Disciples D'Artémis Livre 1 : Le Premier Chasseur

Chapitre 20

La chasseresse était repartie aussi vite qu'elle était arrivée. Cassiopée avait lâché ma main et s'était ruée sur son armoire en marmonnant des mots que je n'ai pas compris. Embrasant l'une de ses mains pour éclairer la pièce, elle a saisi avec l'autre une barre rectangulaire de quelques centimètres de long qu'elle m'a lancé. Je l'ai rattrapée, reconnaissant une barre de céréales similaire à celle qu'elle m'avait déjà donné plus tôt dans la journée.

- Manges-en la moitié, pas plus ! C'était vraiment pas le moment, ça risque déjà de te tuer mais sans ça tu ne pourras jamais courir.

Comment ça, ça risquait de me tuer ? Je voyais pas trop en quoi l'abus de céréales pouvait être dangereux pour la santé, mais je me suis rappelé que dans ce monde rien n'était logique. Peut-être que mon organisme avait changé et que je ne supporterai plus de me remplir trois fois mon bol de chocapics tous les matins. Cassiopée était agitée, elle s'affairait à enfiler sa ceinture, son carquois déjà dans son dos, je me suis dit que ce n'était pas le bon moment pour discuter des bienfaits des céréales.

- Dépêches-toi ! a-t-elle repris. Manges et va récupérer tes affaires ! C'est pas le moment de traîner là !

Sans doute sous le coup de l'émotion, la moitié de son visage a pris feu et la voir dans cet état m'a sorti de ma torpeur. J'ai cassé la barre de céréales en deux, fourrant la moitié dans ma bouche et jetant l'autre sur la table en même temps que je me levais. J'avais encore un peu mal aux jambes mais la douleur s'estompait rapidement, remplacée par une sensation de chaleur plutôt intense, comme si moi aussi je commençais à brûler de l'intérieur. Passant outre, je me suis rué sur le sac de Cassiopée pour en sortir l'épée magique et mon bouclier, attrapant au passage l'épée qui m'avait servi lors de l'entraînement. Tout ce qu'il me manquait désormais c'était mon sac, et mon sang s'est glacé quand je me suis souvenu de l'endroit où je l'avais laissé. Dans la tente d'Alicia. Si jamais elle l'ouvrait... Ouvrant l'armoire de Cassiopée à la va-vite, j'en ai sorti un deuxième fourreau pour l'épée d'entraînement que j'ai ajouté à mon baudrier, sur ma droite, laissant l'épée magique côté gauche. Compte tenu du fait que j'étais droitier et que je tenais mon bouclier dans ma main gauche, il aurait été plus malin de placer l'épée que je pouvais manier du côté opposé mais je n'avais pas réfléchi à ça sur le moment.

Je suis sorti en trombe de la tente de Cassiopée, me dirigeant vers le centre du camp pour trouver la tente de la lieutenante. Sur mon passage j'ai croisé plusieurs chasseresses, occupées à replier leur tente, leurs cheveux emmêlés et une expression inquiète sur le visage. Je n'y ai accordé que peu d'importance, je n'avais toujours pas compris ce qu'il se passait et mon esprit n'était focalisé que sur une seule chose, mettre la main sur mon sac. Je me doutais qu'Alicia ne l'avait pas ouvert, sinon elle serait déjà venue me voir pour me parler, mais il fallait quand même que je reste sur mes gardes. Arrivant devant la tente de la lieutenante, j'ai remarqué que sa propriétaire n'était pas là. La toile était restée ouverte, je suis rentré et j'ai trouvé mon sac à l'endroit où je l'avais laissé. Jetant un bref coup d'œil à l'intérieur et constatant que tout était normal, mon stress a disparu, remplacé par un grand soulagement mais également par un léger pincement au cœur. J'avais conscience de faire quelque chose d'inapproprié. 

Au moment où je passais mon sac sur mon dos, un râle a retenti. Lointain, mais assez proche pour que je reconnaisse ce bruit encore trop présent dans ma mémoire pour qu'il me laisse indifférent. Le beuglement d'un minotaure. Je me suis souvenu de ce qu'avait dit la chasseresse en faisant irruption dans la tente de Cassiopée. Ils arrivent. Le camp était attaqué, et je ne m'en rendais compte que maintenant. Si ni Alicia ni son énorme animal n'étaient présents c'est qu'ils devaient déjà être sur le front, en train de ralentir les monstres pour protéger les autres chasseresses. J'étais tiraillé entre rejoindre le plus gros groupe ou aller lui prêter main forte, n'arrivant pas à déterminer la place où je serais le plus utile. Finalement ce n'est pas moi qui ai eu à faire ce choix, Cassiopée arrivant à côté de moi au moment où je sortais de la tente d'Alicia.