Les Chroniques de Livaï ~ EruRi Only [+13]

Un sommeil sans rêves #3

Chapitre 238 des Chroniques de Livaï

Après que Livaï soit venu me voir une demi-douzaine de fois, je décide de m'octroyer une pause bien méritée. Il me reste à signer le rapport de notre dernière mission. J'y ai bien signalé que le stratagème d'Hanji a bien fonctionné et qu'il a permis que l'expédition se déroule sans encombre. Même si ses idées me paraissent souvent trop fantasques pour être appliquées, il m'arrive de me tromper. Elle fait partie des éléments du bataillon qui le font avancer dans la bonne direction, elle aussi se projette constamment vers l'avenir.

Je saisis machinalement un autre biscuit et prends mon temps pour le déguster. Petit plaisir coupable... Je ne m'y autorise que rarement, même si Livaï pense le contraire. Si ce n'était pas le cas, je prendrais vite du poids ! Etant donné ma taille, je m'astreins à un régime assez drastique, et Mike fait de même. Mais... j'adore les sucreries et j'ai du mal à résister. Je culpabilise toujours après, comme si je ne méritais pas ces délices... Allez, c'est le dernier ! Je referme le sac bien proprement pour ne plus être tenté.

Depuis un petit moment, je n'entends plus les pages tournées par Livaï. Et il n'est pas venu me voir depuis quelques minutes. Je semble être seul ici... Je prononce son nom dans la pièce mais il ne répond pas. Et bien, il boude, peut-être ? Ce ne serait pas nouveau... Le soleil s'est couché mais il fait toujours chaud, j'irais bien prendre l'air. Je passe derrière le canapé et distingue nettement une respiration calme mais sonore. Qu'est-ce qu'il fait ? Se pourrait-il que...

Je contourne le divan et constate que Livaï est assoupi. Il tient encore le livre du bout des doigts. Ca lui arrive parfois, il pique des petits sommes de temps en temps, ce qui est loin d'être suffisant pour son équilibre, je le lui ai dit. Je l'appelle encore une fois mais il n'a aucune réaction. Etrange, d'habitude il a un sommeil d'oiseau, le moindre bruit suffit à le réveiller. C'est inquiétant...

Je m'agenouille et prend son pouls dans le creux de son poignet. Rien d'anormal. Je passe ma main sur son front ; pas de fièvre... Je dois me rendre à l'évidence : Livaï dort profondément et aucun cauchemar n'est en train de le troubler. C'est à n'y rien comprendre... Est-ce que mes explications l'auraient à ce point ennuyé ?

Il doit bien y avoir une cause à ce phénomène inhabituel. Je tape des mains, des pieds, le secoue légèrement, mais il ne se réveille pas. J'avise la tasse de thé près de lui et la soulève devant mon visage. J'en hume l'odeur mais ne détecte rien d'anormal.

Comme s'il avait compris que j'avais besoin de lui, Mike entre dans l'office en disant qu'il me cherchait. Devant ma mine soucieuse, il ne peut s'empêcher de se mêler de l'affaire, et en déduit à voix basse que Livaï doit faire semblant de dormir pour m'embêter. Ou pour que j'arrête de me faire du souci à propos de ses insomnies. Mike se lève et prononce d'une voix forte "réveille-toi, rase-gazon, tu gênes le chef avec tes bêtises !" Ca va, Mike, n'en fais pas autant... Aucune réaction, évidemment. Mike conclut que Livaï doit être vraiment endormi sinon il aurait réagi au quart de tour. Passer du soldat insomniaque au soldat narcoleptique, c'est un comble.

Je lui présente la tasse et lui demande s'il sent quelque chose de bizarre. Il renifle deux fois et me répond qu'il n'est pas adepte du thé noir et serait incapable de dissocier son odeur habituelle d'une autre. Je ne suis pas plus avancé...

Nous restons pendant quelques minutes à côté à le regarder puis Mike me conseille de le laisser dormir ici. Après tout, c'est si rare qu'on lui doit bien cette faveur. Je hoche la tête pour l'approuver. Mike me tend ma veste mais je ne la mets pas, il fait trop chaud. Nous éteignons toutes les chandelles de l'office avant de sortir sans verrouiller la porte. Il peut toujours se réveiller, et ça m'ennuierait qu'il se retrouve enfermé...

Mais j'avoue que ce sommeil si absolu m'intrigue ; ça ne lui ressemble pas du tout, ce n'est pas naturel. A moins que...