21) Changements

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Les Mondiaux signifiaient la fin de la saison et tous les patineurs du Club purent faire une pause

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Les Mondiaux signifiaient la fin de la saison et tous les patineurs du Club purent faire une pause. La plupart repartait dans leurs familles et ceux habitant Toronto se contentaient de venir moins souvent pour se reposer.

Javier ne fit pas exception et repartit en Espagne pour deux semaines, tandis que je restais au Canada. Le Japon était quand même très loin et je n’avais pas vraiment quelqu’un qui m’attendait là-bas : j’avais vu mes quelques amis lors des passages de compétitions dans le pays ou pendant les spectacles sur glace… Même si j’avais eu envie de rentrer, ma mère aurait refusé en avançant que je ne pouvais pas perdre de temps sur mon entraînement.

Brian m’accueillait donc le plus souvent dans son bureau pour discuter et me rappeler de ne pas faire de sauts si j’allais sur la glace. Il fallait que mes muscles se reposent un peu et ne pas prendre de risques inutiles. Cette espèce d’inactivité me donna du temps pour réfléchir.

Déjà aux changements de mon corps que j’avais du mal à suivre, et je ne parle pas de la puberté : il m’arrivait de plus en plus de me réveiller sous forme hybride, une pochette de sang par mois ne me suffisait absolument plus, les sons, les odeurs, les couleurs m’agressaient et me donnaient mal à la tête, j’en devenais irritable. A cause de mes sautes d’humeur, j’avais même grogné sur ma mère un soir où elle avait été particulièrement méprisante et où ma journée avait été longue. Je ne sais pas lequel de nous deux a été le plus surpris de ma réaction mais je me suis rapidement enfermé dans ma chambre en paniquant. Lorsque j’avais été dans la salle de bain, mon horreur avait encore grandi davantage en voyant que mes oreilles étaient sorties, bien que dissimulées par mes cheveux en bataille… J’avais ensuite passé ma nuit sur l’ordinateur, refaisant les recherches mille fois répétées pour comprendre mon état et comme les fois précédentes, rien n’était vraiment ressorti, à part peut être une fatigue plus intense.

Plus jeune, j’avais pensé à un syndrome exceptionnellement développé et dérivé de lycanthropie mais aucun des sites consultés ne parlaient d’ailes, de soif de sang ou de capacité à contrôler la glace, évidemment. Mes recherches s’étaient inévitablement tournées vers le surnaturel et même là, rien ne collait parfaitement à mon cas. Pour le sang : vampire, ça c’était facile, pour les oreilles et la queue : Neko ? Chat-Garous ? Hybride ?, pour les ailes : Anges ? Démons ? Machins célestes quelconques ?

Dans tous les livres que j’avais lu, le héros découvrait soudain une capacité ou un pouvoir et ne comprenait pas ce qui se passait alors que ça crevait les yeux : ça me donnait envie de lui taper dessus… Tu ne te vois plus dans un miroir, tu bois du sang et des canines poussent : inutile de chercher pendant cinq tomes pour savoir le problème.

Pourquoi ce n’était pas pareil pour moi ? Une malédiction de naissance ?

Ça me désespérait de ne pas savoir ce que j’étais, peut être même plus que le fait de l’être. J’avais réussi à réellement me reconnaître dans un personnage grâce à un manga* que j’avais ouvert complètement au hasard : le protagoniste n’avait pas tant de point commun avec moi sur la forme, mais pour le fond, je m’étais assimilé à son histoire avec une force inattendue. Des certitudes qui s’écroulent, une nouvelle réalité, une recherche d’identité qui semble vaine, et surtout la solitude malgré son entourage : tout y était… Le problème, c’est que la trame n’était franchement pas joyeuse et que ça me déprimait de voir des similitudes entre ma vie et celle d’un dévoreur d’humain plus ou moins instable psychiquement...

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