36- Face à facetime

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Je relâche la pression de mon pouce sur mon briquet et la flamme qui en émergeait disparait. Thibault libère mon poignet.

– T'as pas besoin de fumer.

– Pourquoi t'es déjà là? demandais-je en revérifiant l'heure sur mon téléphone.

– Pourquoi est-ce que tu changes de sujet?

– Parce que j'ai déjà eu cette conversation des centaines de fois. Le discours sur ma santé, tout ça... je connais.

– Il y a peut-être une raison si on te l'a autant répété! dit-il un petit sourire au coin des lèvres. Ce n'est peut-être pas que des conneries cette légende qui dit que "fumer tue"!

– Ouais, peut-être. Mais... comme tout bon fumeur sans argument qui se respecte j'imagine que je suis censée te répondre qu'on mourra tous un jour.

– Classique, répond-il.

Lui et moi se fixons sans relâche et je ne peux retenir le rictus au coin de ma bouche, parce que la situation m'amuse mais aussi parce que je suis plutôt contente de le voir devant moi. Juste pour lui faire plaisir je remets ma cigarette non-entamée dans son paquet et range le tout dans mon sac.

– Alors.. tu avais à me parler? je commence. C'est sûr qu'après deux semaines de silence radio tu dois avoir des sujets de conversation en stock.

– C'est un reproche?

– J'imagine que non. C'est vrai qu'on ne se doit rien tous les deux.

– Ah oui? il dit en glissant ses mains dans les poches de son jeans. Je hausse les épaules, alors il continue. Pourtant quelques souvenirs de notre dernière soirée m'amènent à penser qu'on avait plus ou moins entamé quelque chose tous les deux.

– Vraiment? Quoi alors?

– À toi de me le dire.

Je soupire à cette réponse. C'est exactement l'un des points les plus agaçants de notre façon de communiquer à lui et moi. On dit tout et rien à la fois; c'est toujours flou.

– C'est toujours pareil Thibault, je dis, finalement rien n'est clair.

– Quel est le souci?

– Le souci c'est que tu daignes ne plus donner aucun signe de vie pendant deux semaines après avoir passé des heures à m'embrasser en soirée. Permets-moi de me poser des questions! Qu'est-ce que tu veux au juste? Est-ce que je dois mettre tout ce qu'il s'est passé sur le compte de l'alcool? Parce que je peux le faire si tu me dis que tu regrettes!

– Je ne regrette pas. Si ce n'est...

– Si ce n'est quoi? je m'impatiente.

– Mon comportement.

Ses yeux me quittent pour regarder ailleurs, n'importe où tant que ce ne soit pas vers moi j'ai l'impression. Il semble tout à coup gêné. Je pense bien savoir à quoi il fait référence mais je préfère lui laisser le temps de le dire lui-même.

– J'ai beaucoup trop bu ce soir là.. J'suis allé trop loin avec toi, et je sais que tu n'en penses pas moins.

– Alors.. c'était à cause de l'alcool?

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