Chapitre 30

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Les jours qui suivirent, Rémi s'invite trop souvent dans mes pensées, pour moi propre bien. Je résistais à l'envie de prendre de ses nouvelles, cependant je n'étais pas assez autodiscipline pour ne pas épier constamment les réseaux sociaux. Pour ma plus grande frustration, il n'était pas un adepte de ces derniers et les seuls posts qui apparaissaient, provenaient de ses amis. Je tentais d'identifier son "ami d'enfance" mais sans succès. Je me forçais à desserrer la mâchoire ce que je faisais inconsciemment à chaque fois que je me rappelais de son existence. J'expirais en relâchant les épaules et sortit de l'ascenseur pour regagner mon bureau.

Avec Denis, nous venions de signer un contrat en or, en grande partie grâce à son don pour les chiffres. Alors que je devrais être aux anges, la nouvelle ne me faisait ni chaud ni froid. Mes collègues prirent cela pour de la modestie, et je ne cherchais pas à les en dissuader. Je me voyais mal leur expliquer qu'un brun envoutant me faisait perdre tous mes neurones, même à distance. J'avais passé toute la réunion à penser à lui. Qu'est ce qu'il faisait? Avec qui? Est-ce qu'il lui arrivait de penser à moi? ...

Je m'enfermais dans mon bureau et me plongeais dans mes dossiers mais des yeux rieurs me faisaient perdre le fil. Un coup bref à ma porte me fit sursauter. 

-Entrez, chevrotais-je malgré moi. 

Guillaume glissa sa tête blonde dans l'interstice, suivit de son costume sur mesure. Je pinçais les lèvres. Etait-il obligé de prendre un bain à l'eau de Cologne chaque matin? Malgré cela, je me forçais à me montrer accueillante. C'était le deuxième à m'avoir tolérer après Denis. En grande partie parce qu'il était si imbu de lui-même qu'il était facile de le manipuler. Quand je lui avais annoncé de ma voix de jeune fille timide que je regrettais presque de travailler ici puisque rien n'était alors possible entre nous, j'avais bien cru qu'il allait se taper sur le torse comme un gorille. Donatien avait été le dernier à se rallier à ma cause. Il n'était pas vraiment pour ou contre moi. Il se contentait de suivre le mouvement. Il ne me restait plus qu'à charmer le dragon. 

-Que puis-je faire pour toi? lui demandais-je poliment en espérant réussir un jour à me débarrasser de son parfum. Je pouvais déjà imaginer les effluves s'incruster dans la moindre fibre. 

Son regard s'illumina d'une lueur lubrique que j'ignorais, dégoutée. 

-Je tenais à te féliciter, le dossier Ferrand n'était pas gagné d'avance, il lissa sa cravate d'une manière suffisante, tu as eu de la chance.  Si tu veux progresser, je me ferais un devoir de t'aider, bien entendu. Autant que mon expérience te serve! N'hésites surtout pas! 

Je hochais la tête, reconnaissante. Il voulait surtout que je me tarte tout le boulot pendant qu'il récolterait tous les honneurs. Mon téléphone vibra, m'empêchant de le maudire ad vitam aeternam. 

-Allo? 

-Félicitation! hurla Cécile à m'en percer les tympans. 

-Comment es-tu au courant? La signature s'est faite il y a une heure à peine. 

-Je sais tout, je vois tout, j'entends tout! frima-t-elle espiègle. 

-Humilité incarnée! ironisais-je. 

-Bien sur! En parlant d'humidité incrustée, où en es-tu avec le dragon? 

-Beurk, et re-beurk! 

Son rire résonna dans mes oreilles. 

-Je sais qu'elle craque pour Denis, je vais faire en sorte qu'il la remarque. 

Béatrice -alias le dragon- était l'assistante de Gabriel. Elle n'échappait pas au stéréotype de l'assistante. Amoureuse de son boss à vingt ans, passée la trentaine, elle était engluée dans son poste et détestait toutes les femmes qui l'entouraient. Son amour pour Gabriel était un secret de polichinelle qui l'avait transformée en monstre de rancoeur. Même si je ne n'osais pas l'avouer à Cécile, j'avais peur de finir comme elle. Heureusement pour elle comme pour moi, elle semblait avoir un faible pour Denis mais celui-ci était trop nigaud pour le remarquer. Avec un coup de pouce, j'étais sure de pouvoir calmer le dragon. 

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