Chapitre 35

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“Ouais, morte comme morte. Je vais directement répondre aux possibles questions qu'il y a dans ta tête parce que je préfère éviter un possible malaise.”

“Donc, je disais, ma mère est morte à mes cinq ans. Mon père tenait un théâtre dans lequel je suis rentrée à mes sept ans. Mon père a essayé de retrouver une personne comme ma mère sans succès pendant très longtemps jusqu'au jour où il est tombé sur celle qu'il cherchait. Ma mère et elle étaient très différentes. Elle était toujours stressée et avait des horaires pas possibles à cause de son boulot. Ils ont cohabité un an ensemble puis ils ont fini par vivre séparément tout en continuant à sortir ensemble. Mais je ne sais même pas s'ils s'aiment toujours. Elle a fini par partir après un échec cuisant dans sa carrière et on ne l'a jamais revue.”

“Sauf qu'il y a quelques semaines, elle est revenue comme une fleur en disant qu'elle n'en avait pas encore fini avec cette ville qu'elle avait fuit pendant si longtemps.”

“Pour moi, elle est une lâche bien qu'elle m'ait beaucoup aidée.

“Je pense qu'il n'y a pas de problèmes à ce que tu saches et ça m'est égal. Bref, quand je suis rentrée au collège, je me suis faite harcelée. C'était violent. On me frappait après les cours. Un groupe m'attendait dans une ruelle que je devais toujours emprunter pour revenir chez moi. J'avais beau essayé de trouver d'autres moyens, ça ne marchait pas. Ils finissaient toujours par me le faire payer un jour ou un autre.”

“J'étais trop bizarre pour eux. Je comprenais trop vite. J'étais un peu l'alien de la classe et pour eux, c'était comme si je ne ressentais rien et que ça leur donnait le droit de faire de moi leur punching-ball attitré.”

“Alors oui, j'ai continué de travailler à ma manière sauf que je faisais exprès de répondre à côté aux contrôles mais ce n'était pas suffisant, je n'avais pas encore vraiment envie de faire baisser mes résultats au point de foutre en l'air ma place dans la société.”

“Sauf que j'ai fini par me rendre compte que je n'avais pas ma place dans cette société qu'était l'école. Alors j'ai laissé tomber. Je ne cherchais plus à répondre, les copies blanches étaient moins fatiguantes.”

“Mais ça n'a jamais cessé. Il y avait toujours ce quelque chose en moi qui continuait de ressortir malgré toutes mes tentatives de mimétisme.”

“Après tout, c'était évident, je n'étais pas eux. Ça crevait les yeux rien qu'à mon attitude. J'étais une pauvre gamine cassée en deux.”

“Mais j'avais quelque chose qu'ils n'avaient pas. Je savais mentir. Moi, je savais me faire passer pour ce que je n'étais pas.”

“Toi et moi, on se ressemble beaucoup, au fond. Tu l'as déjà senti, pas vrai ? Cette peur, toutes les fois où tu sembles perdre le contrôle et que tu t'enfonces toujours plus loin dans la fausseté de tes actes.”

“Seulement, connais-tu tes raisons ? Sais-tu pourquoi tu as choisi la même voie que moi, toi, le petit William sans problème à la vie présumée parfaite ?”

“Parce qu'on ne naît pas menteur, William. On le devient par nous-mêmes et seulement nous. Ça n'a rien d'une drogue. Personne ne te force à mentir.”

“Mentir est un choix.”

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L'Art de Mentir ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant