-Ambre...
Le jeune homme ne savait quoi dire pour la consoler. Ses mots qui d'ordinaire lui venaient tout seuls, semblaient s'être évaporés de son esprit. Il comprenait sa douleur mais lui répondre serait la pousser à oublier, à mettre de côté le souvenir de ses parents.
-Je ne regrette pas cette époque, tu sais, fit-elle remarquer avec un demi-sourire. Je n'aime pas la nostalgie, c'est une preuve de faiblesse. On se complait dans la tristesse de savoir qu'un moment heureux est définitivement révolu. Je refuse d'être triste en pensant à mes parents... Ils m'ont tant offert ! Ils me manquent simplement.
Elle agrippa sa main et la serra fortement puis se perdit dans la contemplation des étoiles. Leur nom respectif lui revenait à l'esprit progressivement. Elle avait l'impression d'entendre la voix chaude de son père les lui énumérant en même temps qu'elle les observait. Le ciel qui l'avait vu grandir était toujours le même, seule sa considération de ces lueurs éclairant la planète chaque nuit se transformait peu à peu. Les pages de sa vie tournaient tellement vite qu'elle peinait à se retrouver entre passé, présent et futur. Mais le ciel ne changerait jamais, se fichant éperdument de qui le déteste, qui l'observe ainsi que des personnes qui meurent d'amour ou de maladie sous ses yeux.
La jeune femme sursauta lorsqu'il posa sa grande main sur sa tête pour l'attirer contre son torse. Elle se perdit dans la chaleur qu'il émanait. Ses tremblements cessèrent définitivement tandis qu'elle respirait son parfum âcre si perturbant.
La force de caractère d'Ambre l'avait profondément surpris. Il découvrait peu à peu de nouvelles facettes de la jeune femme : celles qu'elle acceptait de lui montrer. Au-delà de la peur, elle savait faire preuve de générosité, de courage, d'intelligence... Et sa beauté ne cesserait jamais de le subjuguer. A chaque instant, son regard dérivait sur ses beaux yeux noisettes virant sur le rouge, la naissance pâle de sa poitrine. Il se retenait de caresser son visage qui formait un ovale pratiquement parfait. Ne cesserait-elle jamais d'envahir son esprit jour et nuit ?
Il posa une main au creux de ses omoplates pour la guider jusqu'à la voiture. Perdue dans ses pensées, elle restait silencieuse. Aucune trace de tristesse ne comparaissait sur son visage. Juste... le visage de quelqu'un perdu dans ses réflexions.
-Alors, qu'as-tu pensé de cette surprise ? tourna-t-il la clé pour démarrer le moteur.
-Je n'appellerais pas ça une surprise. Tu m'as piégé ! contra-t-elle en faisant une petite moue qui le fit craquer. Tu savais que je serais morte de peur dans l'obscurité.
-Tu es fâchée ?
-Je suis furieuse, imita-t-elle le ton qu'il avait employé après la sortie en bateau.
-Je vois ça, étouffa-t-il un petit rire. Mais regrettes-tu ? Tu es entrées de ton plein gré, je ne t'ai pas forcée directement.
Elle secoua la tête et se pinça les lèvres, ignorant la violente vague de désir que cela provoqua chez le jeune homme.
-Sans doute un accès de folie. Mais j'ai l'impression de m'être réconciliée avec une partie de moi-même.
Romain éclata d'un rire guttural en l'entendant décrire ses propres actes de courage comme de la folie. Progressivement, elle se pardonnait à elle-même.
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Ambre ramena ses genoux contre sa poitrine, espérant ainsi moins souffrir du froid qui régnait dans la mansarde. Le froid avait envahi toute la région et des tonnes d'eau de pluie tombaient toutes les heures, condamnant les pensionnaires à rester à l'intérieur de la villa. La petite pièce sous les toits était devenue son refuge. De temps à autres, Izée venait jouer avec elle ou Eve lui apportait une tasse de chocolat chaud. Bien qu'habituée aux tempêtes, la femme restait nerveuse en voyant les vagues énormes déferler contre la falaise sur laquelle se tenait la villa. Romain passa sa tête par la trappe. Son expression était fermée, ce qui inquiéta immédiatement Ambre.
-Marie est ici avec son grand-père et un homme. Apparemment, elle doit partir tout de suite mais a tenu à te faire ses adieux.
Depuis la visite au planétarium il y a une semaine, elle était allée rendre visite avec Romain à Marie et à son grand-père Carl. Les deux femmes avaient longtemps discuté de tout et de rien. Le mutisme de Marie n'était absolument pas un handicap. Mais en aucun cas elle n'avait mentionné un départ ! Et qui était cet homme dont parlait Romain ? En entrant dans le petit salon, Marie se leva et accourut la prendre dans ses bras. Ses traits étaient tirés, comme si elle n'avait pas dormi pendant plusieurs jours. Son carnet avait été trempé par la pluie mais elle écrivit tout de même sur le
-Je ne comprends pas. Romain m'a dit que tu partais. Ce n'est pas vrai, n'est-ce pas ?
« Si. Je pars en Grèce avec Joris. » pointa-t-elle l'homme derrière elle.
Celui-ci semblait avoir la trentaine et sa carrure était tellement impressionnante qu'Ambre recula d'un pas, effrayée. Romain le vit et posa une main rassurante sur son épaule. Ses vêtements semblaient terriblement chers. Elle voyait sur le visage de son amie qu'elle ne désirait pas partir. Qui était réellement cet homme ?
-Depuis quand est-ce prévu ? Tu ne m'en avais jamais parlé ! Et qui est vraiment Joris ? demanda-t-elle à voix basse, intimidée par le regard froid de l'homme qui s'impatientait.
« Excuse-moi. Tout s'est décidé à la dernière minute et je ne sais pas quand je pourrai rentrer en Bretagne. Mais ne t'en fais pas, tout va bien. »
L'expression sur son visage disait le contraire mais Ambre n'eut pas le temps de le lui faire remarquer.
-Marie, il est temps de partir, dit l'homme d'une voix autoritaire.
Elle lui jeta un regard contrarié.
-Vite, je perds patience ! insista-t-il.
Marie l'étreint une dernière fois puis sortit de la villa pour rejoindre au pas de course une voiture garée dans la cours, sous le regard ébahi de la jeune femme. Joris les remercia poliment et sortit à son tour. Romain fut le premier à reprendre ses esprits après leur départ. Il se tourna vers Carl qui dissimulait avec difficulté son émotion.
-Carl, je peux savoir qui est ce Joris ? Et Marie ne semblait pas vraiment volontaire pour partir. Que s'est-il passé et pourquoi ne l'en avez-vous pas empêché ?
Le vieil homme baissa les yeux au sol, perturbé.
-Qu'est-ce que c'est que cette histoire, bon sang !? cria Romain, agacé et aussi perdu qu'Ambre.
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Aie Confiance
Romance"-Tu vois, je ne te veux aucun mal." Ce sont ces mots qui déconcertèrent Ambre dans ses convictions. Depuis son agression, Ambre a peur du contact humains et ne parvient à faire confiance à personne. Cette peur qui la dévore l'a rendue inapte à vivr...