J'ai mis plusieurs secondes avant de comprendre que le voyage avait commencé et que j'étais déjà à la traîne. Resserrant les sangles de mon sac à dos, je me suis élancé dans la direction où regardait la file avant que tout le monde ne disparaisse sous mes yeux. Je courrai à une vitesse que je trouvais raisonnable, mais j'ai constaté avec étonnement que je ne ressentais pas les sensations habituelles de la course dans mes jambes. J'ai essayé d'accélérer un peu le mouvement, encore un peu, et encore un peu. Jusqu'à que je comprenne ce dont Alicia voulait me parler au sujet de mes nouvelles capacités, et que par la même occasion je comprenne que les chasseresses ne se téléportaient pas. Elles courraient simplement à une vitesse tellement élevée qu'elles ne restaient dans mon champ de vision qu'une fraction de seconde.
Comment expliquer ce que je ressentais à cet instant ? En voilà une question difficile. J'avais déjà fait de la course avant, en sport ou simplement pour m'amuser avec mon chien. Je me revoyais contrôler toute mon attention sur les mouvements de mes jambes, jusqu'à arriver à la limite où mon corps n'était pas capable de bouger plus vite. Désormais, cette limite semblait avoir disparue. Le paysage autour de moi restait nettement visible malgré la vitesse, les arbres recouverts de neiges, les montagnes au loin, parfois un animal redressant les oreilles comme s'il sentait un danger sans pour autant avoir le temps de réagir avant que je ne disparaisse. Je ne m'étais jamais senti aussi libre de toute ma vie, tout me paraissait possible simplement parce que je pouvais courir vite.
Comme j'avais pris du retard sur les chasseresses, et également parce que je voulais voir à quelle vitesse je pouvais aller, j'ai essayé de piquer un sprint pour les rattraper. Mon expérience fut de courte durée car avant d'atteindre ma vitesse maximale, j'ai rejoins la colonne et j'ai dû ralentir en catastrophe pour ne pas rentrer dans la dernière du groupe. Ce faisant, elles m'ont encore distancé. J'ai fini par trouver un rythme raisonnable pour les rattraper et j'ai gardé ma place à l'arrière, calant ma vitesse sur la leur. Je sentais que je n'avais pas atteint mon maximum et l'envie de tester mes limites était délicieusement tentante, mais je ne voulais pas désobéir aux ordres d'Alicia, elle me faisait toujours un peu peur. J'ai donc prêté attention à ce qu'il y avait autour de moi, à commencer par la chasseresse qui se trouvait juste devant moi avec son louveteau.
Elle semblait avoir dans les quinze ans, ce n'était donc pas elle qui fixait la vitesse du groupe malgré le fait qu'elle soit à peine plus ancienne que moi. Je voyais pourtant bien qu'elle était presque à sa limite alors que j'avais l'impression de trottiner pour m'échauffer. Aria, qui elle avait suivi la file dès le début et n'avait pas eu les même problèmes que moi, semblait tenir le rythme. Je me suis demandé quels étaient les autres changements liés à ma condition de chasseur, et puis j'ai compris un peu tard que ma vue s'était améliorée. Je n'aurai jamais dû voir aussi distinctement le paysage autour de moi à cette vitesse, encore moins les obstacles que j'évitais sans même y penser ni modifier ma vitesse. J'ai fait la liste de ce qui avait changé chez moi : force, vitesse, agilité, perception.
J'étais peut être nul au tir à l'arc mais je m'étais élevé bien au delà de ma condition de mortel, et c'était pour le moins agréable. Nous avons fini par quitter les montagnes enneigées de l'Himalaya pour nous déplacer sur des terres rocheuses, sans croiser autre chose que quelques rares animaux. Alicia avait dit que l'on devait atteindre la Turquie avant la nuit et avec cette vitesse, ça ne me semblait plus si impossible. La course a duré pendant plusieurs heures, jusqu'à ce que le soleil atteigne son zénith et que j'ajoute l'endurance à la liste des améliorations que mon corps avait subit. Je ne savais pas exactement à quelle heure le soleil s'était levé, mais j'estimais notre temps de trajet à environ cinq heures. Cinq heures à courir à cette vitesse et je me sentais capable de continuer comme ça toute la journée même si le rythme accélérait.
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Disciples D'Artémis Livre 1 : Le Premier Chasseur
FantasiJe m'appelle Thomas. Ou plutôt je m'appelais Thomas, on me connaît aujourd'hui sous un autre nom. Avant, j'étais un simple étudiant qui galérait en cours, maintenant je suis un immortel qui galère tout court. Mon existence a changé au moment où j'au...