Le pauvre Carl ne semblait plus savoir où se mettre. Ambre se pressa devant lui à son tour, les larmes aux yeux.
-Je ne comprends pas. Pourquoi n'a-t-elle rien dit ?
-Je suis vraiment désolée, jeunes gens, mais je ne peux rien dire ! Croyez-moi, son départ me peine autant que vous mais elle n'a pas le choix. C'est une décision qu'elle a prise seule et je n'ai pas eu mon mot à dire.
-Elle avait donc le choix de partir avec ce Joris ? Je ne l'aurais pas cru... Mais pour quelle raison doit-elle y aller ? demanda Romain qui tentait avec peine de contenir sa colère.
Carl plaça ses mains en signe d'apaisement et recula.
-Je ne peux pas vous dire ! Seulement que Joris Salvorde est un homme très influent et riche. Vous en parler m'attirerait de gros ennuis ainsi qu'à vous !
Comment le vieil homme pouvait-il avouer qu'à l'entrée de la villa se tenait un homme armé vêtu de noir chargé de surveiller le moindre de ses mouvements ? Comment pouvait-il avouer que sa petite-fille chérie avait été marié à un homme qui adorait passer son temps au casino ? Et qu'à présent, elle devait rembourser ses dettes par sa présence auprès de cet homme réputé pour être aussi cruel que riche ? Celui-ci avait fait preuve de tendresse avec Marie mais il ne pouvait être sûr qu'elle serait aussi bien traitée en Grèce à ses côtés. Et tout ça avec son terrible handicap !
Ce qui l'avait poussé à laisser partir sa petite-fille étaient les doux regards que Joris lui avaient lancée lorsqu'elle ne l'observait pas, davantage que les paroles rassurantes de celui-ci. Il assurait que rien ne lui arriverait, qu'il prendrait soin d'elle, même avec son mutisme. En apparence dur devant Marie, cet homme n'avait pu dissimuler certains gestes affectueux vis-à-vis d'elle qui n'avaient pas échappé à Carl. Avec sa richesse, les dettes du mari de sa petite-fille n'avaient pas un grand impact sur sa colossale fortune. Alors pourquoi prendre Marie en dédommagement ? Mais avec son handicap, Marie ne pourrait jamais vivre pleinement si elle ne sortait pas de cette forêt. Et il avait l'intime conviction que cet homme saurait l'ouvrir au monde.
Ambre et Romain exigeaient des réponses qu'il ne pouvait donner.
-Ecoutez. Marie reviendra bientôt, je vous donne ma parole. Aussi effrayant Joris peut-il paraître, je sais qu'il ne lui fera aucun mal.
Écourtant la conversation, il se dirigea vers la porte d'entrée sans un regard vers la jeune Ambre, bouleversée.
Ils restèrent plantés dans le petit salon froid jusqu'à ce que Romain ne reprenne ses esprits et n'entraîne la jeune femme dans sa chambre, dans laquelle il faisait plus chaud. Elle semblait choquée. Et cela n'avait rien d'étonnant : Marie était sa première amie depuis cinq ans et son départ soudain était plus que suspect ! Sa pâleur inquiéta l'homme.
-Ambre, tu es sûre que ça va aller ?
-Oui. C'est juste que je revoie son expression. Elle semblait paniquée mais tellement sûre d'elle ! Je pense que sa décision de partir a été mûrement réfléchie, tout comme lorsqu'elle m'a assurée qu'elle reviendrai.
Une larme coula sur sa joue et Romain s'empressa de l'essuyer avec son pouce, savourant la douceur de sa peau diaphane.
-Elle va me manquer... soupira-t-elle.
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Adam, Romain, Ève et Jack s'empressaient de fermer les volets extérieurs alors que les patients restaient terrés dans le salon. Les rafales de vents soufflaient si fort que les arbres se pliaient en deux. Régulièrement, on entendait les craquements d'un tronc qui lâchait. L'eau de pluie se mêlait avec les embruns salés des vagues s'écrasant avec force contre la falaise.
Jack, devant la tempête, somma à sa cousine de rentrer avant qu'elle ne tombe de la falaise. Le grillage qui faisait barrage entre le vide et le jardin s'était envolé depuis bien longtemps. La radio avait annoncé deux tempêtes en deux semaines. Du jamais vu. Et la première avait déjà pris d'assaut la villa.
Ambre écoutait le bruit du tonnerre en serrant Izée contre elle. Elle avait accepté de sortir de sa chambre à condition de ne pas avoir à fréquenter les autres patients. Savoir Romain à l'extérieur ne lui plaisait pas du tout. Elle était bien placée pour savoir qu'il peut se passer le pire en quelques minutes.
-Tu as peur ? demanda Izée en sentant ses bras l'étreindre davantage.
-Un peu, avoua-t-elle avec un léger sourire.
Mais ce n'était pas pour elle qu'elle avait peur. Elle regretta ses dires au moment où la petite fille esquissa une moue angoissée.
-Est-ce que la maison va dégrinler ?
-On dit "dégringoler", la corrigea-t-elle. Bien sûr que non la villa ne va pas s'écrouler.
La fillette se blottit davantage dans ses bras, loin d'être rassurée. Lorsque sa mère pénétra dans la pièce, ses cheveux dégoulinants d'eau, la petite fila s'accrocha à ses jambes.
Ambre eut un pincement au cœur. Jamais elle ne pourrait avoir d'enfant. Et pour cause, un homme ne s'intéresserait jamais à elle au point de vouloir fonder une famille avec elle. Romain ? Méfiante, elle ne cessait de se demander s'il était réellement sérieux. Ses baisers échangés étaient une douce torture mais il ne désirait jamais les approfondir. Il avait évoqué sa rupture avec Aurélia avec une grande difficulté. Était-il possible qu'il y ait plus de séquelles qu'il ne voulait le laisser paraître ?
Prise d'angoisse en réalisant toutes les choses qu'elle ne pourrait jamais faire à cause de sa maladie, elle s'enfuit hors du salon en même temps qu'Ève et Izée en sortaient. Elle se jeta sur son lit, réprimant un sanglot. Elle ne voulait plus pleurer, n'était même pas certaine d'en avoir la force. Mais régulièrement, ces pensées dépressives l'envahissaient sans qu'elle ne puisse lutter. Selon Romain, c'était les plus dangereuses et il voulait qu'elle l'appelle dès que cela arrivait. Cependant, elle ne le fit pas ce soir-là, tenta de lutter seule.
Elle s'endormit avec difficulté, des larmes coulant encore sur ses joues. Son corps frêle tressautait à chaque éclair zébrant la chambre. La lumière vacilla un instant puis s'éteint brutalement. Ne dormant jamais lourdement, elle s'éveilla soudain.
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Aie Confiance
Romance"-Tu vois, je ne te veux aucun mal." Ce sont ces mots qui déconcertèrent Ambre dans ses convictions. Depuis son agression, Ambre a peur du contact humains et ne parvient à faire confiance à personne. Cette peur qui la dévore l'a rendue inapte à vivr...