Chapitre 40

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Les vacances sont terminées. Les cours ont repris et je finissais la matinée par physique chimie aujourd'hui. Ces vacances avaient été absolument passionnantes et m'avaient appris l'étendue de mon ignorance.

L'étendue de ma connerie. La différence entre moi et les autres. La médiane parfaite de ces particularités qui m'avaient fait devenir une victime d'un monde encore inconnu.

Nous devions faire une expérience. Le sujet ? La combustion de paille de fer. J'avais mes pensées occupées, perdues dans une brume vague et sombre. Tout paraissait s'éteindre au fur et à mesure et ce fut la main d'Alexy qui m'extirpa de ce monde effrayant.

Je n'avais pas écouté les mesures de sécurité que le professeur nous répétait avant chaque expérience, je me sentais vide.

Tout est si flou... Tout est si indistinct...

Tout est si complexe...

« Bon, commença Alexy d'un ton enjoué, tu vas chercher le bec bunsen ? Je m'occupe du reste ! »

J'acquiesçai, absent.

Il y aura des jours plus durs que d'autres... Il y aura des jours où le monde paraîtra comme une mélasse de goudron ou de gadoue.

Quand ce jour arrivera, je serai prêt à l'affronter. J'avais le pressentiment qu'aujourd'hui était ce genre de jour.

On m'avait enlevé quelque chose au fond de moi. Quelque chose de précieux... J'avais l'impression que ce sentiment m'était familié : L'impression d'une profonde solitude, sans aucune autre personne que nous-même pour nous aider à supporter les difficultés.

Elle a toujours trop réfléchi avec toi.

Je me levai de ma place sans faire attention à la direction vers laquelle je me dirigeais. Un regard vers Maxime me fit comprendre qu'il gardait un œil sur moi. Je m'emparai du bec bunsen, bousculant ce dernier au passage sans un mot, et me rassis à ma place.

J'enfournai le bec bunsen dans le tuyau à gaz. Alexy revint peu après avec le matériel nécessaire : la paille de fer, une pince et une boîte d'allumettes.

Alexy avait perdu son sourire en voyant mes mains pantelantes, toujours accrochées au tuyau du bec bunsen comme si mon esprit avait quitté mon corps ou mon air livide et mes yeux vitreux.

« William ? »

Je l'avais compris au ton de sa voix soucieuse. Je n'avais pas eu besoin de le regarder dans les yeux. Seul la couleur de sa voix m'indiquait que quelque chose d'anormal se passait chez lui : un sentiment, une profonde inquiétude.

Je souris d'un air absent, le regardant sans le voir. Le voile qui m'empêchait de voir la réalité devenait de plus en plus opaque. Bientôt arriverait le jour où je ne pourrai jamais le retraverser...

Alexy se remit à sourire comme si de rien n'était et me tendit la boîte d'allumettes.

« Bon, tu allumes l'allumette et j'ouvre l'arrivée de gaz. »

J'acquiesçai de ce même air absent.

« Tu es sûr que ça va ? »

Je reproduisis les mêmes gestes sans me demander si j'avais l'air d'aller réellement bien ou non.

Ça m'était égal.

Je pris une allumette dans le paquet et la craquai d'un coup sec.

Même si tu ne veux pas l'entendre, il y a des choses que tu ne peux ignorer.

Je fixai la petite flamme qui grignotait le bois petit à petit, Alexy m'observant sans comprendre.

La vérité, c'est que...

Je sentis une larme se former dans mon œil gauche et rouler lentement sur ma peau.

Une seule et unique larme.

La vérité, c'est que je ne me souviens de rien.

Alexy se figea, me demandant une nouvelle fois si ça allait. Mais je n'entendais plus que les cris désespérés d'un enfant abandonné.

La vérité, c'est que je ne mens pas.

Un sentiment froid et indescriptible, comme si j'étais mort de l'intérieur se propageait dans tout mon corps.

Puisque mes mensonges sont ma réalité.

Une douleur me réveilla brutalement de ma transe, me poussant à lâcher brusquement l'allumette sur la paillasse. Je venais de me brûler.

Toujours ce sentiment familier, celui de quelqu'un de seul, d'abandonné, victime d'une injustice dont il ignorait la tenance.

« Putain William ! Hurlait presque Alexy alors que Maxime et Théo nous regardaient sans comprendre. »

L'allumette se consumma d'elle-même, ne laissant qu'un tas de cendre.

≈≈≈

Aussi vite le chapitre écrit, ce dernier est publié :3

C'est celui qui donne le plus d'indice sur William puisqu'il se renferme complètement sur lui-même dans celui-ci et commence à de plus en plus sentir que quelque chose cloche... 😏

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