07. Un pas en avant, deux pas en arrière

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La jalousie de mon petit ami me causait vraiment beaucoup de problèmes, depuis toujours. Mais aujourd'hui encore plus. Lorsqu'il m'avait fait monter dans sa voiture et qu'il s'était mis à accélérer en conduisant comme un fou, j'avais eu peur. Oui, une peur intense. Les images de l'accident que j'ai eu avec mon père m'étaient revenues en tête, me paralysant totalement. Alors après le départ d'Antony et de sa voiture de l'enfer, je m'étais assise sur un banc, à l'arrêt du bus. Et puis, après quelques minutes, quelqu'un était arrivé.

- Ça va Mel ? Tu n'as rien ? Sa voix était inquiète. Ce n'était pas la première fois que je l'entendais ainsi. Le soir de l'accident, c'était déjà le cas. À nouveau, des images de cette horrible soirée me revinrent en mémoire à tel point que j'ai dû secouer la tête pour tenter de les faire partir.

- Je m'appelle Amelia... et tout va très bien. Je tentai de me lever, mais mes jambes tremblaient encore fortement. Il me rattrapa alors que j'étais sur le point de trébucher. Ses bras étaient forts, et il me tenait sans difficultés.

- Ne fais pas la fille forte alors que je vois bien que ça ne va pas. Il m'aida à me rasseoir sur le banc, et prit place à mes côtés, comme si de rien n'était. Je pouvais sentir la chaleur qu'il dégageait, son bras étant collé au mien,

- Qu'est-ce que ça peut te faire de toute façon ? Je lui parlais sèchement, mais cette fois, ma colère était un peu dirigée contre lui. Tu culpabilises peut-être ?

- Moi ? Culpabiliser de quoi ?

- Ne fais pas l'innocent Evan. Lorsque je dis ça, il ouvrit de grands yeux. Je t'ai demandé de ne pas envenimer les choses... tu savais qu'il m'attendait sur le parking. Tu n'étais pas obligé de le narguer.

- Et toi alors ? Tu culpabilises peut-être ? Il disait ça sur un ton de reproche, sauf que je ne voyais pas du tout où il voulait en venir. Il éclaira ma lanterne rapidement. Tu n'étais pas obligée de m'accuser d'être celui qui a provoqué l'accident de ton père.

- Ah, alors tu as fait ça pour te venger ? Ma colère contre Evan montait à nouveau.

- Non, pas du tout. Même si c'est vrai que je me demande pourquoi tu m'as balancé ça tout à l'heure, mais ça, c'est une autre discussion. Il me regardait à travers ses lunettes de soleil. Mais je pouvais malgré tout distinguer ses yeux qui scrutaient dans ma direction. Tu ne le sais sûrement pas, mais ton mec m'agace... on ne s'entend pas depuis le primaire. Décidément, personne n'appréciait Anthony. Déjà mon cousin Ryan et lui ne s'entendaient que parce qu'ils sont dans la même équipe de basket. Et maintenant, j'apprenais qu'Evan aussi avait une dent contre lui. Mais... je suis désolé que tu en aies fait les frais. Il retira ses lunettes et planta son regard turquoise dans le mien. Ce n'était vraiment pas mon intention. Je pensais qu'il était au courant que nous travaillions ensemble et je voulais juste l'énerver un peu, c'est tout.

- Et bien tu as réussi ta mission. Je baissai les yeux, les posant sur mes mains encore tremblantes.

- Vraiment, il posa sa main juste une seconde sur la mienne, je suis désolé. Il avait l'air sincère. Et puis... je ne pensais pas qu'il irait aussi loin... ou qu'il était de ce genre.

- De ce genre ? ça veut dire quoi ça ? Cette tournure de phrase m'avait fait tiquer. Mais comme à son habitude, Evan allait éluder ma question.

- Écoute, je ne suis pas en voiture, mais je peux te raccompagner quand même jusqu'à chez toi.

- Je ne montrai plus jamais en voiture de toute façon... par contre, je n'ai pas besoin de chaperon. Je parlais doucement, mais sèchement malgré tout.

- Je n'ai pas dit ça. Il sourit. Mais ta maison est sur mon chemin. Je ne te propose pas un rencard, il chercha mon regard, juste... de marcher ensemble. De toute façon, je vais dans cette direction. Mais ça me rassurerait si... je ne lui laissai pas le temps de finir sa phrase qui puait l'eau de rose.

- Si tu veux. Je haussai les épaules.

- Tu te sens d'attaque pour te lever ? Il se redressa et tendit ses bras au cas où je tomberais. Je fronçai les sourcils, légèrement surprise par sa bienveillance. C'était bien la première fois où il ne se comportait pas comme un abruti.

En guise de réponse à sa question, je hochai la tête pour lui confirmer que ça allait mieux, et que je pouvais me relever seule. Puis, nous avons commencé à marcher. Il faisait plutôt doux, alors je tenais ma veste en jeans dans la main. Malgré le soleil qui brillait encore à travers les nuages, l'air sentait la pluie, et j'avais l'impression que d'une seconde à l'autre, une averse pourrait nous tomber dessus. Cela ne me dérangerait pas, car j'adorais la pluie. Une bonne averse d'été, après une journée bien chaude, c'était l'idéal pour se rafraîchir.

Au départ, ni lui ni moi n'avions réellement envie de parler, alors le silence s'est installé. Mais après quelques minutes, Evan le brisa en s'adressant à moi d'une voix calme, mielleuse.

- Je voulais te demander... il voulait sûrement crever l'abcès, pourquoi tu m'as fait cette remarque tout à l'heure... dans le couloir ? Bingo !

- Honnêtement ? Je lui demandais ça comme pour lui demander s'il était sûr de vouloir cette réponse.

- Oui.

- Hier, après notre discussion dans le couloir, je t'ai vu avec ton pull et ta capuche. Je n'ajoutai rien de plus, lui laissant le soin de faire lui-même le lien que j'avais fait la veille.

- Tu crois vraiment que c'était moi ? Je pourrais jurer qu'il avait l'air blessé en prononçant ces mots. Il s'arrêta de marcher, m'obligeant à faire de même.

- Franchement, je ne sais pas si c'était toi ou non, mais tu ne peux pas m'en vouloir de me poser la question. Cette fois, j'avais réussi à garder mon calme, à ne pas lui parler sèchement ou de façon agressive. Non. Cette fois, je lui parlais comme si je m'adressais à Gabrielle. Tu m'as demandé de mentir à la police, aux ambulanciers, aux médecins... tu m'as promis des réponses que j'attends toujours... et d'un coup, je te vois avec ta capuche, ça m'a juste rappelé cette personne... mon cerveau il n'imprime pas. Donc oui, je me suis demandé si c'était en fait toi et que je me suis fait largement avoir en acceptant de mentir pour toi.

- Je comprends. Il baissa brièvement la tête avant de la relever. Amelia, je te jure que ce n'était pas moi. Il avait toujours ce ton mielleux. Après avoir dit cela, il leva ses deux mains pour me montrer ses doigts décroisés. Je ne t'ai pas menti, je ne sais pas qui c'était, je suis arrivé trop tard. Et pour les réponses à tes questions, je te promets que je vais te les donner. Mais pas ici, pas comme ça. C'est trop important...

- D'accord. Cette fois, c'est moi qui baissai la tête. Doucement, je me remis en marche, et Evan suivit le mouvement. Désolée si ma remarque t'a blessé. Oui, je m'excusais auprès d'Evan Walker, le mec qui m'énervait le plus au monde. Pendant quelques secondes, le silence plana à nouveau entre nous. Puis, il reprit la parole.

- Tu sais quoi ? On est vraiment partis du mauvais pied toi et moi. On devrait recommencer tout à zéro. Il tendit une main face à lui. Salut, moi c'est Evan.

- Amelia. Je pris sa main et la serrai brièvement. J'acceptais de jouer le jeu, alors il ne fallait pas m'en demander beaucoup plus. Cela dit, je sentais ma bonne humeur revenir.

- Enchanté Mel.

- Arrête de m'appeler comme ça ! Il me lança un grand sourire, comme pour me faire comprendre qu'il le faisait exprès. Tu m'énerves ! J'accélérai le pas pour arriver plus vite à la maison, chez les Sawyer.

- Et tu adores ça ! Il éclata de rire, ce qui m'énerva encore plus. Amelia Collins, dans quelques temps, tu ne pourras plus te passer de moi !

- C'est ça, rêve toujours ! Le semblant de bonne humeur qui avait émergé s'était envolé.

Les larmes des SaphirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant