Romain posa une main derrière son dos afin de guider la jeune femme effondrée à l'évocation de son violeur à travers la cours. En passant, Rosa la vit en larme et sourit narquoisement, heureuse de la voir dans cet état. Après tout, c'était de sa faute si elle était obligée de rentrer à l'hôpital. Aucun des autres patients ne s'étaient plains et elle avait imaginé qu'il en serait de même avec cette asociale. Manque de chance, elle ignorait que Romain avait des sentiments aussi forts pour elle et qu'il creuserait la question.
Rosa ouvrit la bouche pour sortir une remarque bien cinglante mais le regard foudroyant du jeune médecin la fit renoncer. Il avait le bras long...
Ambre se laissa guider par l'homme à travers la villa jusque dans sa chambre qui lui procura un léger sentiment de sécurité. Elle reprit son souffle sous ses yeux perçants. Il s'agenouilla alors devant elle.
-Il n'est plus là. J'aimerais te l'entendre dire, Ambre, dit-il d'une voix apaisante mais ferme.
Elle secoua la tête, refusant d'y croire.
-Et s'il revient ? paniqua-t-elle.
-Il ne reviendra jamais. Et sache que si c'est le cas, je serais capable de le tuer.
Une lueur terrifiante dans son regard la convainc qu'il pensait sérieusement ses dires.
-Répète-le maintenant.
-Il... Il n'est plus là.
Il sourit et saisit un verre d'eau sur la table de nuit qu'il lui tendit. Elle le vida d'un trait.
-Ça va mieux ?
Ambre hocha la tête, mettant en mouvement sa longue chevelure blonde. Le jeune homme s'assit à ses côtés, silencieux. Il se délecta de son subtil parfum de jasmin.
-Parle-moi de toi, murmura-t-elle tandis que ses larmes laissaient des traces salées sur ses joues en s'évaporant.
-Qu'aimerais-tu savoir ? la questionna-t-il.
-Tout.
Il retint un sourire devant sa franchise.
-J'ai deux frères plus jeunes, Ismaël et Arthur. Ma mère est italienne et mon père français. Je ne me suis intéressé que tard à la médecine et j'ai débuté mes études que plusieurs années après le bac. C'est pendant cette période que j'ai rencontré Jack et Eve. J'ai rapidement trouvé un emploi dans une clinique, raconta-t-il le regard dans le vague. A la suite d'une rupture pour le moins...douloureuse, je suis parti en Espagne trois ans.
A la mention de sa relation amoureuse, son expression s'était figée, ce qu'Ambre n'avait pas manqué de remarquer. Comme le lui avait dit Jack, ce sujet demeurait sensible. Au fond d'elle, la jeune femme espérait parvenir à effacer le souvenir d'Aurélia. En serait-elle capable ? Elle souhaitait juste essayer.
-Et tu es revenu en France à l'hôpital St Claude, acheva-t-elle.
-En effet, dit-il pensivement. Dis-moi... J'aimerais t'emmener quelque part demain matin. Es-tu prête à m'accorder ta confiance ?
Elle fronça les sourcils, ne pouvant atténuer sa méfiance constante.
-Dans quel lieu ?
-C'est une surprise. Je veux juste que tu me fasses confiance. Il ne t'arrivera rien et je serai avec toi. Alors ?
Sa grande main posée dans le bas de son dos ne l'aidait absolument pas à se concentrer. Mais elle devait admettre un fait : sa présence la rassurait autant qu'elle la troublait. Elle accepta avant même de se rendre véritablement compte de son geste.
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-Une piscine municipale ?
-Toujours pas.
-La plage ?
-J'admire ta persévérance, rit-il.
Ambre ne cessait de tenter de deviner la destination mais à chaque proposition, il y répondait négativement. La jeune femme s'enfonça dans le siège de la voiture conduite par Romain.
-Tu ne veux pas me donner un indice ? demanda-t-elle désespérée et angoissée.
-Surtout pas. C'est très amusant de te voir te triturer les méninges. Sache juste que je ne t'emmènerais jamais dans un lieu trop effrayant, dit-il en voyant son expression grimaçante.
Il exécuta un dernier virage à droite et arrêta la voiture devant une immense bâtisse de béton.
-Qu'est-ce que c'est ? demanda la jeune femme, un peu perdue et inquiète.
-Voici le planétarium de Pleumeur-Bodou, observa-t-il sa réaction.
Ambre sembla se décomposer sur place. Ses tremblements reprirent et sa respiration devint difficile.
-Ambre, respire. Nous irons à ton rythme.
-Non, je ne peux pas ! paniqua-t-elle tandis que les sanglots prenaient le dessus.
Elle tenta de courir vers la voiture pour s'éloigner au plus vite de ce lieu mais sa poigne la rattrapa fermement. Son corps frêle s'écroula au sol et elle s'entoura de ses bras.
-Je ne te quitterai pas. Si cela devient trop difficile, nous partirons, promit-il d'une voix douce.
Romain ne s'attendait pas à une réaction aussi virulente de sa part. Il savait qu'elle risquait de paniquer mais elle semblait à cet instant pétrifiée de peur. Mais qu'est-ce qui pouvait l'effrayer autant ? L'obscurité ? Les astres ?
-Ambre, parle-moi. De quoi as-tu peur ?
Elle sanglota de plus belle, rendant impossible tout dialogue. Il la souleva délicatement et la ramena dans l'habitacle de la voiture. Au bout d'une dizaine de minutes, sa respiration ralentit.
-Mon... agression s'est déroulée en pleine nuit dans une forêt. Il m'a paralysée avec une drogue, éclata-t-elle en sanglot de nouveau. Je ne voyais rien et étais immobilisée. Je sentais seulement ses mains sur moi, la douleur quand il a...
Elle ne put achever sa phrase mais Romain avait déjà compris. Son violeur s'était débrouillé pour occulter tous ses sens, sauf celui qui lui permettrait de la détruire psychologiquement. Elle ne pouvait même pas se débattre. Existait-il une agression plus cruelle ? A présent, il comprenait mieux sa phobie de l'obscurité. Elle la faisait se sentir impuissante et inutile.
-J'ai réservé le planétarium entier. Si je demande à y laisser les lampes allumées, y rentreras-tu ?
-Je veux rentrer à la villa... sanglota-t-elle.
-Nous ne partirons pas avant que tu n'y sois entrée, assura-t-il fermement. A moins que tu ne m'ais pas tout dit ?
Elle leva son visage plein de larmes sur lui. Sa capacité à tout deviner ne lui avait jamais semblée aussi agaçante. Pourquoi s'obstinait-il contre son gré ?
-Pourquoi as-tu peur d'observer un ciel étoilé ? souffla-t-il.
-Je ne... Je n'ai pas suivi mes parents à l'hôtel car je souhaitais observer plus longtemps la nuit. J'ai provoqué moi-même mon viol...
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Aie Confiance
Romance"-Tu vois, je ne te veux aucun mal." Ce sont ces mots qui déconcertèrent Ambre dans ses convictions. Depuis son agression, Ambre a peur du contact humains et ne parvient à faire confiance à personne. Cette peur qui la dévore l'a rendue inapte à vivr...