— Père ! Vous ne pouvez pas faire ça ! Ce n'est pas de sa faute ! cria désespérément Stultus.
— Tais-toi, spectre ! stoppa Satian. Mythia devra payer pour la mort de mon fils, et ce n'est pas toi qui pourras m'en empêcher.
Tandis que tout le groupe était parti chasser les ombres dans les étages supérieurs, Satian les avait suivis, discrètement et sûrement, attendant le moment opportun où il pourrait se retrouver seul face à Mythia. Stultus, depuis, avait fait tout son possible pour l'en dissuader, sans succès. C'est alors qu'ils croisèrent la route d'une ombre. Seul Stultus put l'apercevoir.
— Père, supplia-t-il, je vous en conjure, faites demi-tour. Un titan se trouve juste là.
Satian, cette fois-ci, se contenta simplement de l'ignorer. Le titan vit en l'apercevant une opportunité, un espoir que lui et les siens avaient perdu depuis longtemps : trouver un soldat puissant qui leur obéirait. Tout comme Mythia, Satian entendit une voix dans sa tête, qui lui susurra ces mots, tel un serpent, bien plus proche cette fois-ci :
— Tu sembles perdu, roi déchu. Serais-tu à la recherche de quelque chose ? Souhaiterais-tu posséder les pouvoirs d'un dieu ? L'immortalité... Vous autres humains, n'avez jamais assez de temps dans une seule vie pour accomplir votre vengeance, n'est-ce pas ?
— Qui êtes-vous ? demanda Satian tout haut.
— Japet, frère de Cronos.
Satian sembla d'abord prendre peur. Face à l'adversité, cette peur se transforma très vite en intérêt.
— Je vous écoute.
— C'est un contrat, expliqua Japet. Pendant cent ans, tu serviras sous nos ordres, et au-delà de ce délai, tu auras tout le temps que tu désires pour accomplir ta vengeance. Mais il y a toujours un prix à payer...
— Et lequel ? demanda Satian, prêt à tout accepter en cet instant.
— L'immortalité des dieux leur a été conférée par leur naissance, et s'est vue accordée à certains demi-dieux par leur puissance. Ceci, roi déchu, nous ne pouvons te l'offrir. Si tu acceptes, tu y perdras ton âme. Il ne te restera dans le cœur que ta vengeance. Tu combleras le manque qui sera le tien en te rassasiant de l'âme des autres.
Satian tomba des nues à ces derniers mots. Le monstre qu'Althæa se devait de créer à Lasiar commença lentement à prendre forme. Rien ne se déroulait différemment de ce qu'elle avait prévu initialement.
— Serai-je obligé de tuer pour vivre ?
— Non... répondit Japet. Les âmes des morts pourront te contenter. Tu devras cependant aller les trouver, avant qu'elles ne se frayent un chemin jusqu'aux enfers, et que Thanatos ou Macaria ne les emportent.
En entendant les paroles prononcées par son père, Stultus ne fit que s'agiter encore plus. C'était inutile, et sa panique ne faisait qu'amplifier la détermination de Satian.
— Par le Styx, je jure de vous prêter allégeance pour les cent ans à venir.
Stultus, horrifié, vit l'ombre se rapprocher de son père sans rien pouvoir y faire.
— Père ! Non ! Allez-vous-en !
Japet se fondit en lui et l'enveloppa d'une épaisse fumée noire. Figé, Satian ne put plus rien faire tandis que l'ombre le vidait de son âme. Stultus dut assister à sa métamorphose. Satian semblait dessécher à vue d'œil, ses cheveux perdant leur couleur, sa peau devenant blanche, sèche, craquelée, son visage se creusant, ses orbites semblant former deux immenses cavités sans fond. Il mourait, c'est la seule conclusion qui lui était venue à l'esprit, et il n'y avait absolument rien qu'il ait pu faire. Son état sembla finir par se stabiliser, et Stultus put apercevoir l'ombre qui sortait de son corps. À cet instant, Satian s'effondra au sol, se précipita vers lui.
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ALTHÆA - T.1 - La Mère des Cendres
FantasyLe jour de sa naissance, les rois du ciel et des enfers murmurèrent son nom, redoutant le retour des cendres. La mère dévastatrice qui avait plongé la Terre plus d'un an dans les ténèbres était à nouveau parmi eux. Cependant, son retour n'était qu'u...