Lonely is so lonely alone

Chapitre 30 : Mystérieux secrets

Je m'ennuie. J'ai seulement une seule hâte, c'est de rentrer chez moi et de retrouver Lola.
Les cours m'ennuient, les gens m'ennuient. Je veux profiter de cette nouvelle expérience : être grand frère. Ce n'est pas donné à tout le monde de le devenir et j'étais le premier à en être convaincu puisque j'occupais le plat statut de fils unique. Rien de palpitant, rien d'intéressant ou de formateur. C'est presque un fardeau de vivre son enfance sans aucune fratrie. J'ai souvent entendu que j'étais un enfant un peu capricieux et prétentieux. Même si j'ai toujours vu cette dernière remarque comme une qualité chez moi. C'est ce que j'appelle avoir de l'ambition et savoir avoir confiance en soi.
Mais à quoi tout cela rime si je ne connais pas et ne comprends pas la notion de partage ? Heureusement que Bill a réussi à me transmettre ce don de complicité, à me faire sourire et à m'entraîner dans des aventures plus que douteuses lorsque nous avions encore nos joues roses et rebondies d'enfant. Bien qu'il ait été un pilier pendant mon enfance et qu'il soit comme un frère pour moi, ce petit "comme", ce foutu mot faisait toute la différence.

Vraiment, ma vie était ennuyante avant son arrivée à la maison. Le vide que laissait mes parents était à présent comblé par sa présence et ça me rendait heureux.

Par ailleurs, ce cher ami Ennui est venu s'installer dans la salle de français. Et plus précisément juste à côté de moi, à la place de mon fantôme de voisin.
Je me demande bien ce qu'il fait. Le cours a déjà débuté depuis un moment...

Soudain, un raclement strident de chaise démange mes oreilles. Je n'avais même pas vu le muet rentrer.
Chassé, Ennui semble se faire tout petit lorsque Curiosité prend le dessus et s'empare irrémédiablement de mes lèvres.
Abasourdi par ma propre réaction, je tente de sceller à jamais ma bouche. Je viens quand même de lui demander s'il allait bien. Et de me prendre un vent monumental. Voir même intergalactique. Je vous jure ça m'a refroidi. Il est vraiment chiant de m'ignorer comme ça. C'est pas compliqué quoi, d'être un minimum sociable dans la vie ! Il suffit d'ouvrir la bouche, de dire "Bonjour", de faire un signe de la main ou même de sourire ! Rien de difficile.
Mais lui, faut toujours qu'il tire la tronche en refusant d'exprimer oralement quoique ce soit. C'est relou. Il peut faire croire à qui il veut que son mutisme le suit depuis sa naissance, mais pas à moi. Je sais qu'il est entièrement capable de sortir un son. D'aligner deux syllabes. De faire une phrase.
Je ne lâcherai pas l'affaire. C'est peut-être puéril de ma part mais je VEUX le faire parler. Le faire RÉAGIR un peu dans la vie. Parce que franchement, avoir un voisin de classe qui ressemble à un chamallow mollo c'est pas très flatteur. Enfin, c'est pour lui que je dis ça. Déjà qu'il n'a pas une réputation à faire rougir certains, ça doit encore moins l'aider d'être assis à côté d'un des mecs le plus beau de la classe. Et puis, s'il pouvait être un peu plus actif ça m'éviterai de passer des heures à m'ennuyer.

Je décide de le secouer un peu, pour voir si ses nerfs sont connectés dans son cerveau ou bien complètement fondus.

- Mec, t'es bouché des oreilles ou quoi ?

Comme une guimauve, le muet se laisse étirer et ramener le bras dans tous les sens, sans être réticent à tout ce que je lui fais faire.
Y a réellement un problème dans son corps pour qu'il ne réagisse pas.

- Ouhouuuh ! Tu m'écoutes ?

... Il se fout de ma gueule ou quoi ?? C'est quoi cette expression stoïque sur sa face ?
Ras-le-bol, je le pince. Fort.
Non mais, un peu de respect je ne suis pas n'importe qui.

Finalement, après avoir frotté son pauvre bras rougi et un pincement plus tard, je perds mes mots et ne sais plus ce que j'avais prévu de lui dire lorsqu'il plante son regard dans le mien, l'air impatient. Je l'ai provoqué et maintenant, je suis incapable de dire un mot.
Argh je sens presque mes joues commencer à chauffer. Cette terrible sensation me met affreusement mal à l'aise. Où est partie mon assurance ?