Chapitre 29: L'Urbex

43 7 2
                                    

Réfléchissons. Où peut se planquer mon uro ? En passant devant le bar où je l'ai vu la dernière fois, je ralentis et pile. C'est d'une simplicité déconcertante d'épingler ce gars-là.
Je me gare et pousse la porte du troquet. Alex, au comptoir, s'enfonce la tête dans les mains en me voyant.
— Cache ta joie, mec ! Tu me manquais trop ! dis-je en m'accoudant à côté de lui.
— Je vais commencer à croire que tu me dragues.
— Qui sait ? Peut-être...
Il relève ses yeux cernés, m'observe avec un peu trop d'insistance avant de porter son demi à sa bouche et de marmonner :
— Qu'est-ce que tu veux encore, le flic ? Je t'ai tout dit.
— Non. Tu m'as surtout menti.
Il fixe ma clope éteinte qui se balance entre mes doigts, se mord la lèvre inférieure.
— C'est ton point de vue. Appelle mon avocat si tu veux en savoir plus.
Alex, ne me prends pas pour un abruti. Quand un type comme toi se planque derrière son avocat, ça attise la curiosité des mecs comme moi.
Il sourit en buvant sa bière. Mon téléphone vibre dans ma poche.
> Lucie : J'ai des nouvelles d'Alex.
Je dois le retrouver à l'hosto.
Je mate mon écran, mon uro bien portant, fronce les sourcils.
— C'est quoi, cette histoire d'hôpital ?
— Quoi ? Qu'est-ce que tu racontes?
— Lucie te cherche partout et elle me dit qu'elle te retrouve à l'hosto.
— Bah non. Je ne lui ai pas répondu et je vais très bien.
Alors qui... ?
— Où est ton téléphone ?
Il tâte les poches de son jean, fouille celles de son bombers noir, recommence.
— Je ne sais pas. Je l'avais tout à l'heure, dit-il en tournant sur lui-même et en inspectant le sol, le comptoir.
Légèrement tendu, j'appelle mes collègues.
Xercès, allez tout de suite chez Lucie. Je pense qu'elle est la prochaine cible. Dis à Jelem que je vous retrouve là-bas.
— OK. On y va. Mais Jelem est chez Kovacevick avec son avocat.
— Quoi ? Quelle conne !
Putain, la garce ! Non seulement elle m'évince mais en plus elle va seule chez ce dégénéré. Je raccroche au nez de Xercès et appelle aussitôt ma fliquette. J'ai de nouveau envie de la séquestrer, sauf que ce ne sera pas avec son débile de mec mais avec moi. Messagerie. Je m'énerve en faisant les cent pas, réessaie. Rien. Fait chier ! Mon pied s'écrase contre une chaise qui valdingue dans le bar. Je me retourne et choppe alex par le col de son T-shirt.
— Tu vas me dire qui était avec toi avant que tu perdes ton portable !
Ses yeux de bovin s'arrondissent, il ouvre la bouche, la referme. Pris dans l'urgence, je dégaine mon flingue et lui enfonce le canon sous le menton.
— Je te jure, si tu ne parles pas, je te traîne derrière ma moto jusqu'à chez Lucie.
Il cligne des yeux, mais ne bronche toujours pas. Merde ! Il m'énerve ! Je l'embarque avec moi, le propulse la face contre la porte en l'ouvrant.
— Mais arrête, j'y suis pour rien ! hurle-t-il alors que je le malmène comme un pantin jusqu'à ma bécane, sous le regard médusé des passants.
— J'espère pour toi que Lucie est encore vivante.
Lucie ! Tu crois que... bafouille-t-il en se figeant.
— Oui ! Je pense qu'à l'heure qu'il est, elle est sûrement en train de barboter dans son sang !
Les mains devant la bouche, il me fixe comme un con.
— Ce n'est pas le moment de te foutre à chialer !
Sebastian est passé me voir tout à l'heure. Juste avant toi, lâche-t-il brutalement.
C'est pas trop tôt ! Si j'avais su que tu y tenais autant, je l'aurais menacé bien avant ta petite copine.
— Et qui est Sebastian ?
Il penche la tête en arrière en s'arrachant les cheveux.
— Bordel, Alex ! Parle !
— C'est un des gardes du corps de Kovacevick. C'est lui qui m'a trouvé le plan pour me faire de la thune. Je ne le connais pas beaucoup, on a fait quelques soirées, on se marre.
— C'est le type que tu espérais te faire ? Celui avec qui tu étais ici quand je suis passé et celui avec qui tu as fait la vidéo à l'hôtel ?
— Oui, souffle-t-il. Mais...
Mon téléphone vibre de nouveau.
— Allô ?
jaylie, c'est Xercès. Pas de traces de Lucie. Apparemment, elle s'est volatilisée en laissant son téléphone. Les voisins disent l'avoir vue sortir seule.
— Putain ! Et où est Jelem  ? Pourquoi on n'arrive pas à la joindre ?
— Je sais, c'est pas normal ! Kira et Diany sont partis chez Kovacevick.
— Tu te fous de moi ! Bordel, allez fouiller toute sa baraque ! Je vous y rejoins.
Les veines gonflées par l'adrénaline, je raccroche, enfourche ma moto, enfile mon casque et démarre. Alex me retient par le bras.
— Attends ! Lucie t'a parlé d'un hôpital ?
— Oui.
— Je crois savoir de quoi elle parle.
— Comment ça ? Abrège ! Je suis pressé ! C'est quoi, ces conneries ?
— C'est dans le quinzième, un hosto désaffecté pour enfants. On fait de l'urbex, avec Lucie.
— Balance-moi l'adresse !
Putain d'explorateur moderne à la con ! En mal de sensations fortes, ils visitent des lieux abandonnés, glauques, pour se foutre la frousse. À l'heure qu'il est, la Lucie doit pisser dans son froc. Je connais cet endroit surprenant, en plein cœur de Yaoundé , mais je n'ai jamais eu l'occasion d'y aller. Il a la réputation de n'être fréquenté que par les squatteurs, les toxicos. J'y fonce. Pour Jelem , mes collègues s'en occupent.
J'arrive rapidement devant une grande bâtisse en briques rouges sur laquelle est encore inscrit en grosses lettres défraîchies « clinique infantile ». Évidemment l'entrée est condamnée, je jette un coup d'œil à travers la vitre fendue : un hall crade, bourré de détritus. Charmant !
Je fais le tour en longeant le bâtiment et les fenêtres murées du rez-de-chaussée. Soudain, mon regard est attiré par une petite porte entrebâillée. Bien, allons voir si c'est si effrayant. J'envoie un SMS à Xercès lui donnant mes coordonnées, cale un antidouleur entre mes dents, brise la gélule, avale la poudre et crache son enveloppe dégueu à mes pieds. L'arme au poing, je pénètre dans l'hosto.
Avec ma respiration pour seul fond sonore, j'évolue dans un couloir sombre pour finalement grimper au premier étage et retrouver la lumière du jour.

Je débouche dans un couloir plus grand alimentant des salles vitrées sur ma gauche et des chambres sur ma droite

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

Je débouche dans un couloir plus grand alimentant des salles vitrées sur ma gauche et des chambres sur ma droite. Putain, il s'est passé quoi ici ? Ils se sont tous barrés en courant ?
Le lieu donne l'impression d'avoir été évacué en urgence. Des jouets jonchent le sol, des papiers, du matériel médical. La vache ! C'est tripant ! Il manquerait plus que je me fasse courser par un môme affamé armé d'un scalpel. J'avance, enjambe un ours en peluche crasseux, pousse un brancard bloquant le passage et observe un instant une salle d'auscultation décrépite.
Une demi-heure que j'arpente les pièces vidées de ses occupants. C'est fascinant, un décor de fin du monde, digne des meilleurs films d'horreur. Seuls les graffitis et les fresques de street art te rappellent que le lieu est certainement plus squatté qu'hanté.
Cinquième et dernier étage. Pas un bruit, il va bientôt faire nuit et me perdre ici dans le noir risque d'être une expérience plutôt sympathique. Je grimace en shootant dans une sorte de tricycle en plastique et m'arrête net. Quelqu'un a gémi.
Mon poing se resserre sur ma crosse. Un pas devant l'autre, je progresse lentement. Une lumière diffuse sort d'une pièce au fond du couloir. De nouveau un râle. J'inspire un bon coup et tout en faisant bien gaffe de ne pas me vautrer sur des billes ou je ne sais quelle autre merde, je fonce vers la source lumineuse.
Je pousse lentement la porte entrebâillée, mon flingue devenant le prolongement de mon regard. Et je me fige. C'est quoi, ce plan ? Ça craint !



__________________
30ieme partie . Qu'en pensez vous?
Merci de voter .
________________

Voter
Commenter

Jaylie murder&sex[En ECriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant