Rouge à carreaux

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 Ce matin, le réveil est compliqué. Je grogne sous ma couette, ouvre un œil puis deux. Le réveil annonce six heures trente. Décidant qu'il est bien trop tôt pour arriver dans le salon, j'attrape mon téléphone et avise l'écran qui clignote furieusement.

From : Mon chéri

Subject : Une bonne dose d'encouragement

Je sais qu'il est très tôt et que tu ne verras sans doute pas ce message avant longtemps, mais je te souhaite bon courage pour cette journée en compagnie de tes professeurs détestables. Si tu le désires, nous pourrons nous téléphoner après le dîner de ce soir pour que tu me racontes ta journée. Il n'y a aucune obligation là-dessus.

Je le relis deux ou trois fois, je ne sais pas vraiment. Mes joues chauffent et je sens tout mon corps se détendre, comme du caramel. Je souris béatement devant le clavier béant du portable, avant de m'empresser de répondre, en essayant de ne pas être trop niais.

> Toi aussi passes une bonne journée ! J'espère qu'il y aura beaucoup de rire et de sourire et que tu seras heureux de retrouver tes amis. Pour ce soir, je suis complètement okay, ça me fera vraiment du bien d'entendre ta voix, à défaut qu'on aille dans le même lycée. En tout cas, sache qu'un message pareil en se réveillant, ça change la donne. Merci beaucoup Curtis !

Revigoré par quelques mots sur un écran, je saute de mon lit et déboule dans la cuisine aux côtés de mes parents. Mon père est déjà en costume et sirote un café, ma mère fait la tête devant son verre de jus d'orange. Moi, j'arrive tel un soleil irradiant de vie et de sourire.

— Un jour, il faudra m'expliquer d'où tu sors Valentin. On ne peut décidément pas être tes parents. Tu es beaucoup trop énergique le matin pour être issu de nous, baragouine ma mère en dardant ses yeux bleus vers moi.

Je vais claquer un baiser sur leurs joues et m'installe à ma place, décidant que pour une fois, je vais avaler une bonne portion de céréales au chocolat.

— C'est marrant ça, ça me fait penser à Charles. Il est complètement accro aux Chocapics. Je me demande bien comment il va. Faudrait qu'on se voie un de ces week-ends. Bah tiens d'ailleurs, ça ne te dirait pas de les inviter avec son père pour manger un bœuf bourguignon dimanche midi ?

Et là, arrêt sur image. Les deux adultes me fixent comme ce n'est pas pensable et manquent de s'étouffer avec leur boisson respective.

— Qu'est-ce qu'il y a ? J'ai dit une bêtise ?

Mon père dépose sa tasse vide et pose une main sur mon épaule. Je n'ai jamais été très à l'aise quand il fait ça.

— Écoute Valentin, on ne sait pas trop comment te l'annoncer, mais... ton cousin est à l'hôpital depuis fin avril. Il... il a fait une crise et les médecins ont préféré le garder pour que ses médicaments fassent parfaitement effet sur lui.

— Hein ? Mais depuis quand vous le savez ? Pourquoi vous m'avez rien dit ?

— Ce n'est pas facile à annoncer comme nouvelle. Il a tout de même voulu sauter de la fenêtre en croyant pouvoir s'envoler. Comment veux-tu réagir par rapport à ça ?

— Ne pas le shooter comme un zombi. Charles va dépérir s'il n'a plus la sensation de vivre. Comment sa mère a pu laisser faire ça ?

— Ses parents étaient d'accord pour une fois. C'est pour son bien. Et il n'est pas abruti par les médicaments.

Je claque mon poing de rage sur la table, ce qui fait déborder le lait de mon bol.

— Je vais le voir. À la sortie des cours. Il est dans quel hôpital ?

Ciel de couleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant