# IX. Une chute non sans conséquence
Je ne sais même pas depuis combien de temps je suis dans cet état. Une semaine ? Ou peut-être deux ? A vrai dire, je m'en fous. Après ma nuit désastreuse où Yann est venu dormir avec moi, j'ai craqué – mais sur le long terme attention. C'était une chute longue et terriblement lente. Plus rien n'arrive à me distraire ne serait-ce qu'une minute. Je suis bloqué par ce qui m'est arrivé malgré les efforts de mon meilleur ami pour me faire sortir le plus souvent possible. Il n'est pas au courant de ce que je fais de ma vie depuis ces derniers temps. Je ne veux pas l'inquiéter alors j'essaie de le voir le moins souvent. J'arrive à l'heure en cours sans qu'il ait besoin de venir me chercher et je me débrouille pour rentrer le soir même si je suis complètement shooté. Il m'a bien fait comprendre qu'il compte m'aider par tous les moyens possibles mais j'ai bien vu que c'était impossible.
Ce que j'ai fait ? Oh rien de bien grave, enfin ... J'ai augmenté ma consommation de drogue et je n'en suis pas fier du tout. Mais comment j'aurais pu faire sinon ? Il n'y a que ça qui me calme réellement. Je me sens beaucoup plus serein instantanément après. Mais je sais qu'ils ne sont pas très bon pour la santé. Il est bien écrit en rouge « Respecter les précautions d'emploi ». Pff, connerie sur connerie ça. Les conditions d'emploi changent tout le temps et je ne veux pas avoir quelqu'un qui me dit quoi faire. Je suis donc passé de quatre médicaments par jour à ... huit ? Ouais c'est ça je crois. J'en prends un dès que j'en ai besoin, sans me poser plus de questions que ça. Au moins, ils ont tous disparu de mon esprit. Enfin. Leurs quatre visages ont été effacés. Psychologiquement, je fais croire que je vais parfaitement bien alors que c'est tout l'inverse en réalité. Et sinon, physiquement, je suis un cadavre.
Mes yeux sont constamment rouges et ils me piquent. Je ne dors presque pas. Quelques-uns me posent des questions mais je réponds simplement en disant que je suis malade. Ils ne cherchent pas à en savoir plus. Ma peau est tellement blanche qu'il y a un contraste énorme avec la noirceur de mes cheveux. J'essaie d'aller mieux en avalant quelques vitamines mais cela n'arrange rien. Dépressif, voilà ce que je suis en fait. Je le suis depuis des années mais je me le suis caché. J'assume quelque chose pour une fois...
Je passe mes journées chez moi, le plus clair de mon temps dans le noir – flemme d'ouvrir ma fenêtre. Je ne mange presque plus. Je dois avoir perdu cinq kilos au moins. J'avais raison en disant que j'avais envie de crever. Ce serait tellement bénéfique... Mes côtes commencent à apparaître. Déjà que je n'étais pas gros mais alors là, je deviens un squelette cadavérique en fait. Ce serait tellement plus facile... Je n'ai presque plus de force pour me lever – et l'envie aussi à disparu. Quant à mon travail, je ne parle presque plus aux clients mais cela ne m'empêche pas de baiser. J'en ai accumulé plusieurs dernièrement. Parfois, ils étaient plusieurs en même temps et je prenais vraiment mon pied – tout le temps. J'espère avoir utilisé un préservatif à chaque fois... Je ne m'en souviens plus et je dois bien avouer que pour ça, Yann avait raison ; je ne suis pas tout le temps conscient de ce que je fais. Il faudrait que j'aille faire un dépistage... si je suis toujours vivant d'ici là. Si jamais j'ai chopé quelque chose, je ne m'en remettrai jamais.
Quand je vais travailler, j'esquive Gaël qui tente pourtant de me parler. S'il veut me parler de Maxime, il peut toujours courir. Il semblait vouloir me parler mais après ces six horribles mois de séparation, je refuse catégoriquement. Et puis, si je retourne trop longtemps au travail, je peux revoir Calum. Celui-là, si je le revois, je le tue ! Il a causé ma perte ! Depuis ma rencontre avec lui, je ne suis plus le même. Je suis devenu pire qu'avant. Putain ... Un gamin, je ne peux pas en vouloir à un gamin. Il est naïf. Il ne connaît rien du monde des adultes. Il croit peut-être que tout est rose comme ce que l'on vit étant enfant. Enfin, ce ne sont pas tous les enfants qui ont cette chance. Quelques-uns tombent malheureusement sur des mauvais parents mais on ne les choisit pas, n'est-ce pas ? Son petit monde des bisounours n'existe que dans ses rêves. On ne sort pas le soir pour trouver un imbécile qui accepterait de coucher avec nous, tout ça pour se confirmer si on est gay ou non. J'espère au moins qu'il aura eu un déclic. Au moins, j'aurais servi à quelque chose ...
Il est presque dix-sept heures et Yann devrait venir me rendre visite. Il m'a dit qu'il passerait pendant une heure avant que j'aille au travail. J'ai dû mal à me remettre de ces derniers jours de laisser aller. J'arrive quand même à me lever pour aller dans la salle de bain afin de prendre une petite douche. Pour une fois, je m'assieds dans ma baignoire. Je n'ai même plus la force de rester debout. L'eau coule sur mon corps sali par les impuretés des autres mecs. Mes mains ont plus ou moins guéri. Il reste encore quelques endroits qui sont toujours douloureux. Les premiers jours, c'était un enfer. Je ne pouvais même pas bouger les mains – c'était assez difficile pour coucher avec quelqu'un. Yann m'a aidé au début puis je lui ai demandé gentiment de me laisser tranquille.
Je finis de me laver et enfile un short et un débardeur. J'essaie de camoufler mes yeux rougis le plus possible en les rinçant avec du sérum physiologique Je prends soin d'avaler quelques médicaments pour affronter le reste de la journée. Quelqu'un entre et je sors de ma salle de bain. Yann est face à moi et il me dévisage. Qu'est-ce que j'ai fait ? Non, il ne devrait rien remarquer. Il s'approche dangereusement de moi et ne bouge plus. Ses yeux sont sombres :
- Bon, maintenant, je veux des explications. J'ai fait comme si de rien n'était pendant un mois alors que je voyais bien que tu n'allais pas bien. Explique, tout de suite. Je ne te laisserai pas tant que tu ne m'auras rien dit.
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La colère n'est pas rouge [boyxboy]
RomanceLa colère cache souvent la douleur. András est souvent en colère mais souffre, sans que personne ne puisse faire quoique ce soit pour lui.