Chapitre 23

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-Ambre ! s'exclama-t-il furieux. Que t'ai-je déjà répété ?

-Ce... Je n'y suis pour rien, murmura-t-elle en baissant ses yeux humides.

-Bien. Je refuse que tu me dises encore une fois une ineptie de ce genre, est-ce que c'est clair !?

Elle hocha la tête puis l'enfouit dans le cou de Romain pendant qu'il lui frottait le dos tendrement.

-Je sais que tu es capable de surmonter tes peurs. Ta volonté est immense, tu veux t'en sortir. Et je t'y aiderai. A quinze ans, on est coupable de rien et encore moins d'une agression. Je veux que tu t'en persuades.

Sa voix était grave, chaude. Elle inspirait tellement de confiance ! Malgré ces soubresauts qui lui comprimaient encore la poitrine, elle savait qu'elle ne serait pas seule dans cette épreuve. Ses puissante mains posées dans son dos semblaient brûler sa peau. Elle suffoquait mais ignorait s'il s'agissait encore de peur. Chacun de ses gestes étaient tendres, proportionnés afin de ne pas l'effrayer. La jeune femme, aussi surprenant soit-il, désirait ne jamais quitter ces bras puissants dans lesquels elle se sentait enfin en sécurité. Après des années à fuir le monde entier, elle voulait seulement se reposer. Et demeurer à ses côtés.

Prise d'une impulsion soudaine, elle déposa un rapide baiser au coins de ses lèvres puis rabaissa la tête, gênée. Romain observa avec délice les petites rougeurs qui apparaissaient sur ses joues. D'abord surpris, son impétuosité était loin de lui déplaire. Ne pouvant plus résister davantage, il captura ses lèvres sucrées, plus fougueusement. Sa langue força sa barrière et entama un incroyable ballet avec la sienne. Ambre sentit une délicate chaleur embraser ses seins et le bas de son ventre. Cet homme était juste en train de provoquer un véritable raz-de-marée dans son corps !

Elle passa machinalement sa main dans ses cheveux puis la glissa sensuellement sur sa nuque. Elle voulait découvrir chaque parcelle de sa peau, sentir qu'il était là pour elle. Un grognement rauque s'échappa de sa bouche, signe de son bien-être qui emplissait tout son corps. En sentant son désir s'accentuer davantage, le jeune homme estima qu'il devait s'interrompre avant de ne plus répondre de rien.

-Excuse-moi, je ne suis pas sûr de pouvoir m'arrêter si on continue une minute de plus, dit-il essoufflé devant sa mine déconfite.

Il déposa un baiser sur le bout de ses doigts.

-Je préfère attendre encore un peu que tu sois prête.

Son viol était encore trop omniprésent dans son esprit et Romain ne voulait prendre aucun risque, même si cela le frustrait autant que la jeune femme.

-Eh bien... Tu es prête à entrer dans le planétarium ?

-Je suis vraiment obligée ? demanda-t-elle d'une voix tremblante sans trop espérer la réponse qui la ravirait au plus haut point.

-Bien sûr !

Elle esquissa un léger rictus.

-Tu n'abandonnes jamais, n'est-ce pas ?

-Jamais ! Et surtout lorsque ça te concerne, lui assena-t-il un clin d'œil qui la fit rougir. On y va dès que tu es prête.

Les minutes passèrent sans qu'ils n'esquissent un mouvement. Romain observait silencieusement les expressions de la jeune femme du coins de l'œil, tentant de deviner sa décision finale. Il ne la forcerait jamais à entrer contre son gré. Il cherchait seulement à la pousser dans ses retranchements et doutait qu'elle accepte sans qu'il lui fasse croire qu'ils ne rentreraient pas à la villa sans avoir pénétré dans le planétarium. Eh oui, il faut savoir user parfois d'arguments fourbes ! Voyant que sa respiration s'accélérait et que des larmes jaillissaient de yeux, il cilla.

-Ambre, parle-moi. Si tu ne t'en sens vraiment pas capable, je ne veux pas te forcer.

Elle secoua vivement la tête.

-Non, j'irai ! Ça ira ! s'écria-t-elle.

-Si c'est pour que tu perdes connaissance, ça n'en vaut pas la peine.

L'ignorant, elle ouvrit précipitamment la portière et avança les jambes tremblantes vers l'imposante structure. Au fond d'elle-même, elle savait que se confronter à ses peurs était la meilleure façon d'avancer. Romain la rattrapa, anxieux. Elle s'agrippa à lui et le tira presque à l'intérieur. Ils pénétrèrent dans la salle sombre, illuminées uniquement par les projections d'astres. Ambre se retint de faire marche arrière.

L'obscurité semblait s'insinuer en elle, la paralysant avec la même efficacité que la drogue utilisée par son violeur. Elle s'entoura de ses bras, maigre protection contre les vertiges qui l'assaillaient. Le sol se déroba sous ses pieds, les constellations tournaient dans sa tête avec un réalisme effrayant. La jeune femme ressentait presque la sensation des pierres qui s'étaient enfoncées dans sa peau pendant que l'homme la pénétrait brutalement et le froid qui l'avait poussée à rentrer à l'hôtel. Des mains la secouaient, et une voix tenta de percer sa bulle de souvenirs. Mais celle-ci n'était faite que d'échos et elle ne saisissait pas le sens des paroles. Sauf les dernières qui agirent comme un électro-choc. Elle revint difficilement dans la réalité et aperçut le regard angoissé de Romain qui tentait vainement d'amoindrir ses tremblements.

-...vais devoir t'endormir. Reste calme !

Elle saisit avec difficulté sa main qui tenait déjà la seringue remplie de liquide anesthésiant.

-Ne fais pas ça. Je ne veux pas que tu m'endormes comme dans la forêt.

Avec hésitation, il abaissa finalement la pointe en remarquant qu'elle se calmait progressivement. Il l'aida à se relever, la portant presque. Son front était en sueur, ses jambes fébriles. Il la serra contre lui, geste visant à la réconforter.

-Ne cherche... plus jamais à m'endormir, prononça-t-elle laborieusement. Tu vois bien que je peux m'en sortir sans...

Il la souleva dans ses bras pour la déposer sur le siège le plus proche.

-Je vois surtout que tu te débats dans le vide contre des hallucinations, dit-il fermement. T'en rends-tu compte, au moins ? Je ne peux te promettre une telle chose. Ne m'en veux pas, cette mesure a pour objectif d'assurer ta protection.

Il saisit son poignet afin de vérifier son pouls. Celui-ci ralentissait lentement. Mais la jeune femme semblait toujours en état de choc. Les yeux grands ouverts, elle fixait le vide en silence.

-Ambre ? souffla-t-il terriblement inquiet. Comment tu te sens ?

Elle tourna lentement ses yeux noisettes sur lui.

-Une multitude de détails me reviennent en... mémoire. C'est troublant.

-Quelles sortes de souvenirs ?

-Les soirées durant lesquelles mon père m'apprenait à reconnaître les différentes constellations. Ma mère s'endormait souvent à nos côtés et nous riions lorsqu'elle marmonnait dans son sommeil, sourit-elle à l'évocation de ces moments heureux.

Les larmes coulaient silencieusement sur ses joues.

-Je n'aurais jamais cru à cette époque qu'ils puissent disparaître de ma vie aussi facilement.

Aie ConfianceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant