Chapitre 12: Déviances et Réligion

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Affalé sur le ventre dans mon lit, j'ouvre un œil. Ça fait deux plombes que mon téléphone vibre sans arrêt, mais j'étais pas décidé à interrompre ma sieste. Je me retourne sur le dos, passe ma main sur mon visage. Il fait nuit. Je tends le bras, décroche.
— Ouais.
jaylie , tu fais vraiment chier ! Pourquoi tu ne réponds pas ?
— J'étais sous la douche.
— Fous-toi de moi ! T'es dans ton lit !
Ah, c'est vrai, les caméras. Un large sourire aux lèvres, je fais coucou dans le vide et passe mon bras derrière ma nuque en offrant ma nudité à son regard.
Jelem , dis-moi, tu aimes me mater quand je dors ? Je ronfle ?
Silence. À peine une semaine qu'on travaille ensemble et je crois que ma brunette est en burn out.
Jelem ? T'es là ?
— Tais-toi ! Je veux plus t'entendre. On se retrouve dans une demi-heure. On a peut-être du nouveau. Je t'envoie l'adresse du lieu de rendez-vous.
— Je croyais qu'on ne pouvait pas parler au téléphone ?
Marius a réglé ce problème. C'est sécurisé. Je t'attends.
— Ah non !
— Comment ça ?
— Non ! Je sors pas ce soir !
Elle enrage. Ça me soûle et je lui raccroche au nez. Je me lève, enfile un bas de jogging et me dirige vers le salon, Caramel(chat) sur les talons. J'ouvre le frigo, prends une bière, m'allume une clope. Le chat, qui n'arrête pas de miauler, s'excite en même temps que mon smartphone sur le bar qui ne fait que sonner .Bon allez, je décroche .
« — Quoi encore ?
— Je te jure, jaylie, tu vas...
Je pose le téléphone. Qu'est-ce qu'elle est chiante ! Accoudé au comptoir, le menton dans ma main, je tire sur ma clope et attends. Caramel continue de brailler et j'entends l'autre beugler dans l'appareil que je saisis de nouveau.
— ... tu sais que je te vois ! Alors arrête tes enfantillages ! Putain, mais tu as quel âge ?
— 26ans, et toi ? Et si t'es voyeuriste, c'est pas mon problème. Mais j'ai un groupe sympa à te proposer et... Bordel ! Qu'est-ce qu'il a, ce chat !
— Je pense que ce chat a faim.
Je mate la boule de poils assise sur le comptoir, pose une tasse devant et lui verse de la bière. À la tienne, mon pote !
— Je t'attends avec Sine. C'est important, on a du boulot.
Jelem semble s'être calmée – ou alors elle tente la manière douce.
— Je bouge pas !
Silence encore. Je reprends.
— C'est bon ! Tu crois que j'ai envie de passer tout mon temps libre avec toi ? Et ça fait quarante-huit heures que je bosse non-stop ! Alors si tu veux réfléchir sur ton enquête, tu viens ou on se fait un face time ! Moi, je bouge pas !
Je me marre tout seul en imaginant sa tête qu'elle fracasse de désespoir contre son écran.
— T'es con ou quoi ? Je ne peux pas venir chez toi ! C'est le meilleur moyen pour te griller si t'es surveillé.
— Ah ouais, c'est vrai. Bon, eh bien, tant pis.
— Non mais...
De nouveau le silence. Elle a dû partir se prendre deux ou trois dolipranes, la pauvre. Je m'affale dans mon fauteuil en buvant ma bière.
jaylie, c'est très important. Fais un effort... Sine, il n'y a pas de problème, mais moi je peux pas venir, c'est trop risqué sinon je l'aurais fait.
— Déguise-toi en pute ! Ça devrait le faire !
— Pardon ?
— Bah ouais. Si tu as tellement envie de me voir, fais un effort !
— T'es vraiment tordu comme mec ! J'ai pas envie de te voir ! Je veux juste avancer sur cette putain d'enquête !
— Ça revient au même car, pour avancer, tu es obligée de me voir ! Donc viens en pute ! Si quelqu'un me surveille, il doit savoir que j'en reçois. Ça ne choquera personne et ça me rendra encore plus crédible.
Elle a raccroché. Quoi ? Elle est plutôt brillante, mon idée. Le sourire aux lèvres, je lève ma bouteille en l'air avant de porter le goulot à ma bouche. Elle commence à m'emmerder, la fliquette, à me donner des ordres et à diriger ma vie. Putain ! On peut pas avoir une soirée peinarde ? Ça frôle le harcèlement.
                         *

La sonnette de l'entrée retentit. Caramel redresse la tête en même temps que je saute sur mes pieds. Il est où, mon flingue ? Ce con de chat court derrière la porte en miaulant tout ce qu'il peut. Je le dégage avec mon pied, mate à travers le judas. Une noire accompagnée de son mec me sourit. J'ouvre et retourne aussitôt m'étaler dans mon fauteuil sans dire un mot.
— Salut, jaylie !
Jelem, affublée d'un jean large, d'une casquette et d'un sweat à capuche s'avance à côté de Sine en mini robe noire sexy. Cette dernière déballe son sac sur le bar : le matou est aux anges.
— Je t'ai apporté de quoi nourrir Caramel, son panier et sa litière.
Je hausse un sourcil en matant la sénégalaise s'agiter dans ma cuisine avec sa bestiole. Ma chef se laisse tomber sur le canapé en riant. Elle est peut-être de bonne humeur, mais pas moi ! Plus maintenant.
— Alors, tu aimes ma tenue ?
— Bof ! Ce n'est pas top pour ma couverture. Je n'ai pas de potes rappeurs.
— Maintenant tu en as un, rétorque-t-elle en se foutant de ma gueule.
Je saisis la télécommande, m'enfonce dans les coussins en dépliant mes jambes sur la table basse et commence à zapper ma supérieure autant que les chaînes. Je sens son regard insistant sur moi. Torse nu, je contracte mes abdos en souriant.
Sine ! Tu lâches ton chat ! On a du boulot, s'exclame-t-elle soudainement.
La noire s'installe à côté de Jelem, déballe des dossiers, son ordi. Pfff, j'avais pas envie de bosser. Les yeux rivés sur l'écran, je les calcule pas.
— J'accepte de vous filer des infos, mais c'est exceptionnel. Normalement, je ne collabore jamais avec la police. C'est bien parce que vous piétinez, qu'il y a eu une effraction chez moi et parce que je n'ai pas d'autre choix que de vous aider, nous informe la journaliste en guise de préliminaires. Le groupe sur lequel je travaille s'appelle « Les Lumières de l'Humanité » ; en apparence, une sorte de confrérie d'entraide avec des préceptes religieux catholiques forts. Rien d'extraordinaire. Cependant, comme je vous l'ai déjà dit, je les soupçonne d'être impliqués dans des actions de sabotage, voire d'intimidation musclée sur des militants favorables à l'avortement, au mariage gay et autres. J'ai deux informateurs au sein du groupe et, d'après ce qu'ils me disent, on se rapprocherait plus de la mouvance sectaire, même si les commissions d'enquête n'ont rien relevé d'anormal. Tout est bien camouflé, notamment leurs idées qui flirtent avec l'extrémisme religieux et une idéologie purificatrice...
jaylie, ça ne t'intéresse pas ? m'interroge jelem.
— Si, si... dis-je en jetant un coup d'œil vers elle avant de revenir à mon activité audiovisuelle.
— Le chef de cette confrérie, qui compte officiellement quarante adeptes – mais on pense qu'il y en a plus –, s'appelle Stephane Kovacevick.
Je fronce les sourcils. Tiens, un Serbe.
— Il est croate, immigré de Bosnie en France. Il a environ 48ans et ce n'est pas un tendre.
Merde ! Un catholique croate avec un nom serbe vivant en Bosnie. Je veux bien croire qu'il n'est pas tendre, il représente le conflit yougoslave à lui tout seul. Je me lève, sors trois bières du frigo et me rassieds dans mon fauteuil tout en changeant de chaîne.
jaylie, tu vas me faire le plaisir d'éteindre cette télé ! me balance ma boss en me fusillant du regard.
Je replonge dans mon émission.
— Je suis chez moi, pas dans ton bureau, capitaine... alors soit tu t'adaptes, soit tu dégages.
— Je suis ta supérieure, que ce soit à la PJ ou ici alors éteins-moi ce truc sinon je vide mon chargeur !
— Tu n'oserais pas !
— Je vais me gêner ! rétorque-t-elle en sortant son calibre et en vissant son silencieux dessus, sous l'œil médusé de sa copine prête à partir en courant.
Sidéré, la télécommande dans la main, j'observe ma belle brune se lever, prendre mon écran plat pour cible et y loger deux balles dans la tête du présentateur. Des étincelles jaillissent, un grésillement suivi de fumée. Putain de meuf ! Mieux vaut ne pas s'embrouiller avec elle sinon elle t'explose la cervelle. Si seulement caramel pouvait venir l'emmerder.
— Vous êtes deux malades ! s'écrie la journaliste, affolée.
— Bon ! On peut bosser maintenant, énonce sèchement jelem en se rasseyant et en claquant son arme sur la table.
Sine m'interroge du regard, je hausse les épaules.
— Continue. J'ai plus de télé de toute façon. Jelem, t'abuses, quand même.
— Ta gueule ! Je perds patience, alors ne me chauffe pas !
Je lève les mains en signe de reddition face à ses iris glaciaires. La belle noire observe un temps son amie, puis se recentre sur ses documents, les mains légèrement tremblantes.
— Bon, j'en étais où ?
— À Stéphane, le Croate bosnien. Tu vois que j'ai tout suivi, Jelem.
Perforation oculaire : je m'affaisse dans mon fauteuil. Elle n'a aucun humour, cette nana.
— Ah oui. Comme je le disais, ce stephane  est loin d'être commode. Il est en contact avec certains partis nationalistes et dirige le groupe de façon un peu paramilitaire.
— Bon... mais quel est le rapport entre ses templiers et nos furieux du cul ? Sine, c'est très intéressant tout ça et cela explique ton cambriolage, mais pas nos meurtres. T'es dans la merde si tu as les Croates sur le dos.
Cette fois, je suis sérieux.
— Sauf que le précédent chef de ces illuminés était Mr Aziz Abena le défunt mari de ta psy, renchérit Jelem en prenant une cigarette dans mon paquet.
— Ah ouais, intéressante finalement, le Dr Maboule. Elle a un faible pour les cinglés. Si je me masturbe en récitant la Bible, j'ai toutes mes chances.
Jelem recrache sa fumée en s'étouffant. Sine éclate de rire en sortant un cliché noir et blanc de feu le chef de groupe.
Aziz abena  a marqué les esprits. Les membres du groupe lui vouent un culte incroyable. Il militait discrètement pour une race pure et un esprit sain. Une sorte d'idéologie nazie sous couvert de préceptes religieux. Sauf qu'il disait que l'homme était naturellement bon et que c'était la société moderne et décadente qui était responsable de sa perversion.
— Donc votre théorie serait que la psy perpétuerait la politique eugéniste de son taré de mari en zigouillant tous les timbrés qui entrent dans son cabinet ? C'est un peu gros, quand même.
Jelem se détend enfin.
— On ne dit pas ça, mais je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il y a un lien entre le travail d'investigation de Sine, son cambriolage et l'intrusion chez toi. Sans le vouloir, vous avez établi une connexion entre le groupe religieux et les meurtres des patients de cette femme. Reste à savoir quelle relation elle entretient avec la confrérie. Pour le moment, d'après les recherches de Sine et nos informations, il n'y en a aucune, si ce n'est son mari. Elle n'a jamais fait partie de la secte et n'a aucun contact avec ses membres. Mais si ce sont eux qui sont venus chez toi, Sine, c'est que tu les déranges. Peut-être encore plus depuis que tu connais jaylie.
Le cerveau tournant à mille à l'heure, je tire sur ma clope.
— Donc si je comprends bien, si je n'avais pas baisé Sine, vous n'auriez jamais fait le rapprochement entre les militants et la psy. Putain, je suis trop fort comme taupe et vous êtes trop nazes comme enquêteurs à la Crim !
jaylie, t'es con ! Sans le travail d'investigation de Sine, nous n'avions pas de raisons d'imaginer que derrière cette communauté catholique se cachaient des dingues. Que le mari décédé de la psy soit croyant et pratiquant ne constitue pas un délit.
— Mouais, je vous le dis tout de suite, j'infiltre pas ce truc. Ça a l'air vachement moins drôle.
— Crois-moi, cela ne nous est même pas venu à l'idée. Tu colles bien mieux au profil du déviant sexuel, rétorque ma chef un sourire aux lèvres.
— En tout cas, nous voilà avec deux groupes forts sympathiques. À défaut de savoir dans quel camp se trouve le tueur, en espérant qu'il n'y en ait qu'un, le mobile idéologique peut tenir la route. Un gars ou une nana qui veut remettre dans le droit chemin les brebis égarées. Je vais me renseigner sur ce Kovacevick. L'Est, c'est mon domaine, j'ai mes sources dans le milieu.
— Moi, je vais creuser du côté de la psy, renchérit jelem.
— Surtout, soyez discrets ! implore Sine. Ne grillez pas mon boulot et mes informateurs. La psy va se demander pourquoi tu t'intéresses aux « Lumières de l'Humanité » tout d'un coup.
Le reste de la soirée se passe à vider mon stock de bières et à extrapoler sur les suspects éventuels. Autant dire, à l'heure actuelle, tout le monde, car on n'a pas grand-chose, juste des suppositions.
2 heures du mat : Jelem regarde sa montre et sursaute.
— Merde ! Aurélien va encore faire la gueule. Sine, on y va !
Encastré dans mon fauteuil, je mate la noire sexy et la brune – torride malgré son accoutrement de mec – se préparer à partir.
— Je pensais qu'on aurait pu se détendre tous les trois. Jelem, comment tu comptes me régler mes heures sup et ma télé ?
kn, t'es lourd ! Tu n'obtiendras jamais rien de moi. Je suis en couple et heureuse.
— Ah ouais. Je vois pas où est le problème. Baiser t'empêchera pas d'être heureuse et de rentrer chez ton mec. Ça m'arrange, même.
Ma grande brune se penche au-dessus de moi en prenant appui sur le dossier de mon fauteuil, sa bouche à deux centimètres de la mienne.
— Les types comme toi me donnent plutôt envie de les castrer que de les baiser. Oublie.
J'humidifie mes lèvres, son regard de tueuse se baisse furtivement sur mon sourire en coin, puis revient croiser le mien. Toi, ma poulette, j'ai des doutes sur tes convictions religieuses.
— Tu as tort, Jelem. Les types comme moi peuvent être très utiles...
Sans se redresser, elle tend le bras, saisis son flingue resté sur la table et le place entre mes jambes.
— Ne m'énerve pas, jaylie... susurre-t-elle.
L'effet est immédiat. Un braquage à main armée de ma bite sous pression ! Je bande comme un malade face au canon. Sa rigidité métallique défie ma raideur beaucoup plus naturelle. C'est évident, je vais me la faire ! Ça ne peut pas être autrement.
Mon attention glisse vers la bosse déformant mon bas de jogging. Jelem suit mon regard et inspire profondément, exaspérée. J'ai gagné ! Elle remballe aussitôt son phallus artificiel, tourne les talons et se dirige vers la porte.
Sine, tu viens ! On y va.
La petite journaliste jette un œil vers moi : elle espère certainement que je l'invite. Je lui fais coucou de la main ; déçue, elle bouge vers sa copine qui s'impatiente.
— Salut, jaylie. Je t'appelle demain, lance sèchement Jelem en ouvrant la porte.
— Salut, les filles... Sine, attends !
Miss Senegal se fige sur le seuil, son visage angélique se tourne vers moi. Remettre ça avec elle, c'était pas dans mes plans, mais bon...
— Tu veux rester ?
Je m'approche. Gênée, elle ose à peine me regarder, c'est charmant.
— Il y a seulement un petit ajustement à prévoir. Je déteste me réveiller avec quelqu'un. Alors si tu restes, tu dois aussi envisager de partir.
Elle hoche la tête. Jelem, exaspérée, lève les yeux au ciel et se barre...




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Jaylie murder&sex[En ECriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant