Chapitre trentième.

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Dans ma tête, il y avait ce plan, ce plan qui était de plus en plus complet, j'arrivais sans problème à trouver une solution à n'importe quelle incertitude et pourtant, malgré ça, je savais qu'il dépendait si fortement, voir trop, des aléas

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Dans ma tête, il y avait ce plan, ce plan qui était de plus en plus complet, j'arrivais sans problème à trouver une solution à n'importe quelle incertitude et pourtant, malgré ça, je savais qu'il dépendait si fortement, voir trop, des aléas. Je savais, bien sur que je le savais, que si tout n'allait pas dans le sens que j'avais imaginé, détaillé, de la manière que j'avais prédite et programmée alors tout risquait de tomber à l'eau. Et si tout capotait, alors notre futur partirait lui aussi en fumé. C'était une horrible partie de domino.

            Je me souviens parfaitement ne jamais avoir voulu me mêler à tout ça. Je me rappelle cette envie frénétique de fuir ce bordel, partir loin de ce monde auquel pourtant j'appartenais. Comme si c'était possible. Mais ça ne l'était, mon sentiment, bien que je justifié - après tout, qui aurait aimer revenir là où tout avait commencé ? - ne pouvait pourtant m'aider à oublier qui j'étais. J'étais une descendante d'un ange, j'étais faite pour la Terre, non pas pour protéger l'homme, mais en revanche j'étais obligée d'éviter son extinction, éviter la mort des êtres terriens. J'avais fuis cette condition, mais après tout, chasser le naturel et il reviendra au galop !            Et puis finalement, je me rappelle, me remémore le discours que j'ai tenu aux Quilleutes et au Cullen. A ce moment, je savais que je n'avais plus le choix, il fallait que je fasse mon rôle. Alors dans un sens je leur avais menti. J'avais besoin de leur aide. Ou tout du moins, cela me réconfortait d'avoir ces personnes près de moi. Malgré l'irritation qu'ils affichaient à mon contact, je m'en contentais. Je leur avais dis que le plan de Nahash était de trouver l'Eden et que pour ça l'organisation allait continuer à massacrer leurs semblables. Ils m'avaient crus, ils m'avaient suivis, sans savoir qu'il était déjà trop tard pour eux. Mon plan n'était à ce moment là pas de sauver les quelques vampires encore qui seraient tué, mais tout simplement d'empêcher la réalisation du plan de Nahash. D'empêcher notre mort à tous.            Ce qu'on oubliait souvent, c'est que dès lors que l'homme fut chassé de l'Eden, il n'était plus question qu'il y retourne un jour. Mais Dieu ne pouvait pas laisser ce monde se détruire, alors il l'avait donné à sa deuxième ou plutôt première création, les Anges. Depuis ce jour, la Terre était aux hommes ce que l'Eden était aux Anges. Ils s'agissaient de deux lieux parallèles, bien que l'un soit tellement plus agréable.            Nahash avait oublié ce détail je crois, ou alors il avait choisi de l'ignorer. Quand ils avaient décidés que l'Eden serait à eux, qu'ils seraient immortels et tout puissants, ils avaient omis, que Dieu n'avait pas seulement créé l'homme et accessoirement sa compagne la femme, Il avait créé les Anges, ces êtres qu'on se représentaient souvent ailés, lumineux, heureux et bons.           Bons ? Quel fantasme ! Les Anges n'étaient pas spécialement bons et surtout pas envers l'homme qu'il considérait comme une créature dangereuse et destructrice, une créature qui étonnamment avait eut beaucoup plus d'amour de Sa part. Les Anges étaient juste nés pour obéir et contrairement à l'homme n'avait jamais pensé à oublier ses ordres.           Certes, il y avait déjà eu une guerre à l'époque de la création de l'homme entre les Anges. Pour ou contre ? Sauver l'homme, le défendre ? Et comme nous étions encore là, on peut dire que nous avions remporté le maximum de suffrage. Mais imaginez un moment qu'une petite organisation vienne vous volez votre terre. Combien d'Anges seront alors prêts à nous défendre ? Aucun. Et c'était ça qui me terrorisait. En souhaitant conquérir l'Eden, Nahash allait s'opposer à une puissance qui l'a surpassait complètement. C'était cela que je voulais éviter, empêcher la guerre. Il ne fallait pas que Nahash atteigne l'Eden, il ne fallait pas qu'ils commencent à massacrer ce lieu et attirer le courroux des êtres séraphins qui n'auront alors aucune pitié à massacrer, nous massacrer.           En essayant de visualiser tout ça, en pensant à tous ces problèmes et en imaginant la mort à notre porte, je n'avais pas vu le temps filer. Je me rappelais juste avoir passé ma journée à grignoter comme pour calmer la sourde angoisse qui s'éveillait à la simple penser de ces évènements. Je n'avais pas faim, et de tout façon sans pouvoir, j'étais loin d'être en carence. Non, il s'agissait juste d'une échappatoire, un moyen de calmer mon stress.           Je n'arrêtais pas de m'inquiéter quand à notre futur et pourtant je ne profitais même pas de mes derniers instants. C'est ce que je me disais, quand, regardant vers le balcon, je vis le ciel qui commençait à s'assombrir, l'astre céleste en avait fini d'illuminer cette partie du globe et partait vers d'autres horizons, tout en lâchant dans un dernier souffle ses reflets chatoyants qui éclairèrent encore un peu l'appartement.           Etrangement, j'avais l'impression de sentir la nourriture, d'être crasseuse, puis je me souvins que je n'avais pas pris de douche, que j'étais restée en tenue d'intérieur toute la journée, sans penser à me laver le visage, me brosser les dents et encore moins mettre du déodorant. Le pire, c'est que je mettais satisfaite de cette apparence, de cette saleté, ne voyant pas la nécessité de m'apprêter pour des visiteurs qui ne viendraient pas. Je n'attendais personne dans ma prison dorée.           Malgré ça, j'eu le dessin de me laver. En fait, je n'avais tellement rien fait de la journée, à part me prendre la tête, que me doucher allait me donner l'impression d'avoir accomplie au moins une chose.           Je décidais donc d'aller me laver, puis, avant d'arriver à la pièce, il me prit l'envie d'aérer l'appartement. J'avais toujours cette impression que la pièce sentait la nourriture et le chacal, comme moi d'ailleurs, un peu comme si j'avais invité une dizaine de personnes à manger une paella. J'ouvris la fenêtre du balcon. Un air moite et chaud m'accueillit, allégé par la brise. Tout ça sentait l'été. Je filais ensuite dans la salle de bain.           Bien que j'en eu largement le loisir, je ne m'attarda pas sous l'eau. Je crois que je ne me sentais pas à mon aise ici, j'avais l'impression d'être une étrangère en ses lieux. Lorsque je sortis de la douche, le miroir n'était pas embué, me reflétant mon image, une fille blafarde. Je détournais le regard, j'étais horrible. J'attrapais une serviette et me séchais vigoureusement, je ne pris pas le temps de m'occuper de mes cheveux légèrement mouillés, ils seront secs dans peu de temps. Je laissais donc les pointes humides me coller la peau.         Lorsque je sortis finalement de la salle de bain, un frisson me parcouru l'échine, m'apprenant que la température avait bien chuté depuis mon séjour à la douche. Sans perdre un instant, je me dirigeais vers le balcon et me dépêchais de fermer les fenêtres quand un reflet dans la vitre me fit tressaillir. Une forme se tenait derrière moi. Je me retournais durechef. J'hésitais entre lui hurler de partir et rester muette en m'éloignant le plus possible de son être. C'était toujours le même dilemme. Cependant, il y avait quelque chose de différent aujourd'hui, à cet instant. Et c'est ce qui me fit me rapprocher. D'abord prudemment, je m'avança vers lui de quelque pas puis m'arrêta. Il était à l'ombre, soutenu par la porte qui l'empêchait de tomber. Son visage m'était inaccessible, pas assez de lumière pour distinguer ses traits. Il y avait décidemment quelque chose qui clochait. Même si je ne pouvais voir son faciès, la position de son corps m'indiquait qu'il fallait que je m'inquiète. Kérian n'étais jamais adossé, ou alors seulement de façon nonchalante. Son, allure sinon était fière, droite, sûre, majestueuse.-       S'il-te-plait, approche, dit-il faiblement en tendant sa main vers moi.           Sa main tremblait. J'avais peur. Etrangement ce n'était pas pour moi, mais pour lui. Qu'est-ce qu'il s'était passé ? Qu'est-ce qui avait pu le rendre comme ça ?            Je finis de m'approcher et aperçu son visage. Il était éteint. Face à moi j'avais à faire à un parfait inconnu. Tout ce qu'il le définissait, sa prestance, son fierté à la limite de l'arrogance, sa figure droite, son charisme. Tout ça était envolé, disparue. Il ne restait devant mes yeux surpris qu'un homme faible. Il n'était pas triste, en tout cas ce n'est pas ce qui m'avait paru prédominant, non, il était juste éteint. Son visage était blème et il semblait vidé de ses forces. Pourtant, quand il me vit arriver, il se redressa, même si c'était avec difficulté, et bien qu'il fut droit pour le commun des mortels, pour moi il resta vouté.           Comme à notre dernière rencontre, il approcha sa main de moi et prit délicatement une mèche de mes cheveux. J'eu l'instinct tenace de reculer, un voile de tristesse traversa son regards, alors, sans savoir vraiment pourquoi, je ré avançais.-       Merci, ce mot n'était qu'un faible chuchotement, si léger et transparent que je crus un moment l'avoir imaginé.            C'était comme si ce simple geste, ma considération, valait à ses yeux. Mais qu'est-ce qu'il se passait ? Sa mine, sa politesse sincère, sa gratitude... Je ne tenais plus et me lançais, quoi qu'un peu timidement.-       Kerian ...           A l'entente de son nom il releva la tête pour me faire face, enfin.-       Qu'est-ce qu'il y a ?           Il baissa à nouveau la tête, puis avança vers le canapé. Il était encore en mode lit, je n'avais pas eu la force de le ranger et pourtant c'est ce qu'il fit, il replia ce dernier.-       Juste ce soir Mary, je t'en pris tiens moi compagnie.           Sa voix était implorante, j'étais estomaquée. A vrai dire j'avais toujours crains que cela puisse arriver, un jour où je serais forcée de passer la nuit à ses côtés, sans aucune échappatoire. Pourtant, je n'avais pas peur, je ne comprenais pas cette subite envie qui n'avait rien de charnel. Il s'assit sur le canapé, je le rejoins et puis je le laissais pour me diriger vers la cuisine. Son état m'inquiétait. Je revins avec un verre d'eau que je lui tendis sans trop de cérémonie.-       Tiens.           Il prit le verre, quelque peut étonné de l'initiative.-       Merci, assied toi.           J'obéis sans faire d'histoire, je pris place à ses coté tout en me gardant de le coller. Je le vis prendre une gorgée, puis une seconde pour enfin finir goulument le verre. Il le posa ensuite au pied du canapé puis s'allongea sur le fauteuil replié. Sa tête vint se poser hésitante sur mes genoux.-       Excuse moi, mais j'avais vraiment besoin de te sentir. Commença-t-il.           Il n'y avait rien d'ambiguë dans sa phrase.           Il était juste là, le terrifiant Kerian, celui que je redoutais depuis des décennies, des siècles même, il était sur mes cuisses et pourtant je ne tremblais pas. Je le regardais, il avait les yeux fermés et respirait lourdement. Ses cheveux eux brillaient, éclairés par les lumières de Paris, son visage quand à lui était torturé, et même s'il était pâle, il restait néanmoins sans défaut. Un visage d'homme avec une mâchoire virile, des pommettes fines et des yeux en amande. Il avait un visage délicat, ni efféminé, ni bourru. Il était beau.           Sans savoir pourquoi, ou comment cela me prit, je me mis à caresser ses cheveux couleur miel. Comme avant, il y a tant d'années. Surpris par une telle initiative, il ouvrit les yeux. Son regard d'acier me perça. Je n'aurais pas dû me permettre une telle chose. Je m'en voulus, paniquant quand aux conséquences possibles. Mais il se radoucit aussitôt.-       Non, non, continue, me supplia-t-il.           Il prit ma main, l'amenant vers son crâne. Hésitante j'y re glissais mes doigts. Au fur et à mesure des minutes, je prenais de l'assurance, sa respiration se calma.-       Merci de ne pas avoir fui. J'avais besoin de toi ce soir. Tu sais, je ne suis plus sur de rien. Nahash, les sorcières, tout ça. J'ai peur, je crois.           Je tiquais, il se releva alors pour me faire face. Me prenant les mains, d'un geste vif qui dénotait avec sa fragilité, il les pressa dans les siennes.-       Mary, excuse moi pour le mal que je t'ai fais, toutes ces années, la Bretagne, l'Angleterre, Salem, ici... Si j'avais su que tout se déroulerait de cette manière, je ne l'aurais jamais fait. Oh oui, je te jure que j'aurais refusé. Je t'aurais épousé, je t'aurais chéri, nous aurions eu des enfants, loin de Nahash, loin de toutes ces créatures. Nous n'aurions jamais connu toutes ces douleurs, tous ces malheurs. Juste toi et moi.           Au fur et à mesure que ses mots s'enchainaient, que ses phrases traversaient le portail de ses lèvres, il prenait de l'assurance, augmentant encore plus son débit. Je l'écoutais et le dévisageais, il reprenait vie à travers son discours enflammé. -       Des fois, je t'imagine dans une maison à faire à manger tandis que je te ramène le repas. Une petite chaumière près de la mer. Tu aurais adoré, tu aimes tellement la mer.           Il rigola un instant en visualisant la scène puis continua de décrire notre possible futur toujours avec une passion à la limite de l'acharnement. Il fourmillait de détail, il me transportait dans son euphorie et je commençais moi-même à imaginer cette vie qui aurait pu être réalité. Et ça me fit mal. Cela semblait si merveilleux que j'en pleurais. Des larmes atterrirent sur le canapé. Pourquoi ça nous était arrivé ? Pourquoi cette vie paisible à laquelle nous rêvions tous les deux, chacun de notre côté, nous avait été si violemment arrachée ?-       S'il avait été possible de remonter le temps, continua-t-il, j'aurais sauté. Oh que oui, mon âme aurait pu finir aux enfers, mais je nous aurais sauvés ! Souffla-t-il d'un coup avec une pointe de désespoir, la joie s'était envolée.           Il se tut un instant pour replonger ses yeux dans les miens. Avec délicatesse, il essuya les larmes.-       Je n'attends plus que tu me pardonnes, maintenant, je l'ai compris, c'est impossible. Mais je suis désolée. Tellement désolée Mary. Je t'ai brisée, toi la seule femme que j'ai aimé, toi la seule à m'avoir aimé alors que je n'étais rien.           Sa voix était pleine d'émotion, à telle point qu'il lui fallu une pause. Je sentais la sincérité de ses propos, mais aussi ce regret qui l'étranglait et l'amertume. Il s'obligea à respirer plus profondément pour se calmer.           Je regardais cet homme, les yeux brillant, lui aussi d'ailleurs. Je l'avais tellement aimé. Il m'embrassa sur la joue et replongea sa tête sur mes genoux.           Finalement sa fatigue eut raison de lui, il s'endormit, mais son sommeil resta agité, il tournait la tête fiévreusement et je pu entendre quelques « désolé » murmuré par son subconscient.           Lorsque je me réveillais le lendemain, tard dans l'après midi, j'étais seule, le canapé avait été déplié ressemblant de nouveau à un lit, j'étais recouverte d'une chaude couverture et surtout il n'y avait plus personnes à mes côtés. Kerian était parti, sans bruit, disparu dans les lueurs du matin. Me laissant le souvenir de la veille qui me semblait tel un rêve, si irréel.           Je baillais longuement et finis par me lever. J'avais la bouche pâteuse. Sur l'évier de la cuisine trônait le verre de la veille, lavé et retourné. Il était déjà sec, signe que mon hôte était parti il y a un moment maintenant. Je le pris et le remplissais d'eau. Le verre entre les mains, les idées moins brumeuses, je me remémorais la scène.           L'épisode de cette nuit était chamboulant et encore perturbée, je ne savais pas vraiment qu'en penser. Son comportement était si étranger à son attitude habituelle que je ne pouvais laisser faire sans trouver une raison à de tels agissements. Bientôt, une petite idée s'élevait au milieu de cette cacophonie aussi déplaisante soit-elle. J'avais l'impression, en y repensant, que Kerian était venu chercher l'absolution. Il s'était confessé à moi. Et cette optique était effrayante car elle sous entendait que Kerian savait sa dernière heure arrivée. Non seulement ça me fit paniquer, signifiant que les événement s'étais accélérés mais j'eu une autre pique, qu'est-ce que je deviendrais sans lui ? J'avais toujours eu une part de Kerian en moi, non pas comme si l'on pouvait communiqué, juste une partie de moi qui lui était connectée de manière trop mystérieuse que même moi, je n'arrivais pas à l'expliquer. En tout cas, tout ça se rapprochait bien trop vite et à cette simple idée, je frissonnais. Il fallait que je les prévienne.           Je revins jusqu'au canapé, contournant la table basse où mon regard fut attiré par une tache blanche. Je m'y attardais, découvrant l'écriture de Kerian. Je déposait mon gobelet à côté et pris la lettre entre mes mains.« Mary,Oublie ce que j'ai dit hier soir, je ne le pensais pas.K »           Même sans sa signature j'aurais reconnu le destinateur. Il avait toujours eu une écriture délicate et tellement personnelle à la fois.           A la fin de la lettre, j'aurais sûrement dû être en colère, offusquée d'avoir été ainsi menée en bateau par son jeu de la veille, mais il n'en était rien. Cette missive ne reflétait pas ses pensées, elle était juste dictée par sa raison, si fière, qui ne pouvait admettre sa faiblesse. Non, ce qu'il ressentait au fond de son cœur, il me l'avait dit hier soir, et j'en étais intimement sûre, il ne s'agissait pas d'un mensonge. Cette tristesse, ce regret face aux évènements passés, cette lassitude, et puis la peur en pensant à ce qui allait arriver. Et puis comment aurait-il pu mimer une telle fougue lorsqu'il avait parlé de notre histoire, celle que l'on aurait pu vivre si tous ces évènements ne s'étaient pas ligués contre nous ? Non, hier soir j'avais retrouvé l'homme que j'avais jadis aimé et je ne le laisserais pas tout gâché avec ce fade courrier, masquant ses véritables sentiments. Non, je ne te laisserais pas faire Kérian.           Je déchirais le papier que je balançais entre les grilles du balcon. Les confettis blancs s'envolèrent dans la brise, traçant un chemin complexe, dirigé au gré du vent. Cela me captiva un moment. En revoir aux apparences, je te sauverais Kérian. Tu n'avais pas à tes sacrifier pour eux.           Pourquoi avais-je tout d'un coup de la pitié pour lui ? Comment avais-je pu finalement lui pardonner ce qu'il m'avait fait ? Pourtant il ne s'agissait pas d'un pardon aveuglé par les évènements de tantôt, mais plutôt parce que mon cœur se cicatrisait enfin. Il n'était plus celui qui comptait à mes yeux. Un autre avait pensé ses blessures, il n'était plus le seul être légitime pouvant me torturer, Seth s'était emparé de ce pouvoir.           Finalement, j'aurais dû redouter cet état, être effrayée devant pareilles faiblesses. J'avais délibérément enlevé l'armure qui protégeait mon cœur. Aimer, et être aimée, valait bien ce geste.           C'est cet instant que choisi Joséphine pour faire son apparition.-       Bien le bonjour ! Me salua-t-elle énergiquement tout en me rejoignant sur le balcon.-       Salut, alors cette mission ?-       Epuisante...-       Surtout mentalement j'imagine...           Elle sut directement à quoi je faisais référence. Il n'était pas dans notre nature de tuer pour le plaisir, cela laissait irrémédiablement des séquelles, des images, des cauchemars. Elle eut un sourire triste, les yeux dans le vague.-       Il y en a déjà eu tant et malgré ça ils en veulent plus, encore et toujours. J'aurais aimé qu'ils s'en chargent eux-mêmes, eux ils n'auraient aucun mal. Ce sont des tueurs.           Elle était dégoutée de tout ce sang qui gisait sur ces mains mais aussi haineuse, car elle savait que ça n'aurait jamais été sur ses mains, ni sa conscience sans cette organisation. Sa rage semblait grandir de jour en jour, et je me demandais quand celle-ci allait exploser. Comment son corps pouvait encore la contenir...-       Et les autres, comment elles font ? Elles tiennent le coup ?           Quand j'eu terminé ma question, elle me sembla étrange, jusqu'à maintenant, j'avais évité de m'enquérir de l'état de nos sœurs.-       A t-on vraiment le choix ? La peur de finir dans un de leur labo du 37e étage les dissuade.           Elle soupira.-       Si seulement on pouvait les massacrer.           Elle avait une lueur dans les yeux quand elle prononça à haute voix son désir enfoui. Elle n'avait aucune honte et moi non plus. Je pensais la même chose.-       Interdiction divine ! Répliquais-je.           Pourquoi Nahash était encore en vie ? Parce qu'il était tout bonnement impossible pour une sorcière de tuer un humain. Notre sang nous en empêchait. Cela avait un lien direct avec notre ancêtre commun, l'Ange qui était venu sur Terre protéger cette espèce. De ce fait, nous ne pouvions les décimer.-       Foutu condition, cracha-t-elle.           C'est ça, foutu condition pensais-je tandis que son regard s'éloignait au large en direction des buildings qui entouraient l'immeuble.-       Parfois le soir, j'en viens à le souhaiter, tous les tuer ou alors me laisser mourir. Juste pour ne plus être à leurs ordres.           Elle souffla, puis se tourna vers moi.-       Si seulement quelqu'un pouvait nous aider, pria-t-elle tout en me dévisageant.           J'avais réellement mal pour elle, cette femme si courageuse. Je l'imaginais sans tout ça, une femme aussi forte n'aurait pas eu besoin d'être à légale de l'homme aux yeux de la loi pour voler de ses ailes, faire ses proches choix. Elle aurait voyagé sans s'arrêter un seul instant. Mais à la place, elle est là, enchainée avec des cadenas si lourds qu'elle ne pouvait que se trainer lamentablement. Nahash.            Son regard suppliant était toujours dirigé vers le mien, lui demandant vainement à l'aide. Mais pourquoi moi ? Pourquoi ne pouvait-elle s'empêcher de me penser comme d'un sauveur ? J'aurais voulu l'aider, mais je ne pouvais pas. Je ne devais pas l'inclure dans mes plans, tout était encore trop bancal, malgré mes soins, pour faire peser la menace de tout capoter. Je baissais la tête, admirant la vu que m'offrait le sol de l'appartement, je n'arrivais pas à supporter son regard. Je fuyais ses silencieuses prières.-       Si seulement, osais-je pourtant lâcher et j'avais déjà honte.           Je voulais lui faire passer le message que je ne serais pas cet espoir. Elle dû le comprendre, car elle arrêta d'attendre après moi. Je la savais déçue de ma couardise. Sa langue claqua dans sa bouche.-       Bien. J'y vais. Je reviendrais.Au ton sec qu'elle employa, j'en doutais. Ce que je venais de faire, pour la seconde fois consécutive à cette femme meurtrie, à cette sœur sorcière agonisante, était affligeant. Je lui avais tout simplement enfoncé encore plus profondément poignard qui la tuait à petit feu. Je lui aspirais son espoir, la dépouillant de ses derniers rêves de liberté et je me demandais alors : n'avais-je donc aucune pitié pour ma sœur ? Au fond de moi je sais que j'en avais, je compatissant pour mon sang mais toutefois je ne pouvais les faire espérer si chèrement en vain. En entendant la porte claqué dans mon dos froidement, je n'avais plus le choix : il fallait que je réussisse.           Seule, je le resta pendant encore cinq journées. Aucune nouvelle de Joséphine, aucune visite de Kerian. Je me sentais délaissée. J'étais prisonnière. Rien ne rythma plus ma journée que mes allées et venus vers le frigo qui se vidait rapidement ainsi que mes tentatives de correspondances avec Seth. J'essayais de lui donner des instructions, je n'avais aucune réponse. Seule. Rien ne pouvait m'enlever ce sentiment de solitude qui m'étreignait le cœur. J'aurais pu me satisfaire d'avoir perdu Joséphine, encore plus, de ne rien voir venir de la part de Kerian, mais Seth. Cela m'était intolérable. Il était trop distant, à la limite du chimérique, il me manquait effroyablement. C'était une torture. J'espérais que ses réponses absentes étaient dues au travail que je lui avais demandé. J'avais cette angoisse, la rampante, l'étouffante qui me faisait craindre d'avoir été oublié. Après tout, malgré ses sentiments, j'étais un réel fardeau, je savais qu'il aurait été bien plus heureux avec une autre, imprégnation ou pas. Mais moi, je ne pouvais plus me passer de lui. D'ailleurs qu'est-ce que je deviendrais sans lui ? Est-ce que l'imprégnation se faisait qu'une fois dans la vie ou alors dès que la conjointe s'éteignait le phénomène réapparaissait ? Dans ce cas, est-ce qu'il n'attendait pas tout simplement que je disparaisse ? Je me haïssais d'avoir de pareils pensés, de ne pouvoir lui faire totalement confiance malgré l'amour que je lui portais. La solitude commençait à me transformer, sombre et seulement accompagnées de me idées noires, je gisais.           C'est dans cet état d'esprit qu'un fantôme apparu, me coupant dans mes tristes réflexions. Enfin, fantôme, c'est de quoi elle avait l'air à cet instant, elle était livide, transparente, tremblante, spectrale. Je me précipitais vers elle.-       Qu'est-ce qui t'es arrivée ? Paniquais-je alors que je pouvais enfin voir ses traits.           Elle me faisait peur, m'inquiétait, même la faucheuse en personne n'aurait pas eu autant d'impacte sur elle. Je la vis lâcher prise et me précipitais pour la retenir dans sa chute. C'est comme si on l'avait vidé de toute son énergie vitale. Après Kérian, Joséphine. Je la transportais tant bien que mal, pour l'allonger jusqu'au lit du salon. Elle était glacée. Je la recouvrais et partie chercher non pas de l'eau mais d'une boisson énergisante super calorique accompagné d'un encas. Je redoutais qu'elle tombe dans notre coma. Je lui tandis les victuailles, elle les refusa.-       Bois au moins, tentais-je de la persuader.           Mais elle n'en fit rien, au lieu de ça elle plongea son regard dans le mien et j'eu peur. Il me glaça le sang. La mort. Elle était à l'agonie, il n'y avait plus rien de cette battante que j'avais connu au premier abord, de cette femme déterminée. Le peu de joie était partie laissant une peur sans pareille. Elle me prit les mains et suppliante articula difficilement :-       Je t'en supplie, aide-nous.           A cet instant, devant un tel désarroi, j'eu envie de lui répondre, de lui crier même que je l'aiderais. Je voulais la réconforter, lui dire que j'allais la sauver, elle et les autres. Enfin je l'espérais. Au lieu de ça, je me giflais, je me pinçais pour taire mon secret de lui demander pour la seconde fois ce qui lui était arrivée. C'est alors, que sans je m'y attende, elle éclata en sanglot. Il ne s'agissait pas de pleurs communs, ce n'était pas de la peine, c'était des pleurs qui me brisaient le cœur, silencieux, tranchants, déchirant le silence de la pièce. Les sanglots étouffaient sa respiration, les larmes noyaient son visage. Elle avait peur, une peur sourde, intense, sur son visage se lisait la terreur. Comment une personne qui avait déjà tant vécu pouvait être à ce point terrifiée et abattue ?           Elle tenta alors de calmer ses soubresauts, un son alors sorti, faible comme elle. C'était un murmure, un chuchotement, une confirmation étouffée :-       On va tous mourir.

Salem.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant