Mon père a toujours su me rassurer. C'est un battant, un homme qui ne se laisse pas faire. Je ne comprends pas pourquoi ma mère l'a quitté. À moins que ce soit lui qui l'ai quittée... Je ne sais pas, et au fond, ça ne change pas grand chose...
Il est à peine onze heures. Demain, à cette heure, là, je serais sûrement en cours, à chercher le meilleur moyen de faire passer le temps plus vite. Je n'ai pas envie. Mais bon, il vaut mieux que je profite de cette dernière journée de vacances ! Je vais redisposer le téléphone sur son socle. J'aperçois ma mère, dans la cuisine, qui me regarde du coin de l'œil. Elle détourne la tête quand je la regarde à mon tour.
« Comment va ton père ? se sent-elle obliger de demander.
- Ça avait l'air de plutôt bien aller, je réponds. Il m'appelait pour me rassurer et me prévenir qu'il rappellerait demain sur mon portable pour avoir tous les détails de ma rentrée.
- D'accord, c'est sympa de sa part non ?
- Oui, c'est gentil, mais, entre la rentrée de l'année dernière et cette année... je soupire.
- Je sais Aude, souffle ma mère, en me coupant dans mon élan de reproches. Il t'a dit quand tu pourrais aller chez lui ?
- Non, on n'en n'a pas parlé, mais je lui demanderais demain si tu veux.
- Oui, parce que tu sais que vendredi soir, nous avons un repas chez la sœur de Patrick, et je voulais savoir si tu comptais y aller ou pas.
- Non, je m'exclame, en retenant presqu'une grimace de dégoût. Tu sais très bien que j'ai horreur des repas de famille, surtout lorsque ce n'est pas la mienne.-
Je sais Aude, c'est pour ça que je n'ai pas dit oui à ta place ! Demande lui si je peux t'emmener vendredi après le lycée. Comme ça, tu passerais le week-end avec lui, et tu reviendrais le dimanche soir.
- On dirait que tu veux me caser pour être tranquille, je m'énerve.
- Mais non Aude ! J'essaie juste de voir ce qu'il y a de mieux pour toi.»
Ma mère lève les yeux au ciel, sûrement excédée par mon impulsivité. Je n'y peux rien. Je ne supporte plus les repas de famille depuis que Margaux est partie, alors en plus, avec la famille de mon beau-père, merci bien, mais je m'en passerai. Ce n'est pas que je ne les aime pas, ils sont gentils, mais, voilà, ils ont pris la place de la famille de mon père. Et inversement, je n'aime pas rencontrer la famille de ma belle-mère, parce qu'elle a pris la place de celle de ma mère. C'est compliqué, tout ça pour dire, que je n'irai pas. Je préfère de loin aller chez mon père, même si je n'y ai pas forcément ma place non plus.
« Ça te dit barbecue ce midi ? me demande ma mère, le sourire aux lèvres, comme si de rien n'était.
- Mmh, oui, si vous voulez.
- Tant mieux ! Bon aller, va prendre ta douche, et je te prierai de mettre le couvert après.
- Ok. »
Je remonte dans ma chambre, sans avoir pris mon petit déjeuner. De toutes façons, je n'ai pas très faim, et les barbecues sont toujours colossales, alors, autant crever de faim pour engloutir le plus de nourriture possible et ainsi faire bonne figure. Je suppose qu'il y aura sûrement quelques voisins, comme tous les dimanches. Raison de plus pour faire bonne impression. Je crois que je commence à avoir l'habitude. Ça ne devrait donc pas me poser trop de problèmes.
Dans ma chambre, tout est à sa place. Ça me fait plaisir. J'ai fait le grand ménage. Certes, il n'y avait pas de réel bazar, mais, j'ai rangé mes cours de seconde. Ça a été un peu douloureux, car j'ai retrouvé des souvenirs d'avant un peu partout. Mon sac m'attend bien sagement dans un coin, et ma valise de chez mon père aussi. Je ne sais pas quand je vais changer de maison, mais au moins, ce sera fait. Je vais allumer mon portable. Une tonne de messages le fait vibrer. Je les parcours rapidement.
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Et moi, j'ai dû rester...
JugendliteraturOn n'a pas tous la chance de survivre. Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas, loin de là. Margaux est partie, et Aude a dû rester. Mais comment faire pour vivre sans sa sœur chérie ? Aude n'a jamais demandé de rester. Sauf qu'elle n'a pas eu le choi...