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Surprise autant que gênée, je plaquais mes bras sur ma poitrine et mon bas ventre, mon amie semblait s'en amuser, elle souriait.

« T'aurais pu frapper hein, râlais-je. Je t'aurai dit d'attendre cinq minutes.

- C'est pour ça que je l'ai pas fait. »

Elle me fit un clin d'œil et ôta son maillot à son tour. Je me demandais ce que diraient mes parents si l'un d'eux entrait à ce moment. Le fait de nous voir nues toutes les deux les choqueraient-ils ? Tout en y pensant, je ne pus détacher le regard de mon amie qui s'était mise nue sans pudeur, ne cherchant même pas à couvrir la petite bande de poils pubiens blonds foncé.

« Détends toi Émilie, on est entre filles. »

Elle se rapprocha de moi et enleva sans difficultés le bras qui me couvrait la poitrine. Je me laissai faire car dans le fond, elle avait raison. Elle me prit la main et la posa directement sur son sein, il était ferme et doux à la fois, elle fit la même chose avec le mien.

« Tu vois, murmura-t-elle, on est pareil. T'as pas à avoir honte de ton corps, tu es jolie. »

J'ignorais si ses paroles étaient sincères ou si c'était juste pour me mettre en confiance, lorsqu'elle approcha son visage du mien, je fermais les yeux. Ses lèvres douces vinrent une nouvelle fois se poser contre les miennes et de sa main libre, elle me plaqua contre elle, me maintenant par les fesses. Son corps était chaud, sa peau était infiniment douce, je me laissait totalement envahir par ce contact, ce baiser. Elle finit par se reculer, j'ouvris les yeux, complètement offerte à la vue de Mathilde qui souriait toujours.

« On va s'habiller, sinon ta mère risque de se demander ce qu'on fout ;

- On a qu'à fumer à la fenêtre, on allume une cigarette pour deux, si elle vient, elle ne restera pas.

- Parce que tu fumes souvent à poil à la fenêtre ? »

Je n'avais pas pensé à ce petit détail. Je passais rapidement la culotte et le soutien-gorge propre que je venais de préparer juste avant que mon amie n'arrive, je vis qu'elle en faisait autant puis enfila son short et remis son bustier. Je ne savais toujours pas quoi me mettre, hésitante devant la montagne de vêtements qui s'empilait dans mon placard. S'impatientant, Mathilde se plaça à côté de moi, me tenant par la taille, et se mit à regarder le contenu de ma garde-robe. Elle me ressortit le mini short rose pâle que j'avais mit la veille et un T-shirt blanc au col en V. Elle dut me voir rougir car elle me dit de ne pas être gênée, j'avais de jolies jambes et n'avais pas à les cacher. En regardant les baguettes qui me tenaient debout, je n'étais pas trop de son avis, elle me frappa la cuisse assez fort pour que je sente un petit picotement après avoir sursauté. Je m'habillai en vitesse et nous allâmes à la fenêtre pour fumer avant de partir. Je regardais le jardin sans vraiment le voir, perdue dans mes pensées tout en fumant le tube que mon amie venait de m'offrir, me demandant surtout si ''amie'' était le mot qui convenait pour désigner Mathilde. On ne pouvait pas parler d'amour à proprement parlé, on ne se côtoyait que depuis deux jours, même si elle avait des vues sur moi depuis pas mal de temps on dirait bien.

« Émilie ? Y'a quelqu'un aux commandes ? »

La voix de Mathilde me fit redescendre sur terre. Elle tenait son dessin à la main, et me regardait. Depuis combien de temps essayait-elle de me parler ?

« Oui ? Pardon, j'étais dans mes pensées. Tu disais ?

- Que sur le dessin je ne me suis pas trompée de grand chose. J'ai vu que tu étais dans la lune. Tu pensais à quoi ? »

J'aurai pu lui mentir, la vexer même si jamais je le souhaitais, mais au lieu de lui répondre que je pensais à Logan ou une bêtise de ce genre, je lui dis franchement.

« À toi. Toi et ce dessin justement. Comment as-tu pu reproduire mon visage au point où même mes parents me reconnaissent ?

- Ça fait quand même un an et demi qu'on se voit tous les jours presque... Enfin que moi je te vois. »

Elle venait de soulever un point crucial, il était vrai qu'avant ce vendredi, je savais qui elle était mais sans plus, juste une fille timide qui s'asseyait toujours dans le fond de la classe et qu'on entendait jamais. Je savais aussi que malgré ça, elle avait de bonnes notes. Mais j'aurai été incapable de la dessiner comme elle l'avait fait pour moi, même avec son talent.

« Ça fait deux ans que tu me mattes ? Sans jamais m'avoir parlé autrement que pour me demander un stylo ou une gomme ?

- On est pas du même monde, comment voulais tu qu'on soit amies ?

- Ah ? Et on est quoi là ? »

J'explosais sans raisons particulières, je ne criais pas ouvertement, la baie vitrée du salon devait être ouverte mais assez fort cependant pour faire reculer Mathilde.

« Si on est pas amies, je suis quoi ? Un jouet ? Un passe-temps ? Une distraction ?! »

Elle secouais rapidement la tête à chaque suggestions, me regardant avec ses grands yeux bleus.

« T'y es pas du tout Émilie, dit-elle faiblement. Je te parles pas de maintenant mais du début d'année ou l'an dernier. Tu aurais dit quoi si j'avais essayé de te parler ou de traîner avec toi hein ? »

Ce fut à son tour de hausser la voix, tout en restant discrète elle aussi, du mieux qu'elle put.

« Tu te serais dit ''Encore une nullos qui m'admire'' et tu aurais fait de moi ton petit toutou, comme vous l'avez fait l'an dernier avec Valérie. »

Elle venait de me calmer. Comment savait-elle pour Valérie ? C'était une fille qui voulait traîner dans notre groupe et il est vrai que nous avions fait les pestes avec cette malheureuse. Elle n'était pas dans ma classe, je ne la voyais donc que pendant les pauses mais deux filles de notre petit groupe composé d'élèves populaires s'amusaient à lui faire porter leur sac ou leur plateau repas à cette pauvre fille qui a vite quitter notre bande. J'aurai pu me défendre en disant que ce n'était pas mon état d'esprit, ce qui était vraiment le cas, mais comme les autres, j'ai su profiter des tournées générales forcées au distributeur, ou de cigarettes. Je ne pus que baisser la tête en signe de regret.

« Tu vois, reprit Mathilde, tu sais que j'ai raison. T'es peut-être pas la pire de votre bande de salopes, je dis pas ça mais quand vous êtes ensembles, vous vous prenez pour les reines du lycée, tu changes complètement. »

Je savais qu'elle avait raison, alors je continuais à rester tête basse.

« Donc j'ai préféré attendre mon heure. Ce fut long mais au moins je te découvre autrement qu'avec ta sale équipe. Ça me plait mieux. »

Nous avions fini notre cigarette depuis un moment, elle se rapprocha de moi et me prit par la taille. J'avais toujours la tête baissée, elle passa son index sous mon menton pour me forcer à la relever et m'embrassa. Nous étions toujours devant la fenêtre, elle sentait le tabac en plus de son habituel parfum mais je ne trouvais pas cela super désagréable. Un bruit dans le jardin me fit sursauté, Mathilde se recula pour voir elle aussi ce qui venait de faire ce bruit. Mon père venait de s'asseoir à la terrasse, son café à la main, il nous regardait, souriant. À ce moment, j'aurai voulu disparaître, et à voir les joues de mon amie, je n'étais pas la seule à être gênée, pourtant elle ne se démonta pas le moins du monde en demandant à mon père si elle aussi pouvait avoir un café à la terrasse. Je pensais, connaissant mon père, qu'il allait me demander de le faire, mais non, il se leva, toujours souriant, redressa deux chaises en guise d'invitation, et disparut de notre vue. Toute trace de gêne s'était effacée du visage de mon amie, son sourire habituel était de retour. Elle me fit un bisou sur les lèvres et partit rejoindre la terrasse, en prenant au passage sa boîte de tabac et son briquet. 

Jour de grève [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant