Et c'est ainsi que le lendemain matin, je me retrouve dans une rue non loin de chez moi, devant une maison au portail forgé portant une plaque au nom de famille de mon amie. Je me souviens en primaire, quand je venais à peine de la rencontrer. Je n'arrivais pas à le prononcer et je ne l'appelais presque jamais. J'étais assez frustré, parce que c'est la première à m'avoir approché. C'est peut-être pour ça que je suis tombé amoureux d'elle à ce moment. Parce que je sentais qu'elle était intéressée par moi — même si je me fourvoyais sur la manière.
Me collant un sourire sur les lèvres, je toque à la porte, tout en remettant bien mon t-shirt le long de mon bermuda bleu clair. Je ne me sens pas du tout stressé ou anxieux vis-à-vis de cette entrevue, parce que Daisy est mon amie et rien de plus. Et ça fait très sympa de se voir sans aucun sous-entendu.
— Bonjour, Madame, votre fille est là ?
— Oh, Valentin, ça me fait très plaisir de te voir ! Daisy m'avait prévenue que vous sortiez tous les deux aujourd'hui. Ça y est, tu t'es enfin décidé à lui déclarer ta flamme ?
— Il l'a fait maman, mais je l'ai remballé. Ce blond est comme mon frère, n'est-ce pas ? intervient Daisy en se passant un coup de baume à lèvres. On peut être une fille et un gars et être tout à fait amis.
— Carrément !
Je lui présente mon bras pour qu'elle s'y accroche et nous commençons notre déambulation.
— Je suis désolé si j'ai été violente avec ce que j'ai dit tout à l'heure avec ma mère. Mais elle commence sérieusement à me courir sur le haricot. Tout ça parce que je traine avec des gars, elle veut absolument me caser avec l'un d'eux. Surtout qu'elle a fait la gaffe en parlant de Harold qui aurait pu être mon « type » d'après elle et tout ça devant Kat !
— Tu devrais mettre le grappin sur ce Tanaka et le ramener chez toi, ça lui calmera ses ardeurs.
— Fous-toi de moi, va. M'enfin, je l'ai un peu cherché pendant le festival de musique. Impossible de lui mettre la main dessus.
Étrangement, ça ne me dérange plus tant que ça qu'elle m'en parle. J'ai envie de l'aider et de l'encourager.
— À la rentrée, tu n'auras qu'à aller dans sa classe. J'ai cru comprendre qu'il n'était pas mauvais en cours, tu n'auras qu'à demander de l'aide en biologie, vu que tu veux être médecin.
— Mais c'est une vachement bonne idée ça !
Je souris et me resserre contre elle, la charriant.
— Merci, ça me flatte.
— Et toi ?
Je la fixe de haut en bas en rougissant. Je dois être un panneau lumineux sur pattes. Tout d'orange vêtu.
— Quoi comment ça, et moi ? Je... je vis uniquement de course à pied, de Marato et de quelques notes de musique. Ah, et de couleurs aussi, comme je suis un arc-en-ciel.
— Kat m'a parlé de Curtis. Et puis, tu n'es pas discret, Valentin.
Je m'arrête, perdant subitement mon sourire.
— Quoi ? Mais elle avait promis !
— Alors tu ne démentis pas ?
Je baisse les yeux, les relève lentement. J'adore Daisy, mais j'ai peur de sa réaction. Même les personnes les plus adorables peuvent devenir de parfaits démons.
— Non. Ça ne sert à rien de te mentir, tu vas tout de suite comprendre. J'ai des flèches qui brillent tout autour de moi, de toute façon.
— Donc ? sourit-elle, les mains derrière le dos et ses cheveux roses coulants derrière son épaule.
— On... est ensemble lui et moi. Depuis le festival de musique. Enfin, c'est officiel depuis hier. Mais ne le raconte à personne s'il te plait, on a pas trop envie que ça s'ébruite.
— Pas de soucis. Je suis une tombe. Enfin, je peux le dire à Kat ?
Je ris, comprenant la contradiction de sa réplique.
— Bah, de toute façon, que je dise oui ou non, tu vas quand même le faire alors... vaut mieux que ce soit avec mon approbation. N'est-ce pas ?
Elle hoche vivement la tête et sourit de toutes ses dents. Continuant sur ce sujet, nous nous laissons porter par nos pas. La fin de l'été est toujours un moment intéressant à Belfast, puisque les touristes repartent par chez eux et que le vent nous rafraîchit doucement. Ça ne m'a jamais dérangé de ne pas partir. Parce que j'aime ma ville de tout mon cœur. Au creux d'une ruelle qui n'a rien de sombre, nous nous installons à la terrasse d'un café et commandons quelque chose de frais.
— Pourquoi ça ne m'étonne pas que tu prennes du jus d'orange ? me lance-t-elle en prenant une gorgée de limonade.
— Bah, parce que tu me connais bien ? Tu me connais depuis des années même. Et puis, j'adore cette couleur.
— Ça aurait été marrant que tu tombes amoureux d'une personne rousse. J'aurais bien ri en tout cas, continue-t-elle avec sa paille entre les lèvres. Enfin, c'est presque le cas, vu les cheveux rouges de ton copain. C'est... une orange sanguine, on va dire.
Je regarde le vague, avisant les glaçons qui fondent dans le verre devant moi. Les gouttes se condensent sous mes doigts.
— Je ne suis pas amoureux. Je suis une vraie guimauve qui fond, mais je ne sais pas, le je t'aime ne sort pas. Je vois qu'il m'apprécie et tout, mais ça ne vient pas. J'essaie de me dire que c'est tôt, mais avec toi, c'est venu tout seul. Et je ne pense pas que ça soit le fait que ce soit un garçon qui m'arrête.
— Je n'en ai aucune idée. Mais vous avez déjà parlé de vos sentiments ? Ou alors vous ne faites que vous galocher ?
Je rougis en me cachant le nez dans mon verre et la fixe de travers.
— Ton absence de réponse veut tout dire. C'est très chou, tu sais.
— Arrête de me charrier. Déjà que lui se fout de moi parce que je suis une tomate, n'en rajoute pas une couche, pitié !
— Y a aucun mal à ça, tu sais. Tant que vous appréciez tous les deux, tout va bien.
Elle me sourit une nouvelle fois et nous prenons une gorgée de nos boissons. Avant de manquer de tout recracher.
— C'est pas Kat et Harold là-haut ?

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Ciel de couleurs
Fiksi RemajaBleu, rouge, vert, jaune ou violet, toutes les couleurs conviennent à Valentin, tant qu'elles ne sont pas grises et ternes. Mais lorsque les sentiments s'en mêlent, le tout fait un sacré mélange. Comme un arc-en-ciel. Spin-off de Ciel d'été