Chapitre 23

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Je suis resté au sol encore quelques longues minutes, mon corps parfois secoué de spasmes incontrôlables quand je repensais à la douleur que j'avais endurée. Je ne savais pas depuis combien de temps j'étais là mais visiblement ça n'inquiétait pas plus que ça les chasseresses, sinon l'une d'entre elles serait déjà venue me chercher, me trouvant par un quelconque moyen. J'ai fini par me redresser pour m'asseoir, m'accordant quelques minutes de plus pour récupérer encore un peu avant de repartir. Ne plus avoir à lutter pour pouvoir respirer faisait un bien fou, je prenais de grande bouffée d'air et un léger sourire est apparu sur mon visage malgré tout ce que je venais de subir. J'avais survécu et j'étais assez fier de moi, même si il n'y avait pas vraiment de quoi l'être. Le morceau de viande que je n'avais pas mangé était toujours au sol, délicieusement tentant mais je savais que je n'y toucherai plus, j'avais déjà atteint mon objectif. 

Abandonnant ce trésor si difficilement gagné, j'ai récupéré mon sac et je l'ai passé dans mon dos. Il m'a alors semblé plus serré mais je n'y ai pas vraiment accordé d'importance, me disant que j'avais dû tirer sur les sangles à un moment ou à un autre sans le remarquer. En même temps, un sac un peu trop serré n'était pas un très gros problème comparé à ce que je venais d'endurer. Je me suis relevé tout doucement, mes jambes avaient l'air de supporter mon poids et c'était tout ce dont j'avais besoin pour repartir. Glissant mes mains dans les poches du short que m'avait donné Cassiopée, qui au passage ressemblait beaucoup à un pyjama désormais couleur sang, j'ai commencé à marcher en direction de la clairière où j'avais laissé les chasseresses.

Bien avant d'arriver à l'endroit, l'odeur était déjà présente et dans mon état de fatigue j'ai failli vomir. Ces effluves faisait remonter tous les souvenirs de la bataille que j'avais en parti occulté après avoir enfin vaincu la douleur. Les cris, les coups d'épée et de haches, les morsures des loups et des chiens des enfers, et surtout le sang. Le sang partout, inondant la clairière et ruisselant sur les armes des monstres autant que sur la mienne, ainsi que sur mon corps. Sur mes cuisses il avait séché et viré au noir mais sur mes vêtements encore bien humide il gardait une couleur écarlate, je m'empêchais de baisser les yeux pour éviter de voir ça. Si j'avais été dans cet état deux semaines plus tôt j'aurai sûrement fait un malaise, mais depuis que j'avais décidé de me battre et d'adopter la philosophie du "manger ou être mangé" avec le lapin, j'arrivais à relativiser la gravité de mes actes. Ôter la vie n'est jamais une chose facile, même s'il s'agit de l'instinct de survie.

Arrivant finalement à la clairière, j'ai constaté que les cadavres avaient disparu. Ceux des monstres, ceux des loups mais aussi celui de la pauvre chasseresse qui était tombée. Plus personne n'était là, et je me demandais comment j'allais faire pour pouvoir les retrouver quand j'ai vu de la fumée dans le ciel, venant d'un peu plus loin. Je m'y suis dirigé, voyant mal qui d'autre que les chasseresses aurait pu être à l'origine de cette fumée alors qu'il venait d'y avoir une bataille juste ici. Accélérant légèrement le pas, j'ai fini par sortir de la forêt et j'ai retrouvé le groupe qui était rassemblé autour de ce qui ressemblait à un lit dévoré par les flammes. Je n'ai pas eu besoin de m'approcher plus près pour comprendre qu'il s'agissait d'un bûcher funéraire. A l'écart du groupe ce qui ressemblait à une petite colline était également en flamme, sûrement les cadavres des monstres que l'on avait rassemblé et empilé pour pouvoir détruire tous les corps.

Me désintéressant rapidement de ce feu là et sans me poser la question des corps des loups ainsi que de la raison de brûler tous les cadavres, j'ai remarqué un autre lit qu'Alicia se préparait à enflammer. Autour de moi, toutes les chasseresses arboraient un visage grave mais je savais qu'aucune autre de mon groupe n'était tombée pendant cette bataille. Ça signifiait que la chasseresse sur ce lit faisait partie des plus puissantes de ce camp, quelqu'un des premières lignes était tombé. Regardant rapidement le visage de chaque jeune fille autour de moi, mon cœur s'est serré quand j'ai vu qu'il manquait Cassiopée. M'approchant du lit, je l'ai vu allongée dessus, recouverte de sang et des blessures sur une grande partie du corps, ses bras et ses jambes lacérés de toute part. Ses cheveux châtains étaient maculés d'hémoglobine et son visage arborait une expression de totale neutralité.

Disciples D'Artémis Livre 1 : Le Premier ChasseurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant