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Je dus passer une nuit agitée, je me réveillais alors que le soleil brillait, j'étais sous la couette et de l'autre côté du lit. Je tenais toujours contre moi l'oreiller sur lequel je m'étais endormie la veille, tellement serré contre moi que les plis du tissus avaient laissés des marques sur ma peau. Je ne sais pas si c'était dû à mon imagination ou pas mais je crus y déceler encore quelques traces de parfum lorsque je pris une grande inspiration le nez enfoncé dans la taie. Je n'eus pas le temps de bouger que ma mère entra après avoir frappé rapidement à la porte. Elle me vit, leva un sourcil interrogateur puis me chantonna qu'il était neuf heures et que le petit déjeuner était prêt. Bien qu'il n'eut pas d'oreilles, mon ventre se mit à gargouiller et dans la précipitation, j'envoyai voler la couette à mes pieds, oubliant momentanément que je ne portais pas de pyjama. Ma mère rit en me voyant essayer de cacher ma nudité à l'aide de mes bras et sortie. Je me hâtais de mettre le premier pantalon qui me passa sous la main, un bas de jogging noir en tissus et un tee-shirt blanc uni. Cette tenue suffirait bien le temps d'aller avaler quelques tartines et deux grands bols de café. Mon père était plongé dans son journal. Je lui dis bonjour, souriante, et l'embrassait tout en me servant le café noir et fumant. Mes fesses n'avaient pas encore touché la chaise que j'en bus deux grosses gorgées que je sentis descendre le long de mon œsophage. Je me ruais ensuite sur le pain, fraîchement acheté, en même temps que le journal et le pot de pâte à tartiner, j'enduis deux tartines d'une épaisse couche de chocolat et les dévorai en trois bouchées. Je me sentais de très bonne humeur ce matin, pas une pensée depuis que je m'étais levée n'était venue assombrir cette journée qui promettait d'être ensoleillée. Tout en reprenant du café et trois autres tartines de pain je me demandais ce que j'allais faire aujourd'hui. J'avais sûrement un devoir à faire pour la semaine à venir, prendre une bonne douche chaude avant toute chose, peut-être aller faire un tour avec mes parents s'ils allaient quelque part cet après-midi... Telles furent mes préoccupations en ce début de samedi. Ma mère, qui ne travaillait pas ce week-end à voir, elle était d'astreinte un week-end sur quatre, me regarda dévorer, un léger sourire aux lèvres. Mon père, une fois qu'il eut fini sa lecture attentive, se servit à son tour une tasse de liquide noir dans laquelle, sacrilège ! Il mit deux sucres. Lorsque j'eus fini, je regagnais ma chambre afin de préparer mes vêtements pour la journée. Je venais à peine de me décider lorsque j'entendis mon portable vibrer sur la table de nuit. J'allais voir mon message, me disant que c'était sûrement Logan qui me disait bonjour, au lieu de ça, un numéro inconnu m'avait envoyé le texte :

« Ptn, j'arrête pas de penser à toi, truc de ouf ! »

Durant un bref instant mon esprit encore en sommeil douta de l'expéditeur, mais pas besoin d'un bac plus cinq pour savoir de qui il venait : Mathilde. Malgré la gêne procurée par le manque d'habitude de recevoir ce genre de message, un sourire béat me dévorait le visage. Je pris une douche rapide, m'habillai et alla m'asseoir sur mon oreiller, le dos posé contre la tête de lit. Je souriais un peu moins, depuis j'essayais de me souvenir si Logan m'avait déjà envoyé ce genre de message... J'avais beau réfléchir, je n'en avais jamais reçu. « Tu fais quoi ? » était pour lui la base de toute communication, un espèce de bonjour commun, d'ailleurs je me demandais alors si ce n'était pas une sorte de message groupé, qu'il envoyait à ses potes, et tant pis si la pauvre Émilie était dans le lot. J'essayais de calculer combien de « Salut, tu fais quoi ? » avais-je eu depuis que nous étions ensemble, un le matin, plus quelques uns dans la journée, j'en perdis le compte, non pas par manque de chiffre mais par manque de courage. L'absence de romantisme ne m'avais pas choqué jusque là mais ce matin, j'eus la chance de découvrir qu'il était agréable de rougir au réveil, et de me rendre compte que j'étais novice dans cette matière, je ne savais absolument pas quoi répondre, j'eus beau me concentrer, fermer les yeux, imaginer ce qu'une fille cool et habituée à ce genre de message aurait pu répondre, l'une de mes héroïnes par exemple, mais en vain. J'eus une autre révélation ce matin, dans mes récits, le romantisme faisait défaut là aussi. Mes personnages, féminins pour la plupart, avaient tendance à sortir avec tel ou tel garçon à cause de sa popularité, son comportement ou sa situation professionnelle. Une vérité éclata au grand jour : Je suis moi aussi superficielle !

Jour de grève [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant