Obsession

Chapitre 55

Cela faisait un mois que Matthieu était venu vivre définitivement ici. La procédure s'était déroulée en accéléré et les jours avant son arrivée, j'avais angoissé. Rémi avait su me rassurer et les choses s'étaient passées sans heurt dommageable. Nous avions pris peu à peu nos marques et j'avais dorénavant l'impression que toute ma vie, nous avions vécu à trois.

Je ramassais un camion de pompier et regardais la pile de dossiers qui m'attendait. Il fallait vraiment que je parle à mon chef.

-Théo !

Je me ruais dans la chambre.

-Tu n'es pas encore prêt pour l'école ? m'agenouillais-je devant le garçonnet.

Il secoua piteusement la tête.

-J'ai mal au ventre.

J'effleurais son front et le recouchais doucement. Les dossiers attendraient, il lui fallait un médecin. J'appelais Rémi pour qu'il rentre plus tôt mais tous mes appels restaient sans réponse. Je passais ma journée à m'occuper de Matthieu et sa fièvre tomba en début d'après-midi. Il était encore faible mais son état n'était plus inquiétant. En fin d'après-midi, Rémi rentrant et vérifia l'état de son fils. Il me remercia d'avoir pris soin de lui, me serra dans ses bras et disparut dans son bureau. Je soupirais en regardant la porte se fermer. Il s'était organisé pour rentrer plus tôt mais cela s'accompagnait de plusieurs heures de conception. Sur le papier, il était à la maison, en réalité, il était aux abonnés absents.

Les seuls jours où il faisait une exception, j'étais à Lyon et il s'occupait de son fils. J'espérais qu'avec l'acquisition de son prochain chantier, son rythme soit plus souple.

*****

Cela faisait trois fois que j'appelais Rémi pour passer à table. Matthieu, enthousiaste, tapait du poing sur la table en appelant son père.

-Je vais le chercher, toi tu ne touches à rien, c'est brûlant.

Son regard pétillant se posa sur moi et il hocha vivement la tête. Où pouvait-il bien être ? Il était resté à côté de moi pendant que je réchauffais les lasagnes, l'œil rivé à son téléphone. Sa voix me guida jusqu'à la terrasse à l'arrière de la maison.

-Rémi ?

Il raccrocha précipitamment. Je fronçais les sourcils.

-Qu'est ce qui se passe ? me demanda-t-il.

-Tu viens manger ?

Je le regardais rejoindre la cuisine en rejouant la scène dans ma tête. Avait-il sursauté ? Avait-il l'air coupable ? Pourquoi partir sur la terrasse pour téléphoner et raccrocher précipitamment ? Parle-t-il à une autre femme ? S'est-il rapproché de quelqu'un ?

Je repensais à notre dernière étreinte. Nous nous voyons peu mais je ne pouvais pas croire qu'il me trompe. Il m'était toujours apparu comme irréprochable et notre passion ne s'était pas atténuée.

Il était moins présent, accaparé par son chantier mais se pouvait-il qu'il se passe autre chose ? Même quand il était là, il avait l'esprit ailleurs, il répondait souvent à côté mais je pensais qu'il était obnubilé par son travail. Il se couchait tard, restant enfermé dans son bureau et me rejoignait dans la nuit. Le matin quand je me réveillais le lit était froid depuis longtemps. Et si son travail n'était pas sa seule excuse ?

*****

Matthieu courait partout. Depuis que son père nous avait invités pour une sortie en mer afin de se faire pardonner le dîner de la veille où il n'était jamais apparu, il était une vraie pile électrique. Ses cris et ses rires camouflaient mes sentiments mitigés. Rémi était de plus en plus absent qu'il soit au boulot ou à la maison, il ne lâchait pas son téléphone. Son chantier accumulait problème sur problème. Il pouvait partir au milieu de la nuit comme rentrer avec deux heures de retard sans même s'en apercevoir.