L'homme est ingrat

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L'homme est ingrat.

"Il y eut la peste, le sida frappe très fort, mais la connerie humaine a battu tous les records."

Elle se retourne, le visage défiguré. Un violet entoure son œil. Je crois bien que qui s'agit d'un cocard. La voir dans cet état-là me chagrine. J'hésite à lui demander la raison de cette blessure, même s'il n'existe aucune raison valable pour lever la main sur elle. Elle est si douce, gentille et patiente. Elle en a tellement bavé dans sa vie que tu n'oserais même pas hausser le ton sur elle. Je la reluque tout en répliquant et surtout en évitant de fixer son œil.

"Salem Jennah ! Comment tu vas ?"

"Ça va hamdoullilah et toi ?"

"Moi ça va hamdoulilah c'est à toi qui faut poser la question ! Qu'est-ce qui t'est arrivé ?"

"Rien ! T'inquiète c'est rien de grave."

"Tu sais Jennah tu peux me faire confiance. Leyna c'était comme ma sœur donc toi aussi je te considère tel quel. Alors dis-moi qui t'a fait ça ?"

"C'est trop long à expliquer Salim."

"Tu sais quoi je commande les menus, comme ça on en parle en mangeant."

"Ok ça marche."

Je prends les menus, on s'installe. Bien sûr j'envoie un message à Lina afin qu'elle ne s'inquiète pas.

Jennah commence à manger sans dire un mot. Je la reluque avec insistance et rétorque :

"Alors dis-moi tout Jennah ?"

"Je sais même pas, par où commencer !"

"Par le commencement déjà ça serait bien !" {Dis-je, d'un air taquin.}

Elle esquisse un sourire et riposte :

"Enfaite mon ex-mari se saoulait trop c'est pour ça que je suis parti. Je lui ai enlevé la garde de Lya. Quand il a appris ça, il m'a retrouvé. Il n'a pas supporté l'idée de ne plus voir sa fille. Il s'est rendu chez moi complément ivre et il a commencé à me frapper."

"Putain mais c'est quoi ces fils de **** qui ne savent pas porter leur ****. Je me retiens de l'insulter par respect pour les mômes."

Sérieusement c'est quoi ces mecs qui ne savent pas porter leurs burnes. C'est dingue j'ai vu plus d'humanité chez les animaux que d'animosité chez les humains. Insensé, la populace est dingue. Le monde part en cacahuète.

Elle baisse la tête, tout en relâchant ses épaules et riposte d'un air lugubre :

"Je sais même plus où aller. Il a mon adresse maintenant."

"Tu sais quoi vous allez venir à la maison toi et Lya."

"Non Salim t'inquiète, je vais aller à l'hôtel, en attendant de trouver un autre appart."

"Non Jennah vient chez moi j'insiste. Vous serez plus en sécurité."

"Non Salim ça me touche du fond du cœur, mais je vais pas venir vous déranger. C'est un non définitif."

"Comme tu veux, mais sache que ma porte te sera toujours ouverte."

"J'en ai de la chance de t'avoir croisé. T'es vraiment quelqu'un de bien mash'Allah. Que Dieu te préserve amine."

"Amine ! Barak allah oufik. Par conte je connais un endroit où tu pourrais aller."

"Ah oui je veux bien une adresse fiable d'hôtel et qui coûte pas trop cher."

"T'inquiète là c'est complément gratuit. Tu te rappelles de mon pote Mehdi ?"

"Oui comment ne pas me rappeler de lui. Il m'a tellement bouleversé. D'ailleurs comment va-t-il ?"

"Ça va, il va beaucoup mieux depuis hamdoullialh. Écoute si tu veux, lui il peut vous héberger et vous serez en sécurité chez lui."

"Oh non je vais pas cohabiter avec un homme seul."

"T'inquiète tu ne le verras presque jamais, il rentre chez lui que le soir, seulement pour dormir, en plus sa baraque est tellement grande que vous vous croiserez même pas."

"D'accord je te fais confiance. J'ai besoin de mettre à l'abri Lya et je t'avouerais que la présence d'un homme me rassure, surtout la nuit. Qu'il s'en prenne à moi c'est pas grave, mais pas à ma fille."

"Non Jennah il n'a pas à lever la main sur toi. Personne n'a le droit de le faire. Tu devrais porter plainte."

"Je sais Salim, mais pour l'instant j'ai pas la force."

Je n'ose pas la brusquait, elle souffre assez. Alors je riposte :

"Comme tu veux, quand tu seras prête fait moi signe, je t'accompagnerais au comico insh'Allah."

"T'inquiète en tout cas merci pour tout."

"Pas de soucis. Ne me remercie pas, chez moi la famille on la laisse pas dans la merde."

"Ça me touche tellement."

"T'inquiète c'est normal. Si vous avez fini de manger on y va. Tu me suis en voiture, comme ça je t'accompagne chez Mehdi."

"Oui d'accord."

"Je vais lui téléphoner pour le prévenir. Wadyl tu restes avec Tata." {Dis-je, tout en me levant et en appelant Mehdi.}

"Allo lim-sa, je te manque déjà ?" {Dit-il, en prenant une voix de chaudasse.}

"Mdr t'a vraiment serré frère. Non en sah je t'appelle pour que tu me rendre un service. J'ai besoin de toi frère !"

"Toujours là pour mon gars sûr. Que puis-je faire pour toi ?"

"Tu te rappelles de Jennah ?"

Plus aucun son ne sort, seuls les grésillements de la tonalité raisonnent. Alors je riposte :

"Allo frère t'es toujours là ?"

"Ouais ouais toujours. Oui je me rappelle d'elle ! Pourquoi ?"

Je n'ose pas rentrer dans les détails, c'est trop de mauvais souvenirs. Je ne voudrais pas rouvrir sa plaie.

"Elle est en galère avec sa petite fille. tu pourrais l'héberger chez toi le temps qu'elle trouve un logement ?"

"Ouais t'inquiète frère pas de soucis."

"Ok ben on arrive là insh'Allah."

"Ça marche frère."

Mehdi c'est un gars bon, toujours là pour aider. Tellement généreux, je ne sais pas comment j'ai pu douter de sa sincérité. Il est celui qui surveille mes arrières, je peux compter sur lui, dans n'importe quelle galère il tirera pour moi.

Je passe vite fait un coup de fil à Lina pour la prévenir de mon retard. Je lui expliquerais tout en rentrant.

Je retourne à la table pour les récupérer. Jennah me tend un billet tout en rétorquant :

"Tiens Salim c'est pour les menus."

"Qu'est-ce que tu fais là. Ça va pas ou quoi range-moi ça ! C'est moi qui invite."

"Non j'insiste prend-les."

"Non wollah je les prends pas. Écoute t'as refusé de venir chez moi, alors je refuse ton argent aussi. Comme ça on est quitte." {Dis-je, tout en la taquinant.}

Jamais de la vie je prendrais l'argent d'une femme. Elle me reluque avec insistance et riposte :

"D'accord, ben quand j'aurais mon apparement insh'Allah vous viendrez manger à la maison."

"Avec plaisir insh'Allah. Bon allez on y va la mif."

On prend la route, direction chez Mehdi...

Force et honneur Où les histoires vivent. Découvrez maintenant