Je me sens déjà mieux. Les souvenirs de ce week-end que nous avions passé tous les trois... C'était juste dément ! Les images défilent dans ma tête... Je parcours à nouveau la page, prise soudain d'un doute. J'étais sûre que j'avais passé ce week-end avec Margaux et Maxence... Mais c'était Théo... J'écarquille les yeux ! Moi qui ai affirmé que je n'avais jamais eu la chance de voir ce charmant garçon ! J'ai donc passé pas mal de temps en compagnie d'un mec que je croyais être un autre ! Ça veut dire que je n'ai jamais vu Maxence ! Et pendant ces trois jours, ma sœur et Théo s'étaient clairement affichés en couple... J'ai soit dû louper un épisode, soit Margaux et lui m'ont menti. Peut-être qu'elle ne me racontait pas tout en fait... Je ne lui en veux pas. Je ne peux pas l'empêcher d'avoir ses petits secrets. N'empêche que ça me blesse... Je veux comprendre !
« Aude ? » m'appelle ma mère.
Je relève mes yeux tous gonflés. Elle n'a pas l'air d'y prêter attention.
« Je peux savoir pourquoi mon salon est ravagé ?»
Oups, elle va me fâcher, je le sens. Hors de question que je me laisse marcher dessus. Margaux me disait souvent que ma franchise était l'un de mes plus gros défauts. Je suis entièrement d'accord avec elle. Je dis tout ce qui me passe par la tête, sans forcément mesurer l'ampleur de ma méchanceté et de la débilité de mes paroles, que je vais finir par regretter.
« Je te parle Aude ! » s'écrie ma mère.
Je la fixe dans les yeux. Elle soutient mon regard.
« Je peux savoir pourquoi tu as foutu toute ma vie en l'air ? » je demande sur le même ton.
C'est la douche froide pour elle. Je reviens toujours sur les mêmes sujets, pour bien sûr, avoir une réponse, que je connais sûrement déjà.
« Je ne te parle pas de ça ! Arrête de toujours tout mettre sur mon dos ! Il faudrait que tu apprennes à contrôler ta colère, crie t-elle plus fort, pour m'intimider.
- Et toi ton égoïste. » je rajoute, d'un ton anormalement calme.
Je vois bien que j'ai tapé dans le mille. Ma mère va partir, en agitant son drapeau blanc, j'en suis presque sûre.
« Tu es de plus en plus insolente Aude. Tu mériterais d'être punie de sortie, m'assène t-elle, en croyant me toucher.
- Très bien, punie moi, puisque c'est ton seul moyen de me contrôler.
- Aude... »
Je lui coupe la parole, incapable de la fermer. On m'a toujours reproché de perdre mon sang froid rapidement.
« Tu essaies à toux prix de reprendre une place dans ma vie. Ce que tu ne comprends pas, c'est que je peux me débrouiller seule. D'ailleurs, en ce moment même, je suis seule parce ce n'est pas avec ton égoïsme et les mensonges de Papa que vous allez me rendre heureuse. Je peux te dire que c'est votre divorce qui m'a pourri la vie. Alors, si tu veux me rendre heureuse, lâche moi une bonne fois pour toutes ! »
Aucune réponse. Ma mère sort de la chambre, avec la tête la plus haute possible. Tant pis pour elle. Elle l'a cherché. Je l'imagine descendre les marches, et tomber en pleurs dans les bras de son foutu nouveau mari. Au fond, je m'en veux. J'aimerai pourvoir revenir dans le temps, réparer les erreurs que j'ai faite, faire ce que je n'ai pas pu faire, réfléchir avant de parler... Au collège, en quatrième, je me souviens que ma prof de français nous avait donné un questionnaire en début d'année, assez particulier. Par exemple, elle nous avait demandé quel pourvoir magique est-ce qu'on aimerait avoir. Sur le coup, j'avais répondu voler, et puis, j'avais remplacé par « pourvoir remonter dans le temps ». Je l'ai tellement aimée cette prof. Elle a su révéler en moi cette sensibilité, cette passion pour la littérature. Et puis, elle m'aimait bien aussi. À la fin de l'année, j'étais très triste de la voir partir. Elle m'a serré dans ses bras, et m'a dit de ne jamais baisser les bras. Son sourire a essuyé mes larmes, et je ne l'ai plus jamais revue. Je la regrette, mais sa passion pour son métier me hante toujours. Margaux était très jalouse. Elle aurait mérité de l'avoir. Cette prof aurait pu l'aider à faire exploiter son talent à sa juste valeur. Margaux était la fille la plus littéraire que je connaisse. Son potentiel était énorme. Je ne dis pas ça parce que c'était (encore du passé...) ma sœur : elle avait vraiment un don. Dommage qu'elle nous ait quitté trop tôt. Peut-être que si un jour, j'ai le courage, je me replongerai dans tous ses écrits, et j'en ferai un petit livre, histoire de laisser une trace de son talent. Je sais que c'est ce qu'elle a toujours rêvé : écrire une histoire, avec ses personnes et leurs soucis, sa vision de la vie.
Je m'allonge sur mon lit. Je n'ai pas la force de me mettre en pyjama, donc, je me glisse sous ma couette bien chaude en sous-vêtements.
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Et moi, j'ai dû rester...
Teen FictionOn n'a pas tous la chance de survivre. Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas, loin de là. Margaux est partie, et Aude a dû rester. Mais comment faire pour vivre sans sa sœur chérie ? Aude n'a jamais demandé de rester. Sauf qu'elle n'a pas eu le choi...