printanière de la nuit fut remplacée par une climatisation artificielle. Nous étions dans sa chambre. Et alors que le baisé continuait, l'image de Seth apparu. Ce n'était pas ses lèvres que j'embrassais. C'était celles de Kérian. Je le repoussais alors vivement. Confuse et honteuse. Comment avais-je pu me laisser aller ? L'embrasser ou le laisser m'embrasser c'était la même chose. Je n'ai pas le droit de jouer avec eux.-       Oui, je t'aime, admis-je. Car il n'était plus l'heure de mentir et ce baiser le prouvait.-       Mais tu l'aimes plus, poursuivi-t-il tristement.            J'hochais la tête, je me sentais si mal à cet instant que j'aurais eu envie de me terrer sous terre. Échapper à son regard attristé. J'aimais Kérian c'est vrai, mais mes sentiments pour Seth étaient bien plus forts. En m'en rendant compte, une larme coula. « Je suis désolée » murmurais-je. Il m'avait aimé pendant plus de trois siècles, il m'avait protégé, il s'était sacrifié et je ne pouvais pas répondre à ses attentes. Je me sentais tellement mal pour lui. Etait-je réellement ce monstre ?Pourtant, malgré tout le mal que j'avais pu lui faire, il me prit dans ses bras.-       Ne t'en fais pas Mary, je comprends, me chuchota-t-il au creux de l'oreille pour rassurer.            Et ça ne me rassura pas, je me mis à sangloter. Il continua à me serrer fort contre son torse, puis quand les forces vinrent à manquer il m'emmena dans la chambre. Me proposant une chemise de nuit, il m'embrassa sur le front.-       Dors ma belle.

Salem.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant