Chapitre 212 des Chroniques de Livaï
Je suis juste en train de signer mon rapport quand Livaï entre dans mon bureau. Sans frapper, comme cela lui arrive une fois sur deux. Il faudra que je le rappelle à l'ordre là-dessus, ma tolérance a des limites.
Il n'oublie pas de saluer pour autant et se tient devant moi, droit et immobile, attendant patiemment que je lève les yeux de ma feuille et repose ma plume. J'enlève mes lunettes de lecture et lui demande ce qui l'amène, tout en lui signalant de rompre le salut. Il se détend un peu et m'annonce qu'il aimerait pouvoir s'absenter plus longtemps que prévu. Demain, c'est son jour de relâche et il me demande une prolongation. Pour quel motif ? Où te rends-tu ? A la capitale, me répond-t-il. Inutile d'exiger des détails, je me doute de sa destination.
Je me penche en arrière dans mon fauteuil et l'observe un instant. Sa conduite a été irréprochable depuis son intégration, il a pris part à tous les exercices sans broncher et a même fait progresser l'escouade. Irréprochable si j'élimine ses innombrables manquements à la politesse... Peut-être devrais-je le réprimander aussi à ce sujet, mais je n'en ai pas le coeur. Il commence à peine à s'habituer à vivre avec nous, autant ne pas faire en sorte qu'il se renferme sur lui-même.
Il a bien travaillé, il mérite bien ce congé. Cependant, je lui signale que je dois me rendre moi-même dans deux jours à la capitale, et que s'il veut bien attendre jusque là, nous pouvons faire la route ensemble en diligence militaire. L'idée ne semble guère lui plaire et il me répond qu'il ne peut pas attendre et qu'il partirait même sur le champ s'il le pouvait. Ca, ce n'est pas possible, vous avez des choses prévues pour aujourd'hui. Après la pause de midi, vous avez un entraînement équestre puis un cours stratégique, qui sera essentiel pour la prochaine expédition. Tu ne peux le manquer.
Je tasse mes feuillets contre la table, et les pose sur le coin de mon bureau. Très bien, tu pourras partir demain. Veille à être rentré après-demain au plus tard en soirée, sinon nos emplois du temps seront chamboulés. Je l'entends pester dans sa barbe contre les cours stratégiques, qu'il a l'air de trouver très ennuyeux. Il est vrai que cet aspect est plutôt du ressort des chefs d'escouade, mais les simples soldats doivent avoir certaines notions en cas d'urgence.
J'en profite pour lui rappeler que si son langage ne me dérange pas outre mesure, il doit veiller à modérer ses propos devant les autres supérieurs du bataillon ou des autres régiments. Zackley passe de temps en temps en visite à la forteresse, et il serait dommageable qu'il entende ce genre de chose. J'essaie de le lui faire comprendre diplomatiquement, et curieusement, il ne se met pas en colère. Tout au contraire, il hausse un sourcil, et me demande si c'est bien vrai, si je ne trouve pas ça insupportable en vérité. Je lui dis que non, que sa façon de parler est plutôt rafraîchissante et me change des langages soutenus que je dois supporter au quotidien. Sa franchise est toute à son honneur et au moins avec lui, je sais à quoi m'en tenir ! Je l'encourage même à me faire des remarques s'il le juge nécessaire. Je ne suis pas un tyran qui envoie au trou quand on lui marche sur le pied ; je suis ouvert à la critique.
Il met ses poings sur les hanches avec un léger sourire aux lèvres en me toisant de haut - enfin, du plus haut qu'il peut. Il prend son élan, et me lance alors qu'il trouve pitoyable ma façon de lécher le cul du major, selon ses propres mots. Et bien, voilà qui est clair ! Merci pour ton appréciation, j'essaierai de me montrer moins obséquieux à l'avenir. As-tu quelque chose d'autre à me demander ou bien avons-nous fini ?
Il me répond que c'est tout de son côté, mais qu'il va réfléchir à d'autres choses à m'envoyer dans la figure. Aie tout de même un peu pitié, Livaï, je suis un homme occupé et plein de soucis ! Une seule remarque de ce genre par jour suffira !
Il s'apprête à partir - sans attendre mon autorisation -, mais je l'arrête. Une petite faveur. J'aimerais que tu apportes ce rapport au major pour moi. Et souviens-toi : pas de grossièretés devant lui ; par contre, tu peux lui balancer tout ce que tu veux en silence. Il se saisit de la liasse de papiers, me salue et sort de la pièce. Une fois seul, je me lève en m'étirant un peu et me poste devant la fenêtre. J'observe pendant un moment les soldats à l'entraînement.
C'est une bonne chose qu'il se détende face à moi. Il n'y a pas d'agressivité dans sa franchise, il n'ira plus trop loin. Il a juste sa manière à lui de respecter mon autorité. Il trouvera lui-même les limites à ne pas franchir.
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Les Chroniques de Livaï ~ EruRi Only [+13]
FanficUne compilation des chapitres des Chroniques de Livaï qui exposent la relation entre Erwin et Livaï. Elle reflète comment je les vois dans le contexte du manga, et en suivant la timeline de SnK. Leur rencontre, leur antagonisme du début, leur lien q...