Chapitre 9

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Mon portable vibre. La réponse ne tarde pas. « C'est Théo ». Je reste sans voix. Je relis le message plusieurs fois. J'ai du mal saisir le sens de ces mots. Théo... Le Théo de Margaux ? Non c'est pas possible. Je creuse ma mémoire dans l'espoir de trouver une autre personne de ma connaissance qui portait le même prénom. Sauf que je ne connais qu'un seul Théo... Je continue à fixer le message, dans l'espoir de voir apparaître ma sœur qui pourrait me dire comment ce presque inconnu a eu mon numéro, comment il sait comment je m'appelle. Mais non, aucune apparition miraculeuse... C'est étonnant... Je m'allonge dans l'herbe et me mets à pleurer... Mon portable revibre. «J'espère que tu te souviens de moi... J'aimerai qu'on se rencontre si c'est possible. Mais je peux comprendre si tu ne veux pas... »

Je reste toujours interdite. Seules mes larmes sont en mouvement. Elles glissent lentement, et une fois arrivées au milieu de ma joue, elles terminent leur course sur mon short. De petites taches apparaissent sur le tissu. Je ne veux pas. Je préfère avancer avec ce qui me reste de Margaux, et non pas avec son passé. Voilà ce que je vais lui répondre. Je sais qu'il pourra comprendre. Je sais que je devrai lui expliquer, lui donner une raison plus claire, même si celle-ci résume déjà bien la situation. Je l'aimais bien ce petit Théo, même si je ne l'ai jamais vu. Il a su rendre ma sœur heureuse, et pour ça, je ne le remercierai jamais assez. On avait décidé tous les deux de se rencontrer, mais après la mort de Margaux, mais ce plan est tombé à l'eau... Il n'est même pas venu à son enterrement... Je sais que je pourrai me confier à lui, mais je ne préfère pas. Peut-être que je suis jalouse. Oui sûrement... Ça a été la dernière personne à avoir vu Margaux. Je l'ai déjà dit, mais les trois derniers mois, personne n'a eu le droit de la voir, à part lui, car ils étaient dans le même service, et qu'il n'était pas sûr de survivre... Aujourd'hui, je ne sais pas ce qu'il devient. Jusqu'à présent, je ne savais même pas qu'il était en vie. Mais, j'espère pour lui, qu'il est guéri, et qu'il y a peu de chances pour qu'il soit de nouveau malade. Je sais, c'est ridicule, mais je lui en veux d'avoir pu la serrer dans ses bras quand elle allait mal, de la consoler, et toutes les choses que j'aurais pu faire si elle m'avait laissé la voir. Peut-être que c'est mieux ainsi. Je préfère garder une image de Margaux en pleine santé, souriante, qu'une image de Margaux dans un lit d'hôpital, sans vie. Bref, tout ça pour dire qu'il y a trop de non-dits entre nous, et donc c'est pour ça que je préfère avancer sans lui. Il sait trop de choses que je ne veux pas savoir. Ce serait trop douloureux. Pour l'instant, je me contente de lire le livre de Margaux. Après on avisera avec ce qu'il me reste... J'ai peur de perdre tout ce qu'il me restait comme insouciance... Je redoute le moment où je saurai toute la vérité. Je sais que j'aurai du mal à me relever. Dans tous les cas, ça sera très dur à supporter. C'est comme si elle mourrait deux fois. Mieux vaut continuer de sourire et de ne pas y penser... La première fois m'a littéralement anéanti, alors imaginez la deuxième. 

Et moi, j'ai dû rester...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant