L'Art de Mentir ✔

Prologue

Mentir est tout un art.

Je le sais. Je le pratique depuis ma plus tendre enfance.

Par nostalgie, je viens souvent voir l'activité théâtre de mon collège.

On m'a souvent proposé d'y jouer, j'ai toujours refusé catégoriquement.

Hors de questions que j'y reprenne goût.

Le mensonge est une drogue à laquelle j'ai déjà bien trop goûté juste pour essayer.

Mais comme n'importe quelle drogue, j'ai fini par y être accro.

Je ne vis que par ça.

Tout paraît si simple quand nous avons le choix.

Mentir ou dire la vérité ?

Pour moi le choix est vite fait.

Je ne m'invente pas une vie.

Je cache la vérité, c'est différent.

Je sais que je mens, mais au fond j'ai peur.

J'ai peur que tous mes subterfuges soient révélés au grand jour.

Et qu'à force de les défendre je finisse moi-même par y croire.

J'ai bien trop pris goût au mensonge pour espérer revenir en arrière et changer du jour au lendemain.

≈≈≈

Tout a commencé ce jour de septembre, ma mère voulait que je fasse une activité.

Elle m'a inscrit à des cours de théâtre.

La première année, nous ne faisions que des pièces idiotes sans aucun sens, mais j'y avais déjà pris goût.

L'année suivante fut toute aussi périeuse que la précédente, mais j'étais aveuglé par cette envie de voir plus loin.

Les années ont passé, j'ai commencé le théâtre à huit ans, j'ai arrêté à onze.

Quatre années à jouer un rôle.

Les trois premières furent les plus ennuyantes, à jouer des pièces pour petits sans aucun sens.

Et puis vint la quatrième année...

Nous commencions à jouer des personnages, nous commencions réellement à jouer la comédie.

Se donner en spectacle.

J'étais petit à cette époque et mon point de vue restait celui d'un enfant qui montait sur scène pour enfin jouer.

≈≈≈

Mais à mon entrée au collège, j'ai commencé à me servir de ces cours pour continuer le spectacle jusque dans ma vie.

J'incarnais un rôle qui n'était pas le mien.

Après quatre ans à garder ce masque, j'ai finalement décidé d'arrêter.

Et de montrer mon vrai visage.

Et maintenant me voilà, William, quinze ans, à observer l'activité théâtre de mon collège, savourant ma dernière année ici et refusant de monter sur scène.

Personne n'a jamais su que j'avais déjà fait du théâtre.

Ce n'étais qu'une infime partie de tous les mensonges que j'avais pu raconter et qui resteront enterrer six pieds sous terre.

≈≈≈

Mais vint ce cours de français, vint ce cours sur l'histoire du théâtre que je connaissais sur le bout des doigts.

Vint le jour où notre professeur nous distribua une œuvre que je connaissais si bien : Le Menteur, de Corneille.

Puis, le sourire aux lèvres, elle déclara que nous allions jouer cette pièce de théâtre.

À ces mots, j'avais senti mon masque se fendre en deux, tombant petit à petit pour ne laisser qu'une mine horrifiée.

Et me voilà, William, quinze ans, à savourer ma dernière année dans ce collège avant que les masques ne tombent.

≈≈≈

Le mensonge est une drogue à laquelle j'ai bien trop pris goût.

Et à laquelle je suis devenu accro.

Attendant de crever d'une overdose.

Et de jouer mon tout dernier rôle.

≈≈≈